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2/2022

SUSHI  i   SYMBOLE DE L’IDENTITÉ NATIONALE

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LES « 5 PRINCIPES » DU WASHOKU

Le Japon est renommé pour sa gastronomie mais Il ne faut pas sous-estimer sa cuisine populaire, la diversité de ses spécialités régionales kyoudoryouri En Occident, on a tendance à réduire l’art culinaire nippon aux sushi, sashimi et ramen en raison de la surabondance de ce type d’établissements (seuls 10% sont tenus par des Japonais).

Après une brève présentation de la cuisine japonaise, nous allons découvrir à travers l’histoire comment le sushi, un mets de taille « lilliputienne », est devenu le précurseur du fast-food et le symbole de l’identité nationale.

LA CUISINE JAPONAISE… en BREF

Le shinto, le bouddhisme et le confucianisme ont marqué autant l’histoire culturelle du Japon que sa cuisine qui est fort variée malgré qu’elle soit basée sur trois ingrédients majeurs : le riz gohan, les pâtes (soba, udon, ramen…) et le poisson sakana.

La cuisine japonaise a l’image d’une cuisine saine, à la présentation dépouillée associant une multiplicité de plats et de saveurs, où, comme par une calligraphie, le vide de l’assiette a autant d’importance que la préparation qu’il met en valeur. Cet effet est accentué par un goût ancien pour les produits simples et bruts, l’importance du cru ou du très peu cuit et des produits de saison. Au XIIIe siècle, le moine Dôgen signalait déjà dans les Instructions au cuisinier zen : « Quand vous faites de la cuisine, ne regardez pas les choses ordinaires d’un regard ordinaire, avec des sentiments et des pensées ordinaires. (…) Quand vous avez affaire à une matière grossière, ne la traitez pas sans égards, faites preuves avec elle d’autant de diligence et d’attention que si vous étiez en présence d’un objet précieux. » Esthétiques du quotidien au Japon, Jean-Marie Bouissou, IFM / REGARD

PRÉSENTATION DU SUSHI

Le sushi est un plat typiquement japonais consistant en petits rouleaux de riz entourés d’algues nori et surmontés de poissons ou crustacés. Les restaurants spécialisés en sushi on les appelle sushi-ya.

Un sushi parfaitement préparé doit être ferme à l’extérieur pour éviter de se défaire et aéré à l’intérieur pour fondre dans la bouche avec le poisson.

Japanese Traditional Cuisine: Sushi | LIVE JAPAN travel guide
Chaque région a sa spécialité mais voici les plus connues :

maki-zushi : entourés d’une fille de nori
chirashi-zushi : riz mélangé avec des légumes et de l’omelette
tamagoyaki : omelette roulée posée sur du riz vinaigré
nigiri-zushi : pressés à la main avec des prunes salées umeboshi ou pâte de radis wasabi

On trempe le sushi dans la sauce shoyu (sauce soja fermentée contenant de l’eau, du sel, du soja et du blé) pour compléter ses saveurs et non pas pour les submerger ! On peut rajouter pour relever une pointe de wasabi (raifort japonais). Puis, entre chaque sushi de saveur différente, on prend une tranche de gari ou shoga(gingembre marinée dans du vinaigre)  pour enlever le goût du précédent.

HISTOIRE ET ÉVOLUTION DU SUSHI

L’archéologue Naomichi Ishige confirme que l’ancêtre du sushi est apparu au IVe siècle dans les régions montagneuses de l’Asie du Sud-est, près du bassin du Mékong. Le sushi était à la base un moyen de conservation des poissons d’eau douce. On entourait la chair de riz fermenté et seul le poisson était consommé.

Une fois arrivé au Japon, il a été modifié autant au niveau de la forme que du goût.

Premier né,  le narezushi composé de poisson fermenté avec du sel et du riz auquel le chef Hanaya Yohei d’Edo (ancienne Tokyo) a eu l’idée de rajouter du vinaigre  pour réduire le temps de la fermentation en créant ainsi le nigiri sushi.  Il les vendait fraîchement préparés d’abord en marchant, dans une boîte portée sur le dos, puis dans une échoppe dans la rue yatai et enfin, il a ouvert un restaurant sushi-ya dans le quartier Ryogoku où,  encore de nos jours, une stèle commémore le « berceau des sushi Yohei ».

Sushi - Edomae style | GoWithGuide

A la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle dans la capitale Edo c’est une cuisine de rue, d’échoppes, les gens mangent dehors et le sushi va naître à ce moment-là comme tout ce qui est connu aujourd’hui, ce qui a participé à la mondialisation de la cuisine japonaise. Dans ces petites échoppes on mange vite, c’est très japonais de manger vite et bien. La gastronomie se conduit avec la vitesse c’est assez étonnant. Les échoppes au cours du XXe siècle sont rentrées à l’intérieur du bâtiment. Les plus grands restaurants de sushis sont très petits, parfois juste un comptoir de huit ou dix places. Nicolas Baumert, extrait émission France Culture

La technique hakozushi utilisée à l'époque de Kitagawa Morisada n'a guère évolué depuis. La garniture est posée sur du riz vinaigré, un couvercle est posé dessus, puis le tout est pressé à la main ou à l’aide d’un poids. Illustration extraite du Morisada mankô (« Encyclopédie de Morisada »), reproduite avec l'aimable autorisation de la Bibliothèque nationale de la Diète.
Edo, la nouvelle capitale a fait du sushi, et plus particulièrement du edo-mae*, une spécialité pour se démarquer de l’ancienne, Kyoto,  où on préparait encore des sushi à la technique hako-zushi.

La garniture est posée sur du riz vinaigré, un couvercle est posé dessus, puis le tout est pressé à la main ou à l’aide d’un poids. Illustration extraite du Morisada mankô Encyclopédie de Morisada », image avec l’aimable autorisation de la Bibliothèque nationale de la Diète). source Quand les sushis étaient des mets de restauration rapide au XIXe siècle à Edo _ nippon.com

*Ce riz vinaigré servi avec une tranche de poisson frais dessus marque le commencement des sushi tels que nous les connaissons aujourd’hui. Comme il n’existait pas encore de moyen de garder la nourriture au frais à l’époque d’Edo, les chefs spécialisés dans les sushis trempaient le poisson dans le vinaigre, la sauce de soja ou d’autres assaisonnements afin de conserver sa fraîcheur et son goût. Ces chefs ont également inventé des moyens de supprimer l’odeur désagréable du poisson à l’aide de condiments tels que le wasabi ou le gingembre. Niponica n°28

Dans le magazine Tempura N°8 hiver 2021, Ryoko Sekiguchi écrit dans son article « Le goût des autres, l’identité culinaire en question » :

Sushi aux poissons crus, sushi au poissons cuits
Le sushi tel que l’on connaît à l’étranger est né à Edo, l’actuelle Tokyo. La baie, face à laquelle la ville est implantée, apportait aux résidents de la capitale les nombreux délices de la mer. En revanche, Kyoto étant située loin de la côte, il s’y est plutôt développé les techniques dites d’oshizushi ou hakozushi, soit « sushi pressé » ou « sushi mis en boîte », avec des poissons marinés au vinaigre ou cuits, ou du narezushi, des poissons conservés par fermentation lactique du riz.
Aujourd’hui encore, les sushis servis dans les restaurants du Kansai sont des hakozushi, avec des poissons souvent cuits à la vapeur, des champignons shiitake et de l’omlette coupée comme ingrédients. Le Kansai possède une autre spécialité, les mushizushi ou nukuzushi, les « sushis chauds ». Ces chirashi à la vapeur se dégustent en hiver dans les restaurants de la région de l’Ouest.

kaiten-zushi ou sushi-YA ?
kaiten-zushi littéralement « sushi tournant » : un tapis roulant apporte les assiettes de sushi directement à votre place, type fast-food et self-service. Les prix : de 100 yens à 2000 yens

On doit son invention à un restaurateur futé d’Osaka, Yoshiaki Shiraishi (1913-2001), qui obtint un brevet pour le concept et dirigea ainsi la seule franchise de kaiten au Japon jusqu’en 1978, Genroku Sushi. C’est en présentant son audacieux « sushi qui tourne » à l’Expo 70 qu’il le fit connaître partout au Japon, ouvrant même une enseigne à New York en 1974. Son idée rendit le mets accessible à toutes les bourses, et transforma le kaiten en symbole d’un Japon inventif et gourmand. extrait Tempura magazine Manger le Japon – Hors série 2022

sushi-ya : le chef et ses éventuels assistants préparent les sushi au comptoir devant vous. Les prix : de 2 000 yens à 30 000 yens.
Insolite !
Un restaurant à Kyoto où on prépare soi-même les sushi

Comme sur une palette de peinture, c’est sur une grande ardoise que le poisson, les légumes, le riz et les assaisonnements sont répartis chez AWOMB. Les convives sont invités à composer, à partir de ces assiettes colorées, leurs propres sushi dits temakizushi, des sushi « roulés à la main ». source Pen magazine

Une envie subite de sushi ?

Si cet article a réveillé vos papilles, avant de trouver un bon et authentique sushi-ya, il serait judicieux d’apprendre la manière correcte de manger les divers sushi selon la leçon donnée par le célèbre chef étoilé Sukiyabashi Jiro de Tokyo.

A vos baguettes !

Itadakimasu 頂きます !