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11/2022

KIMONO  I  symbole du JAPONISME

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A la différence de l’enthousiasme de la noblesse du XVIIIe siècle pour la Chine, le japonisme s’est répandu grâce à l’Exposition universelle de Paris en 1867.

Dès les XVIIe et XVIII siècles, la manufacture de Lyon s’inspira des motifs de l’ornementation japonaise pour créer ceux des soieries ; tandis qu’à Chantilly et à Saint Saint-Cloud, l’on copiait les porcelaines de Kakiemon et les Nabeshima. Enfin, les meubles de laques étaient appréciés de Madame de Pompadour et de Marie-Antoinette, qui en firent collection. Mais, ces phénomènes étaient plutôt les dernières manifestations de la mode des chinoiseries. extrait Japon, la vie des formes Shuichi Kato Bibliothèque Des Arts

Pavillons chinois et japonais, Exposition universelle, 1867 © Le Monde illustré, 1867

Le public fut fasciné par le pavillon japonais et la découverte du kimono porté par les premières femmes japonaises venues en Europe et accueillies avec une curiosité extrême.

On peut affirmer que le kimono est le symbole national du Japon et conjointement du japonisme en Europe qui gagna par la suite l’Occident. Nous allons découvrir pourquoi il a été une source d’inspiration autant pour les peintres que pour les créateurs de mode et les écrivains.

PEINTURE

A Londres, la première exposition d’art appliqué japonais de 1854 et l’Exposition universelle de 1862 ont été le détonateur de l’intérêt des artistes pour le Japon, mais le terme japonisme né en 1867 avec l’Exposition Universelle de Paris.

La découverte de l’art japonais, notamment à partir de l’Exposition universelle de Paris en 1867 et de l’afflux d’objets japonais, déclencha un mouvement artistique appelé japonisme. Il touche de nombreux artistes à la recherche d’une nouvelle voie créatrice et l’impact de cet art, soit dans les motifs, soit dans les techniques (composition, couleurs, contours, etc… fut considérable. extrait Quand le Japon s’ouvrit au monde Francis Macouin , Keiko Omoto Émile Guimet et les arts d’Asie Collection Découvertes Gallimard (n° 99)

Hayashi Tadamasa (1853-1906), interprète durant l’exposition universelle, puis traducteur de documents sur l’art japonais et marchand, a joué un rôle fondamental dans l’histoire du japonisme durant son séjour à Paris de 1878 à 1893, et à la fois en tant qu’ami des peintres (Claude Monet, Camille Pissaro, Paul Renouard), des intellectuels et des hommes de lettres (Edmond de Goncourt, Émile Guimet, Félix Régamey).

Puis, Louise Mélina Desoye (1836-1909) a été l’unique femme qui a contribué à la première vague du japonisme en vendant dans sa boutique des produits importés du Japon. Ce lieu a été fréquenté par les peintres de la vague « japonisante » dont le précurseur anglais James Whistler : installé à Paris dès 1855, ses œuvres ont diffusé l’impressionnisme en Angleterre et aux États-Unis.

© Free Gallery of Art, Smithsonian Institution Washington, Caprice en pourpre et or n° 2. Le paravent d’or, 1864, James McNeill Whistler
© Smithsonian’s Museum of Asian Art Whashington, Rose et argent : La Princesse du pays de la porcelaine, 1863-1865, James McNeill Whistler

Toujours à Paris, Samuel Bing (1838-1905) marchand et critique d’art, collectionneur et mécène français d’origine allemande) avait acquis des milliers d’estampes japonaises qu’il a reproduites de 1888 à 1891 dans sa revue mensuelle Le Japon artistique. Documents d’art et d’industrie publiée simultanément en français, anglais et allemand. En 1890, il a enfiévré le monde avec l’exposition de 725 peintures et 428 livres illustrés japonais à l’École des Beaux-Arts de Paris.

A partir du mois de juillet 1893, la revue littéraire et artistique La Revue Blanche, publie en couverture une estampe en noir et blanc d’un peintre de la mouvance symboliste : Bonnard, Vouillard, Roussel, Manet, Monet, Pissaro, Renoir…

© Pierre Bonnard, La Revue Blanche

Certains artistes qui collectionnaient des estampes ont fini par changer la technique et la forme de leur art, comme Henri Toulouse-Lautrec et Vincent Van Gogh. Ce dernier, écrivait du Sud de la France à son frère « Ma vie devient ici de plus en plus celle d’un peintre japonais ». (cf. article 8/2021 Iris, le radieux). A sa mort en 1890, son médecin a trouvé un carton de quatorze estampes près de son lit.

Parallèlement, les contrastes des couleurs des kimono ont également influencé la palette des artistes.

[…] dès 1890, l’Art Nouveau s’inspira des lignes souples et des motifs floraux des tissus japonais, des poncifs de papier, ainsi que des estampes de couleur. extrait Japon, la vie des formes Shuichi Kato Bibliothèque Des Arts

L’estampe, perçue en Europe comme une nouvelle forme d’expression artistique, a connu un immense succès, nombreux peintres y ont puisé leur inspiration :

  • en Angleterre : Aubrey Beardsley ;
  • en France : Jacques-Joseph (James) Tissot, Edouard Manet, Claude Monet, Edgar Degas, Gustave Moreau, Henri Toulouse-Lautrec et Vincent Van Gogh ;
© Boston Museum of fine art, Claude Monet, Madame Monet en kimono, La Japonaise 1876
© Albi Musée Toulouse Lautrec, Toulouse-Lautrec en kimono, avec éventail et poupée japonaise, 1890
François Gauzi (1862-1933), Portrait de Lili Grenier en kimono devant un paravent
© Lili Grenier en kimono, Henri de Toulouse-Lautrec, 1888
  • en Belgique : Alfred Stevens ;
© Domaine Public, Alfred Stevens (1823-1906) La Parisienne Japonaise
© Domaine Public, Alfred Stevens (1823-1906) Yamatori
  • au Pays Bas : George Hendrik Breitner ;
© George Hendrik Breitner, Girl in red kimono, 1894
© Breitner George Hendrik – Girl in a Red Kimono Before a Mirror
  • en Autriche : Gustave Klimt ;
© Gustav Klimt, Femme en Kimono
© Gustav Klimt, Le baiser, 1909
  • en Allemagne : Otto Eckmann et Emil Orlik.

Malgré la fascination exercée par le Japon sur ces artistes, aucun n’a fait le voyage pour le découvrir ou confronter leurs idées à celles des artistes japonais !

A l’inverse, des artistes japonais se sont rendus à Paris – devenu centre artistique de l’Europe grâce aux impressionnistes – pour apprendre les nouvelles techniques de la peinture et fini par peindre « à l’occidentale » : Kuroda Seiki, Saeki Yûzô, Aoki Shigeru, Kihida Ryûsei, Fujita Tsuguji qui s’est fait naturaliser français…

© Centre de recherches de la Tôkyô kokuritsu bunkazai, Kuroda Seiki, Au bord du lac, 1897
© Kuroda Seiki, A Maiko Girl 1893
© Ryusei Kishida
© Ryusei Kishida, Reiko, Girl of Japan art detail, 1918
MODE

Les soieries japonaises ont envouté les artistes, mais également les femmes qui les arrachaient des mains des marchands.

Leur charme tout particulier provient de leurs motifs fantastiques, aux mille couleurs, dans lesquels jouent et s’entremêlent merveilleusement des rameaux en fleurs, de fines pousses de roseau, des oiseaux en vol et d’étonnantes formations de nuages. La magie multicolore de ces étoffes, absolument délicieuses et incomparables, provient surtout du fait que la signification propre du motif décoratif – comme il est de règle pour un motif – s’efface dans l’effet d’ensemble de la pièce. Il y a là des juxtapositions de couleurs d’un effet si inhabituel, d’un attrait si vif que l’on comprend bien la frénésie avec laquelle les mains de nos élégantes se tendent vers ces exquises pièces de tissu. (propos de Lessing Julius, historien de l’art allemand, extrait Japonisme WICHMANN Siegfried Edité par Chêne/Hachette

Entre 1860 et 1920, l’attitude et les gestes de la parisienne ont été influencés par le kimono.

Quand les cultures tribales ont choisi le tatouage et la peinture du corps comme vêtement incarné, l’Occident a choisi le vêtement comme peau sociale, les deux muant le corps brut en corps culturel » note Thomas Lentes dans Qu’est-ce que la mode ? Cette notion de « peau sociale » semble s’appliquer parfaitement au vêtement traditionnel japonais, soumis au contraintes de la hiérarchie sociale tout en étant une représentation extrêmement brillante d’une partie du « corps culturel » nippon. En effet, le kimono n’est pas seulement manifestation d’une appartenance sociale et parure, il est aussi philosophie, esthétique, poésie, il est art : un art portable. extrait Kimono d’art et de désir Aude Fieschi Editions Picquier

Issey Miyake écrivait dans le livre Kimono de Sylvie et Dominique Buisson que plusieurs créateurs de mode occidentaux ont subi l’influence orientale tandis que ceux japonais sont partis de la mode occidentale pour obtenir leur originalité.

Frederick Worth (1825-1895), couturier français d’origine britannique et l’un des fondateur de la haute couture à Paris, s’est inspiré des tissus japonais et du kimono pour la création de ses robes.

Par la suite, le célèbre Paul Poiret (1879-1944) créa en 1910 un manteau kimono et des robes.

Frederick Worth
Paul Poiret
LITTÉRATURE

L’influence du Japon s’est déployée non seulement dans les arts plastiques mais aussi en littérature, d’où le terme de japonisme littéraire.

Les écrivains ont pressenti très tôt la fascination que présentait le Japon. De la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle, certains écrivains composaient dans le « goût japonais » par exemple Judith Gautier, autrice de plusieurs romans et nouvelles inspirés par l’histoire japonaise et Pierre Loti avec Madame Chrysanthème.

L’idéal féminin que donnent les livres de Pierre Loti est le personnage de Madame Chrysanthème Okiku-san qui enchantait Van Gogh, culmina finalement dans le doucereux plagiat de Madame Butterfly et apparaît comme une métaphores romantique de la réalité. Auguste Rodin lui-même, fut captivé par la danseuse Hanako. extrait Japon, la vie des formes Shuichi Kato Bibliothèque Des Arts

© Domaine public, Danseuse Hanako
© Musée Rodin, Rodin, Hanako 1907

En guise de conclusion :

L’influence de la culture japonaise sur l’art occidental  du début du XXe siècle est indéniable et se manifeste d’innombrables manières. Les aspects les plus variés ont ainsi vu le jour : compositions asymétriques, nouveaux thèmes inspirés de la nature ou de la société, respect du vide, c’est-à-dire « amour du vide » qui vient remplacer l' »horror vacui », et beauté des lignes, entre autres. extrait Ryokan, Gabriele Fahr-Becker édition Könemann

10/2022

L’OMBRELLE KASA  I  ACCESSOIRE DU KIMONO

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© Utagawa Kunisada, Chutes de neige au crépuscule à Ueno

Étroitement liés à la vie quotidienne, tous les supports artistiques japonais impliquent un mouvement dans l’espace et un rythme dans le temps. La peinture se roule et se déroule, le paravent se déplie, le kimono n’a d’existence que porté, les laques sont toujours utilitaires. Les Japonais aiment ainsi à se définir à travers des objets idéals, des fictions codées qui transforment le réel en quelque chose de sacré, et à transformer les gestes en rituels. extrait Le corps japonais de Dominique Buisson

Pour faire écho, je rajouterais l’éventail et l’ombrelle kasa à qui je dédie ce dernier article en tant qu’accessoire du kimono.

Après une brève présentation de ses origines, j’aborde son mode de fabrication et les modèles selon leur usage, ainsi que sa place dans la croyance populaire.

ORIGINE

Les premières ombrelles rigides auraient été découvertes parmi les tributs envoyés par le roi de Kudara, une ancienne province coréenne, à l’empereur Kimma (539-571).

Avant cela, les femmes portaient des chapeaux larges et plats, en fibres végétales tressées (bambou ou cyprès).

@ BNF, L’aubergine, Harunobu Suzuki (1725-1770)

Quittons-nous –
Je porte des vêtements d’été
et kasa à la main
Bashô (1644-1694)

Ici, un aperçu en images de divers modèles de chapeaux pour femmes et hommes dont les paysans et les moines pèlerins.

 © Domaine public , Kusakabe Kimbei via Wikimedia Commons

Durant Edo (1603-1868), afin de pouvoir voyager plus aisément à pied, les artisans ont inventé divers objets pliants et légers à base de bambou et de papier : l’ombrelle et la lanterne.

©Tokyo National Museum, Suzuki Harunobu (1725-1770)

Sévère
le bruit de la grêle
sur mon kasa en cèdre !
Bashô (1644-1694)

FABRICATION

La monture des kasa est faite de bambous fendus et sur le réseau flexible des branches on tend du papier washi huilé imperméable, décoré ou pas de peinture ou logo. Les kasa pour femmes sont plus grands que ceux des hommes et comptent 40 baleines au lieu de 50.

Les kasa sont souvent représentées dans les estampes ukiyo-e  « images du monde flottant » puis dans les premiers photographies.

LES TYPES DE KASA

La forme du kasa traditionnel est immuable, par contre, il change de nom selon sa conception et son utilisation.

  • higasa ombrelle qui protège du soleil éviter que la peau ne se hâle
  • amagasa contre la pluie

Nous logeâmes dans une hutte au pied de la montagne. Il feraient une nuit noire et sans lune, et je me sentis engloutie et perdue dans l’obscurité, lorsque trois chanteuses apparurent, venant on ne sait d’où. […] Nous les déposâmes devant notre logement, à l’abri d’un grand karakasa. Mon domestique alluma un feu afin que nous puissions les voir. extrait Sarashina nikki de Sugawara no Takasue no Musume

  • bankasa comporte le kamon symbole de la « maison » ou le nom de l’établissement  (ryokan, hôtels…) tenue à la disposition des clients
  • jya no me gasa littéralement parapluie « œil de serpent » car le dessin en cercle y ressemble

Les artisans de Kyoto excellent dans la fabrication des ombrelles et ont rapidement adapté leur technique traditionnelle aux goût modernes.

Les ombrelles de type occidental sont appelés kômorigasa littéralement « parapluie en forme de chauve-souris ».

A l’ère Meiji (1852-1912), le prix des premières ombrelles occidentales était exorbitant, synonymes de luxe et de raffinement.

Elles étaient fabriquées à partir de matériaux tels que le coton et le lin, avec des pampilles en soie sur la poignée et la pointe pour souligner leur élégance. source web-japan

CROYANCE POPULAIRE

Dans le folklore, le kasa-obake littéralement « esprit-ombrelle » est un monstre yōkai de la famille tsukumogami composée d’objets du quotidien qui peuvent prendre vie après 100 ans d’existence. Il a la forme d’une ombrelle traditionnelle pourvue d’un œil, d’une langue, de deux bras et d’une seule jambe. Il n’est pas redoutable, mais tout simplement… dégoutant. Pour en savoir plus, cliquez ici

 

9/2022

KIMONO   &   ART DU maquillage traditionnel

Artifice ou célébration de la beauté ?

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Exquise et étrange, avec son air de froide déesse qui regarde en dedans, qui regarde au-delà, qui regarde on ne sait où.
Pierre Loti

Le maquillage traditionnel, contrairement à la coiffure et au vêtement, a évolué légèrement entre l’Antiquité et le XIXe siècle. En dissimulant ses traits, la femme était devenue une abstraction qui ne prenait de sens que dans la rigidité des codes sociaux propres à chaque époque.

Durant Heian (794-1185) « La très longue chevelure, objet de nombreux poèmes, mettait en valeur le blanc du visage qui s’appliquait en couche de plus en plus épaisse et se répandait chez les courtisanes et les jeunes danseuses. Les yeux étaient étirés et la bouche rouge, menue à l’extrême. L’ensemble devait apparaître comme immatériel et inexpressif car la dame se devait d’afficher un léger masque de détachement et d’ennui pour mettre un paravent à l’expression de ses sentiments. L’esthétique qui en résulte imprégna longtemps l’esprit du maquillage. Cette incertitude mélancolique, cette opposition de sensualité et d’inexpression, cette corrélation étroite entre la beauté et la tristesse marquèrent la naissance du goût japonais. » extrait Le corps japonais, Dominique Buisson, Editions Hazan

Depuis le 6 janvier 1869, date du décret impérial qui a interdit le fard d’un autre âge, seuls les geisha, les maiko et les acteurs de kabuki maintiennent cet art vivant.

Mon article dévoile les secrets de maquillage à travers sa palette de base – blanc, noir et rouge – ainsi que les soins du visage et, pour finir, quelques accessoires remarquables par leur raffinement.

BLANC

Une peau blanche était, comme dans la plupart des société aristocratiques, un signe de beauté. Dans les peintures représentant les messieurs et les dames de la cour, les gens d’un rang supérieur avaient toujours des visages plus pâles. La nature ne respectant pas toujours cette distinction, la pâleur nécessaire était acquise au moyen de généreuses applications de poudre. extrait La vie de cour dans l’ancien Japon au temps du Prince Genji, Ivan Morris, Collection La Suite des temps, Gallimard

@ Artmemo, Goyo HASHIGUCHI (1880 – 1921)   Jeune femme se poudrant

« Un visage blanc cache beaucoup de défauts » – proverbe

[いろのしろいのはしちなんかくす, iro no shiro no wa shichinan kakusu] « Iro no shiro » désigne la blancheur d’un visage de femme, 七難 – しちなん- shichinan ; désigne les 7 infortunes bouddhistes et dans son sens figuré un grand nombre de défauts. Il faut se méfier des apparences. 

Pour cela, on employait une poudre blanche – keifun blanc de mercure ou o-shiroi blanc de céruse (en dépit du Saturnisme dû au plomb !) – fondue dans l’eau et appliquée avec des pinceaux sur le visage, le cou, la nuque et le décolleté qui étaient enduits auparavant de l’huile de camélia bintsuké-abura. Après Edo (1603-1868), ces poudres nocives ont été remplacées par une pâte non métallique neri-o-shiroi et la poudre kona-o-shiroi.

Les geisha mettent en valeur leur nuque en la blanchissant, mais gardent nus trois triangles de peau naturelle dénommés « trois jambes » sanbon-ashi (les apprenties maiko n’ont que deux !). Ce minime détail invite à l’érotisme en laissant imaginer les secrets d’une intimité interdite.

makeup guide | Geisha

Aujourd’hui encore, la blancheur de la peau demeure la condition première de la beauté. En été, la japonaise cache son visage du soleil sous des chapeaux, des ombrelles,… et les bains de soleil font défaut à sa culture.

NOIR

Le noir est inhérent aux coutumes de passage de l’existence féminine, de l’enfance à l’âge adulte.

  • Les sourcils

La coutume d’épiler ou de raser les sourcils  existait en Chine pendant la première dynastie Han et fut importée au Japon. L’aristocrate et la femme des samuraï se rasaient les sourcils à partir de la maturité (13 ans) tandis que la femme du peuple, une fois mariée ou devenue mère, coutume dénommée hongenpuku.

A la très aristocrate époque Hein, le goût était à l’extrême délicatesse et le maquillage se japonisa. Les sourcils étaient alors les éléments les plus importants de la beauté. On les détestait naturels et on épilait « ces horribles chenilles » afin de les redessiner, généralement plus haut sur le front. Au début, c’était des croissants fins et longs, mais les plus spectaculaires étaient larges et estompés. Plus tard, on les nomma « feuilles de saule », « croissants de lune », « antennes de papillon », « cocons de soie ». extrait Le corps japonais, Dominique Buisson, Editions Hazan

@ Artmemo, Shodo YUKAWA Beauté de l’époque Heian (794-1185)

On redessinait les sourcils rasés avec du noir mayuzumi obtenu par un mélange de fleurs brûlées, de poudre d’or, de suie et d’huile de sésame ou par de la pelure de châtaigne, du charbon de paulownia.

Dans l’ouvrage Kewai mayuzukuri kuden La tradition du maquillage des sourcils,  Mizushima Bokuya détaille les règles pour dessiner les sourcils et les accessoires nécessaires.

  • Les dents

La coutume detsushi ou kanetsuke qui consistait à se noircir les dents était usitée par les femmes et les hommes de classes supérieures jusqu’à l’ère Meiji « pour se différencier des esclaves et des animaux » (à la période de Tokugawa (1603-1867) les prostituées appelées « les mariées d’une nuit » également).

D’abord réservé aux dames de la cour, le o-haguro, le noir à dents, est adopté par les hommes et se répand dans les meilleurs guerriers ; puis son usage est à nouveau restreint aux femmes du peuple. Parallèlement, ce signe de l’accès à l’âge adulte devient celui du mariage : couleur inchangeante, symbole de la fidélité et de l’obéissance des femmes. Abolie en 1870, la coutume du noircissement des dents subsista longtemps dans les campagnes reculées. extrait Dictionnaire de la civilisation japonaise, Augustin Berque, Hazan

© Kitagawa Utamaro, Museo Nacional del Prado

La poudre hagurome était composée de débris de fer oxydés et de noix de galle fushi, dissoute dans du thé ou du saké.

ROUGE

Sur ce fond blanchâtre, les femmes mariées appliquaient généralement un peu de rouge, elles peignaient également leurs lèvres pour donner à la bouche l’aspect d’un bouton de rose. extrait La vie de cour dans l’ancien Japon au temps du Prince Genji, Ivan Morris, Collection La Suite des temps, Gallimard

Le rouge beni-guchi, extrait de benibana*, plante de la famille du chrysanthème Carthamus tinctoris, servait pour rougir les lèvres, les joues et parfois pour le contour des yeux afin d’éclairer l’iris et creuser un peu l’arcade.

@ Artmemo, Goyo HASHIGUCHI (1880 – 1921)   Jeune fille se mettant du rouge à lèvres

Elle est mignonne, fine, élégante ; elle sent bon. Drôlement peinte, blanche comme du plâtre, avec un petit fond rond rose bien régulier au milieu de chaque joue ; la bouche carminée et un peu de dorure soulignant la lèvre inférieure. extrait Japon, Erwin Fieger, L’iconothèque

*Entre parenthèse, ces agents colorants de benibana servirent pour teindre les tissus, puis à partir du XVIIe dans la fabrication des encres d’imprimerie pour les estampes ukiyo-e de type benizuri-e et beni-e.

LES SOINS

A l’époque Edo 1813  est paru un ouvrage sur l’esthétique intitulé Le Guide de la beauté dans la capitale Miyako fûzoku keshôden de Sayama Hanshichimaru et illustrations de Hayami Shungyôsai.

  • Le visage

Les femmes utilisaient des sachets de tissus nuka-bukuro remplis de son de riz hydratant nuka, de plantes médicinales ou aromatiques, de poudre de haricots rouge azuki nettoyante araiko qui contenait de la saponine. Elles plongeaient les sachets dans l’eau chaude puis les essoraient avant de frotter leurs visages.

Cent belles femmes dans des sites célèbres d’Edo : La colline Goten-yama, Utagawa Toyokuni III, 1858 © POLA Research Institute of Beauty and Culture
  • Les dents

On utilisait une brosse à dents fusayôji en bois de saule, de cèdre ou de bambou sur laquelle on mettait du sel ou une poudre abrasive rouge mêlée à des parfums.

@ Yoshitoshi, Fine Art Print

Source : catalogue de l’exposition Secrets de beauté, Maquillage et coiffures de l’époque Edo dans les estampes japonaises à la Maison de la culture du Japon à Paris 

ACCESSOIRES
@ Artmemo, Kitagawa UTAMARO (1753-1806) La courtisane Takashima Ohisa

Voici un aperçu de quelques accessoires qui ont été présentés du 19 mai au 10 juillet 2021 lors de l’exposition Secrets de beauté, Maquillage et coiffures de l’époque Edo dans les estampes japonaises à la Maison de la culture du Japon à Paris

 

@ Maison de la culture du Japon à Paris

@ TACHIBANA MUSEM JAPAN

SECRETS DE BEAUTE

Michiyo Watanabe du POLA Research Institute of Beauty & Culture nous éclaire sur les rituels du maquillage des Japonaises de l’époque Edo. Fard blanc, rouge à lèvres, dents noircies ou encore sourcils rasés signifient souvent bien plus qu’une simple mise en valeur esthétique de ses atours. Elle nous explique en quoi le maquillage était souvent le reflet d’une position sociale ou d’un statut marital.

 

8/2022

KIMONO  I  COIFFURES & ORNEMENTS

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La coiffure a évolué parallèlement au vêtement et sa diversification a entraîné l’essor des ornements de cheveux, les seuls bijoux qui décoraient et mettaient en valeur la chevelure de jais des élégantes : peignes kushi,  piques kôgai,  épingles kanzashi. En outre, elle variait selon l’âge et le statut social des femmes, sans oublier les femmes artistes geisha, les femmes galantes asobi-bito et les courtisanes yûjo.

COIFFURES

Pendant la période Heian (794-1185), la chevelure était une obsession même dans les conversations des dames. Les aristocrates laissaient pendre leurs cheveux lisses, brillants, séparés en deux par une raie, immensément longs, sauf les mèches latérales coupées à une longueur de 30 cm, coiffure dénommée taregami.

Japan's Love-Hate Relationship With Cats | Arts & Culture| Smithsonian Magazine

Haru no kuni
koi no mikuni no

asaborake
shiruki wa kami ka
baika no abura ?
En ces deux pays
du printemps et de l’amour

pour moi l’aurore…
Preuve n’en est-ce dans mes cheveux
le baume aux fleurs de prunier ?

Dans son Journal, Murasaki Shikibu, lorsqu’elle aborde les cérémonies du Jour de l’An (1008), fait le portrait de onze dames éminentes de la Cour (la taille, le maintien du corps, le kimono et ses couleurs, la forme du visage et le maquillage, les cheveux et ses ornements, l’esprit….).

La dame Dainagon est très petite, raffinée, blanche, belle et ronde, quiconque très hautaine de maintien. Ses cheveux sont trois pouces plus longs qu’elle. Elle se sert d’épingles à cheveux délicieusement sculptées. Son visage est exquis, ses manières raffinées et charmantes.

Les cheveux de cette beauté avait donc 10 cm de plus que sa taille ! Mais la longueur la plus impressionnante (1,80 m) relatée par Murasaki dans Le Dit du Genji I Genji Monogatari est celle de la Princesse Ochiba. A l’époque, un homme pouvait tomber amoureux d’une femme grâce à sa chevelure rien qu’en l’apercevant de dos, aussi parce que les femmes dissimulaient leurs visages derrière les manches de kimono, les éventails, les paravents, les rideaux…

Kurogami no
midare no shirazu
uhi fuseba
maza kakiyarishi
hito zo koishiki
Lorsque je pleurais
indifférente au désordre
de mes noirs cheveux
celui qui les démêlait
Ah combien je l’ai aimé

Yosano Akiko

Lors des cérémonies, les femmes attachaient leurs cheveux avec des rubans.

Pour le repas de Madame, huit femmes, vêtues de pareille couleur, les cheveux reliés, noués d’un cordon blanc, se suivent portant les plateaux d’argent blanc. Miya no Naïshi qui ce soir assure le service, en impose toujours par sa beauté grave et nette, mais ses mèches qui retombent, par le contracte avec les cordons blancs, la rendent plus aimable que jamais et son profil a demi caché par l’éventail possède un charme singulier. extrait Journal, Murasaki Shikibu

Murasaki ni
ogusa ga ue e

kage ochimu
no no harukaze nii
kami kezuru asa

Comme violacée,
sur les petites herbes

tombe mon ombre ;
au vent de printemps des champs,
matin lissant mes cheveux…
Yosano Akiko

Si une femme décidait de se couper les cheveux avant une reconversion religieuse rakushoku pour se retirer du monde, les assistants pleuraient durant la cérémonie car ils savaient que les cheveux ne regagneraient jamais leur longueur.

J’ai coupé ma chevelure
Et teint
De noir mon vêtement
Mais ce qui demeure inchangé
C’est mon cœur.
poème extrait de
Femmes galantes, femmes artistes dans le Japon ancien XIe-XIIIe siècle
par Jacqueline Pigeot

III. Choses qui doivent être courtes
Les cheveux d’une femme de basse condition. il est bon qu’ils soient gracieusement coupés court. extrait Notes de Chevet Makura no soshi, Sei Shônagon

A l’époque AzuchiMomoyama (1573-1603), la Cour imposait aux femmes le port de chignons à la mode chinoise des Tang, à savoir double ou simple sur le haut de la tête. Les chignons des jeunes femmes étaient plus complexes que ceux des femmes mariées, tout comme les manches des kimono et le nœud de l’obi (plus de détails dans mon article Kinomo I Éternelle fascination)

C’est durant Edo (1603-1868) que la coiffure japonaise Nihon-gami est née ainsi que ses techniques. Elle comprenait quatre parties dont la forme a évolué en fonction des modes :

  • les « cheveux du devant » maegami
  • les « cheveux des tempes » bin
  • les « cheveux de derrière » jusqu’à la nuque tabo ou tsuto
  • cheveux enroulés en chignon mage

Les quatre types de chignons de base qui traversent toute la période Edo – hyôgo-mage, shimada-mage, katsuyama-mage et kôgai-magé répondaient à des règles fixes en fonction notamment de la classe et du rang social, de l’âge, du statut matrimonial ou encore de la région géographique. extrait Secrets de beauté, Maquillage et coiffures de l’époque Edo dans les estampes japonaises, Catalogue Exposition Maison de la culture du Japon à Paris

©Vintag.es

Le style caractéristique du coiffage des tempes on le retrouve dans l’immortelle estampe intitulée Trois beautés de notre temps Kansei san bijin de Kitagawa Utamaro.

@Utamaro (1793) Three Beauties of the Present Day (Tôji san bijin): Tomimoto Toyohina, Naniwaya Kita, Takashima Hisa

Avec la prospérité croissante de la classe marchande, leurs coiffures s’alourdissent de façon à mettre en valeur la finesse de la nuque, tenue pour un gage de la beauté du corps nouvellement prisée. Sous l’influence des geisha, des chignons de plus en plus complexes sont imaginés : les cheveux épaissis à l’huile de camélia, divisés en quatre ou cinq mèches, sont enroulés en coques ou en veloutes sur le sommet de la tête, sur la tempe ou sur la nuque, et fixés à l’aide de cordons*, de peignes et d’épinglés décoratives. extrait Dictionnaire de la civilisation japonaise, Augustin Berque, Hazan

*cordons, cordelettes de papier motoyui, ou de fils de chanvre asaito ou fils tressé de kumihimo

ORNEMENTS

Dès la période Jomon (vers 8000 av J-C – vers 300 av J-C) apparaissent les épingles à cheveux en os et les peignes étroits avec des dents longues tate-kushi en os, corne ou bambou durci à la laque, certains ornés d’animaux fantastiques chargés de pouvoirs magiques.

Le tate-kushi qui à la base maintenait la coiffure, s’est vu modifier la longueur et ses dents plus courtes pour remplir le rôle de peigne yoko-gushi (le peigne à double endenture tôgushi, peigne à queue kesuji-tate, peigne à dents larges tokigishi..)

@ Rob Michiels Action A collection of 42 Japanese ivory and lacquer Kushi combs and 18 Kougai hair pins, Meiji, 19th C.

A l’époque Heian (794-1185), les cheveux dénoués ont annihilé la fonction ornementale des épingles et des peignes.

Cent belles femmes et sites célèbres d’Edo : Devant le sanctuaire Shibashinmei, Utagawa Toyokuni III, 1858 © POLA Research Institute of Beauty and Culture

Enjiiro wa
tare ni kataramu
chi no yuragi
haru no omoi no
sakari no inochi
Enfant de vingt ans
dont ruissellent sous le peigne
les longs cheveux noirs…
Tant de beauté il y a
dans le printemps de l’orgueil !
Yosano Akiko

C’est au milieu de l’époque Edo (1603-1868) que peignes et épingles à cheveux se multiplient et se diversifient. La bourgeoisie acquiert alors la suprématie économique et supplante la classe des guerriers : elle promet une nouvelle culture et de nouvelles modes qui lui sont propres. extrait Dictionnaire de la civilisation japonaise, Augustin Berque, Hazan

Les accessoires kushi peigne, kôgai pique, kanzashi épingle, kamikazari ornement… sont constitués de divers matériaux (écaille de tortue, bois, bambou, nacre, ivoire, agate, verre, or, argent, corne de sabot de cheval ou de bœuf, os de cou de grue pour les extravagants) et utilisent plusieurs techniques (la peinture laquée d’or ou d’argent maki-e, l’incrustation de nacre ou de verre, de cristal, de corail).

@ Trocadero, Rare Japanese Edo Period Silver Gilt Hair Pin

On sait que le peigne n’était pas seulement un accessoire de mode pour la Japonaise, mais aussi une marque de distinction, de dignité ou de rang. C’est ainsi qu’une courtisane réputée porte un grand nombre de peignes magnifiquement ornementés, qui « rivalisent » de splendeur avec sa coiffure. Ses cheveux bleu-noir et l’ivoire blanc (ou la nacre luisante) font naître, avec des bijoux de toutes couleurs, des contrastes intenses. Les peignes étaient souvent assortis au kimono ou au fard très clair du visage, ce qui permettait de créer, là aussi, contrastes ou harmonies suivant la mode de l’époque . Si le peigne répondait à des soucis d’ordre esthétique, et s’il reflétait tel ou tel statut social, il obéissait aussi à une symbolique des saisons. extrait Japonisme, Wichemann Siegfried, Edité par Chêne/Hachette

Les motifs décoratifs raffinés du peigne nous font pénétrer dans un monde miniature, celui de la flore, de la faune, de la littérature,…Plusieurs artistes ont représenté des ornements de manière magistrale dans leurs œuvres : Kiyomitsu, Harunobu, Masanobu, Utamaro, Tokyni, Kunisada, KuniyoshiSous l’influence de l’occident, dès l’ère Showa (1926-1989) le port du kimono disparaît de la vie quotidienne et par conséquent la coiffure japonaise et ses ornements aussi. Seules les geisha, les jeunes filles pour le Nouvel An et les mariées utilisent encore ces sublimes bijoux.

Peigne (kushi) « Iris », Japon, fin XIXe siècle Ivoire, nacre et écaille. Musée des Arts Décoratifs © MAD, Paris / Jean Tholance
Rounded comb lacquered with sparrows and bamboo decor – Japan – XIX century Source ©Musée Guimet, Paris
Comb dragonflies decor – Japan – XIX century ©Musée Guimet, Paris

Tamakura ni
bin no hitisuji

kireshi ne wo
ogoto to kikishi
haru no yo no yume
Le bras en oreiller,
un de mes cheveux rompit.

Ce son me parut
être celui d’un koto ;
rêve de nuit de printemps
Yosano Akiko
[su_row]

Uba-tama no
xwaga kuro-kami ya
kawaruran
kagami no kage ni
fureru shira-yuki
A des baies noires jusqu’ici
pareils mes cheveux auraient-ils
changé de couleur ?
Voici qu’au reflet du miroir
est tombée la neige blanche

Ki no Tsurayuki _ Anthologie Kokin Shü
Livre 10 poème 460

COIFFURES DES GEISHA

Les geisha ainsi que les femmes galantes yûjo et les danseuses de kabuki nouent depuis toujours leurs cheveux.

© Japa-mania.fr  / geisha coiffure shimada-mage / maiko coiffure momoware

Pour dormir sans écraser sa coiffure, l’élégante devait dormir sur un oreiller haut de bois rembourré parfois de paille, dénommé takamakura. Un supplice !

Fine Japanese Lacquer Takamakura Geisha Pillow, First Half of the 20th Century

De nos jours, certaines geisha portent des perruques.
Elle sont faites de cheveux humains fixés sur une carcasse métallique. La chevelure est partagée en mèches, enduite d’huile de graines de camélia et lissée avec des spatules chaudes. Le perruquier est capable de reconstruire entièrement une perruque en vingt minutes, en fixant chaque mèches de cheveux à l’aide d’invisibles bandelettes de papier. Quand tout est terminé, il plante solidement un peigne en écaille et une épingle de corail dans les épais rouleaux de cheveux. extrait Geisha Liza C. Dalby
Ichiban Japan I Documentaire : Une journée dans une maison de Geisha à Kyoto[/su_quote]

 

SECRETS DE BEAUTE DURANT EDO

Michiyo Watanabe du POLA Research Institute of Beauty & Culture nous éclaire sur les coiffures des Japonaises de l’époque Edo. Elle nous raconte l’histoire extraordinaire de ces chignons du plus simple au plus sophistiqué. Ornementée d’accessoires et d’extensions choisis – parfois extrêmement lourds et peu pratiques – la coiffure des femmes était, tout comme le maquillage, une source de renseignements précieuse sur leur statut social ou marital. source MCJP

7/2022

NETSUKE & SAGEMONO  I  ACCESSOIRES DU KIMONO

°°°

© Rijksmuseum & Europeana

Le kimono, contrairement au vêtement occidental yôfuku, n’est pas doté de poches. Par ailleurs, le port du sac a été emprunté à la mode occidentale qu’à l’ère Meiji (1868-1912) lorsque le Japon s’ouvrit au monde après plus de deux siècles d’isolement (Sakoku 1633-1854).

Mais avant cela, comment les femmes transportaient donc leurs effets personnels ?

© Bouddha Museum, Netsuke Geisha par Hoyuki

Au début, elles glissaient les objets dans les manches du kimono et sous la ceinture obi  puis, à l’époque Muromachi (1336-1573), des accessoires ingénieux et sublimes virent le jour : le nestuske et les sagemono.

NETSUKE

Netsuke est un minuscule  objet utilitaire (entre 3 et 8 cm) indispensable au kimono qui retient dans l’obi, avec l’aide d’un bouton coulissant ojime, le cordonnet qui attachent les sagemono « choses qui pendent » (découvrez Kyoto Seishu Netsuke Art Museum !).

Les netsuke, quant à eux, étaient de véritables chefs d’œuvre de sculpture miniature, d’os, de bois précieux, de pierre ou de laque, qui représentaient des sujets divers traités le plus souvent avec humour : des dieux et des déesses de la mythologie japonaise, des personnages célèbres ou encore des animaux, avec une préférence pour ceux du signe du zodiaque. Exécuté le plus souvent sur commande, chaque netsuke était une pièce unique. extrait Kimono d’art et de désir, Aude Fieschi, Editions Picquier

© Rijksmuseum & Europeana
© Rijksmuseum & Europeana
© Plazzart
© Ivory and art

Le port du netsuke s’est répandu à l’époque Edo. Plus de 3000 artistes ont été répertoriés ! Leurs créations matérialisaient l’imaginaire des Japonais et exigeaient un sens raffiné de la beauté et une technique artisanale d’une grande méticulosité.

L’aspect le plus frappant des arts nombreux de la période d’Edo est l’intérêt méticuleux avec lequel les Japonais scrutèrent tous les aspects de la nature à la recherche des sujets. Il semble qu’aucun objet, animé ou inanimé, n’ait été trop banal pour devenir le thème d’un minuscule chef d’œuvre. Le goût inné et les normes élevées des artisans pendant ces siècles n’ont jamais été égalés dans aucun autre pays. extrait L’art dans le monde – Japon, Peter C Swann, Edition Albin Michel

© Bristol Museum, Kikugawa school (1840-1860)
© Beaussant Lefèvre

Depuis Meiji, les netsuke et les estampes sont très prisés par les collectionneurs occidentaux qui savent reconnaître leur valeur artistique.

Les katabori-netsuke sont les plus recherchés car ce sont souvent des magnifiques œuvres d’art miniature, représentant soit des masques (de Nô ou de Gigaku) ; des animaux, des personnages de légende, parfois des végétaux, des fleurs, ou des fruits, des poissons et crustacés par exemple. L’imagination des sculpteurs de netsuke (qui étaient parfois aussi des des peintres ou des graveurs sur métal) ne connut pas de bornes. extrait Le Japon, Dictionnaire et civilisation, Louis Frédéric

© Kyoto Seishu Netsuke Art Museum

SAGEMONO

Les sagemono impressionnent par leurs décorations d’un raffinement extrême. Preuves en images !

les bourses kinchaku littéralement « attaché à la ceinture »

© Fine Japanese Kinchaku Purse With Kagamibuta Netsuke, 1900