– ELOGE DU PRINTEMPS I SAKURA NO HANA I HANAMI –
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Dans la culture nippone, les fleurs de cerisier suggèrent les connotations « claires » du printemps (la renaissance de la nature, la jeunesse, la force, la joie) ou « sombres » (l’éphémère, l’impermanence de la vie, la mort, les samouraïs)…
Nous allons comprendre pourquoi ce symbole national occupe une place majeure sur le plan esthétique, religieux, paysager et culturel.
Hisakata no
Hidari nodokeki
Haru no hi ni
Shizu kokoro naku
Hana no chiruramu
Dont les doux rayons font un jour
De printemps si doux
Pourquoi d’un cœur inapaisé
Ces fleurs vont-elles tombant
La fleur de cerisier sakura no hana, symbole du Japon
La fleur de cerisier sakura no hana fait partie des symboles du pays. Elle est glorifiée et admirée car pour l’âme et le sens esthétique des Japonais, elle représente la perfection. Elle est depuis toujours une source d’inspiration de milliers de poèmes waka (31 syllabes) et haïku (17 syllabes) et le symbole de l’impermanence des choses prônée par la religion bouddhiste. C’est pourquoi, elle a été adoptée comme emblème par les samouraï dont la vie était tout aussi éphémère que leur floraison.
Nous ne vivons que pour l’instant où nous admirons la splendeur du clair de lune, de la neige, des cerisiers en fleurs et des feuilles multicolores de l’érable. Nous jouissons du jour, de l’ivresse du vin, sans nous laisser dégriser par l’indigence qui nous regarde dans les yeux. Emportés par ce courant, telles les citrouilles dans les eaux d’un fleuve, nous ne laissons à aucun moment le découragement s’emparer de nous. C’est ce qu’on appelle le temps qui coule, le monde qui passe.
Extrait Asai Ryoi Contes du monde éphémère des plaisirs
Un monde de douleur et de peine
Alors même que les cerisiers
sont en fleur
Issa (1763-1828)
L’esthétique du cerisier & shinto
Hanami regarder les fleurs est à la base un rite de purification et d’accueil des divinités shinto, religion polythéiste indigène. On accueil le kami, esprit de la nature qui descend de la montagne, vers le satoyama vallée cultivée pour devenir divinité des rizières et de la fertilité.
La divinité shinto Kono-hana-no-Sakya-Hime représente l’esprit des fleurs des cerisiers et le kami protecteur du Mont Fuji.
La voici, vêtue d’un kimono de cérémonie traditionnel porté par les dames de la cour à l’époque Heian (794-1185) dénommé junihitoe, composé d’un lourd vêtement de dessus kosode et une douzaine de jupons de soie de différentes couleurs destinés à produire un ensemble original et séduisant, pesant environ 20 kg.
La brise de printemps`
ne laisse pas les fleurs de cerisier
à ce monde flottant
elle les disperse
et ne cesse de les regretter
Saigyô (1188-1190), Vers le Vide, II Fleurs dispersées
Il y a plus de 300 variétés de fleurs qui se divisent en deux groupes : yamazakura (yama montagne) et satozakura (sato villages). Au printemps, tous les moyens de communication, dont Kishocho l’agence de la météorologie nationale, annoncent chaque jour l’avancée du front des fleurs hana-zanzen qui remonte du sud de l’archipel.
L’esthétique paysagère keikan bigaku
La nature est indissociable de la culture. Dès l’époque Heian(794-1185), l’esthétique paysagère s’est étendue aux jardins avec les pruniers ume et les cerisiers sakura.
keshiki totonou
tsukuba to ume
parfait son ambiance –
Lune et fleurs de pruniers
L’un des patrimoine Unesco, est la montagne sacrée de Yoshino au sud de Nara. Site important du point de vue historique (lieu d’exil d’un groupe qui a lutté contre le shogun* pour rétablir l’empereur au XIVe), littéraire (Yoshitsune Senbon Zakura pièce célèbre de kabuki**) et religieux (lieu de la secte Yamabushi, du culte shugendō).
Le moine En no Gyoja, aussi appelé En no Ozuno (634-707), fondateur de la secte shugendō et première personne qui a effectué l’ascension du Mont Fuji, a gravé sur le tronc d’un cerisier la vision du Bouddha. Depuis on a planté en offrandes, des cerisiers sauvages de montagne yamazakura arrivant ce jour à plus de 30 000.
Aussi loin que porte le regard, on n’y voit que des cerisiers en fleurs, hormis ce qui, caché, reste invisible.
uki-boshi numeri-
zuma
Les bonzes deviennent des fêtards
et les femmes mariées séduisantes
shogun* : chef militaire kabuki** : théâtre japonais avec des costumes stylisés et un jeu codifie joué que par des hommes yamabushi*** : « ceux qui se prosternent dans les montagnes » ascètes montagnards et guerriers shugendo**** : tradition spirituelle lié à l’ascétisme en montagne dont le but est le développement d’expériences de pouvoirs spirituels gen par la pratique dō vertueuse de l’ascèse shu. Religion syncrétique incorporant des aspects du taoïsme, du shinto, du bouddhisme ésotérique et du shamanisme japonais traditionnel. meisho***** : lieu touristique célèbre |
HANAMI Célébration collective et individuelle
Au printemps, lors de la fête de hanami (hana fleur, mi regarder, observer) ou sakurami (sakura cerisier mi regarder, observer) les Japonais se réunissent débordants de joie sous le poudroiement de pétales de pruniers ume et de cerisiers sakura, assis sur des bâches bleues buru shito, pour pique-niquer, chanter et boire du hanami-zake sake à regarder les fleurs.
sarah hana
mogana
dans le vent printanier,
éclats de rire
Autant le hanami que la météo capricieuse de printemps haru ont enrichi le vocabulaire « de saison » :
- hanagumori : temps gris de fleurs, brume printanière
- hanabie : temps froid au printemps, gelée printanière
Fleur de cerisier sakura NO HANAet gastronomie shokubunka
Le thé est parsemé de fleurs de cerisiers, les gâteaux wagashi (gâteau mou, cuit ou sec) et sakura-mochi prennent toute les nuances de rose et les formes de pétales.
sorowanu
hanami-gokoro kana
sans le service à vaisselle…
à ma convenance
Geisha et la danse des fleurs de cerisiers miyako-odori
A Kyoto, quartier de Gion, durant le mois d’avril de chaque année, 32 geishas* donnent 5 fois par jour un spectacle miyako-odori la danse des fleurs de cerisiers. J’ai eu la chance de pouvoir y assister lors de mon 1er voyage en 2012 et prendre des photos en cachette malgré l’interdiction. Sont restés gravés dans ma mémoire, les filles pleines de grâce vêtues de kimonos somptueux, la musique, les danses, les décors….
Le kimono de printemps représente les fleurs de cerisier avec des couleurs roses sakura iro.
geisha*: personne des arts, amuseuse ou compagnie professionnelle
Yuki haru ya S’en va le printemps, ah –
tori naki uo no
me wa namida
chants d’oiseaux, le poisson
larme à l’oeuil