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1/2021

LE NOUVEL AN  I  Oshôgatsu ou ganjitsu

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© BNF Estampe
© BNF Estampe

Fin 2013, lors de mon 3ème voyage, j’ai eu la chance et le bonheur de fêter le Nouvel An chez mon amie Keiko. Cela m’a permis d’observer et de participer à cette célébration importante autant sur le plan familiale que religieux. Un événement majeur pour tous les Japonais qui se réunissent en famille et se rendent dans les temples et les sanctuaires.

Les rites du Nouvel An, qui s’échelonnent sur plus d’un mois, se caractérisent par l’accueil des ancêtres, puis par celui du dieu de la nouvelle année, auquel on demande d’assurer la continuité du temps et l’abondance de l’année à venir. Dictionnaire de la civilisation japonaise Hazan

Avant 1873, on se basait sur le calendrier chinois et le Nouvel An était fêté au début du printemps. Par la suite, on a adopté le calendrier grégorien.

Le 31 décembre, ōmisoka_le réveillon

Fin décembre, pour bien accueillir la nouvelle année, on fait un double ménage intérieur : de son habitation ōsōji puis de son corps et son esprit shinshin. D’autre part, on est censé acquitter les dettes et conclure les affaires en cours.

La veille du Nouvel An, on se rend dans les temples bouddhistes otera et les sanctuaires shintô jinja pour prier hatsumode*,  les prédictions omikuji** puis, un peu avant minuit, pour écouter les 108 coups joya no kane frappés sur la cloche bonshō afin de chasser ses 108 passions ou souillures.

Comment prier hatsumode*  ?
Jeter une pièce dans la boîte en bois _Sonner la cloche 1 fois_Incliner la tête 2 fois en guise de remerciement_Taper 2 fois dans les mains_Incliner la tête encore uns fois

omikuji** « loterie sacrée » des divinations écrites sur des bandes de papier que l’on tire au sort.  Si la prédiction est mauvaise, la bande de papier est pliée et attachée à un arbre, un pin matsu en général, ou sur des supports spécifiques, afin de conjurer le mauvais sort.

Le 1er janvier

…on finit aux aurores en admirant le lever de soleil, symbole du bonheur car dans le culte shintô, la divinité du Nouvel An arrive avec le premier rayon de l’astre solaire. Amaterasu est, dans le shintoïsme, la déesse du Soleil, et tous les empereurs japonais sont ses descendants.

Les décorations de Nouvel An

Certains ont adopté le sapin, mais tous restent fidèles aux décorations traditionnelles dont le rôle est de souhaiter la bienvenue aux dieux en début d’année. D’ailleurs, les courts piédestaux sur lesquels on les présentent, ressemblent aux autels utilisés pour les offrandes aux divinités.

Shimekazari : déposée à l’entrée de la maison et composé d’éventail pliable Sensu, orange amère Daidai, crevette Ebi, fougère Uragiro, algue Kombu (il existe plusieurs formes et styles)
Kagamimochi : placée dans le tokonoma ou ailleurs, conçue avec orange amère Daidai, gâteau de riz Kagami mochi, fougères Uragiro et papier de riz Hanshi format 26/35 cm. Le 10 janvier, les mochis sont retirés, partagés et cuisinés dans une soupe traditionnelle de haricots rouge azuki.
Kadomatsu : déposée de part et d’autres de la porte d’entrée, constituée de pin et de bambou.

TRADITIONs CULINAIREs
  • ToSHI-KOSHI SOBA

Le soir du réveillon omisoka, on mange des nouilles au sarrasin toshi-koshi-soba, littéralement “soba pour passer l’année”.

  • Osechi ryôri

Ce sont des plats traditionnels du Nouvel An nés durant l’ère Heian (794-1185) qui, à mes yeux, incarnent le summum du raffinement culinaire. La présentation visuelle est tout aussi importante que la finesse du goût. Dans lÉloge de l’ombre Tanisaki Junichiro écrivait que la cuisine japonaise n’est pas chose qui se mange, mais chose qui se regarde, et mieux encore qui se médite.

Il semble que le mot o-sechi dérive de sechiku, qui désigne des mets préparés pour les dieux. Autrefois, l’on préparait le sechiku plusieurs fois durant l’année, qu’il s’agisse de marquer un changement de saison, de prier pour une bonne récolte, de souhaiter le succès pour ses descendants ou la sécurité du foyer. extrait magazine Niponica n°14

J’ai été émerveillée par la délicatesse et les saveurs des mets ainsi que leur « mise en scène » dans des sublimes boîtes laquées jūbako, luxueuses en comparaison avec les bento qu’on utilise quotidiennement.
Pour déguster, on utilise les baguettes festives aux extrémités pointues iwaibashi qu’on dépose sur hashi-oki repose-baguettes. Leur usage remonte au début de l’ère Heian (794-1192), lorsqu’un repose-baguettes de terre cuite en forme « d’oreille » fut placé au centre d’un plateau d’offrande de nourriture aux dieux. La manière correcte de faire reposer les baguettes est de laisser dépasser les pointes d’environ 3 cm pour que l’extrémité qui va dans la bouche ne touche pas hashi-oki !

De plus, chaque mets exprime, par son nom, un souhait de bonne santé et de prospérité.

daidai : orange amère, signifie « de génération en génération » quand il est écrit en kanji
datemaki : omelette roulée fourrée d’œufs et de poisson émincé. Le mot date évoque l’élégance, voire l’ostentation, et c’est un mets qui certainement attire l’œil. Autrefois, les documents importants étaient rangés comme rouleaux. Aussi, cette roulade comporte-t-elle une autre connotation : l’espoir du succès dans les études ou l’entraînement ;
kamaboko : un gâteau de poisson grillé composé de tranches blanches et rouges dont la couleur rappelle le drapeau national ;
kohaku-namasu : « légume rouge et blanc » kuai, composé de radis daikon et de carottes coupés en fines tranches, conservés dans du vinaigre au yuzu agrume ressemblant au citron ;
kazunoko : kazu « nombre » ko « enfant », œufs de hareng qui symbolisent le désir d’avoir un enfant pendant la nouvelle année ;
kuro-mame : des fèves de soja noir bouillies dans le sucre et de la sauce soja. Kuro signifie «noir» et mame «fève», mais mame peut aussi signifier «dur travail», «diligence», et ce mets invite donc le convive à travailler dur et avec enthousiasme durant l’année à venir ;
konbu : une algue, associée au mot yorokobu, signifiant « joie » ;
nishiki tamag: roulade d’œuf, le blanc et le jaune sont séparés avant cuisson, le blanc symbolise l’argent et le jaune l’or ;
tai : brème, associé au mot japonais « medetai », il symbolise une opportunité ;
tazukuri : des jeunes anchois séchés sont frits puis recouverts d’un glaçage sucré à base de sucre, vin doux mirin et sauce de soja mitonnés ensemble. L’on employait autrefois les anchois en guise de fertilisant en agriculture, et c’est pourquoi, dans le o-sechi, ils ont une connotation agraire, pour souhaiter d’abondantes.

  • Zôni

La tradition interdisait l’utilisation de l’âtre pour cuisiner durant les trois premiers jours de la nouvelle année, à l’exception du zōni, le premier bouillon de l’année qui symbolise la force divine de l’esprit du riz. Il est composé de légumes et de mochi pâte de riz gluant cuit à la vapeur, mais il diffère d’une région à l’autre : dans le Kanto, il est clair et dans le Kansai on préfère le miso.

La recette la plus populaire consiste en une soupe claire nommée sumashi, dont le bouillon est fait à partir de katsuobushi (flocons de bonite séchée), de varech, et d’autres ingrédients encore, le tout constituant la base que l’on assaisonne de sauce soja et de sel. Il y a ensuite la soupe miso awase, dans laquelle différents types de miso (pâte de soja fermenté) sont utilisés pour apporter du goût. Vient enfin la soupe shiro miso qui utilise du miso blanc. Mis à part le mochi, on compte parmi les ingrédients épinards, carottes ainsi que du yuzu et du persil pour leur arôme. Là aussi, des variantes existent selon la région. Ces dernières reflètent fortement le caractère des différents territoires, et sont servies généralement dans des shikki alignés sur la table, qui présentent eux aussi des caractéristiques propres à chaque région. extrait Magazine Niponica n°25 Photos Yoshizawa Naho/Aflo

 

  • Nanakusagayo

Le 7 janvier on déguste au petit-déjeuner une soupe de riz aux sept herbes du printemps afin de s’assurer une bonne santé pour toute l’année à venir.

  • Toso

Pour nous protéger des maladies, il faut boire du toso (sake vin de riz macéré avec des herbes). Mes amis m’ont servi aussi du sake* avec poudre d’or !!

 

sake* est une boisson alcoolisée (de 10 à 17~18°) japonaise obtenue à partir de la fermentation du riz. Au Japon, il est aussi appelé nihonshu, que l’on traduit par alcool japonais, à ne pas confondre avec les alcools de riz plus forts comme les shochus ou les liqueurs de riz de Chine.

 

 

AUTRES TRADITIONS
  • nengajô

Envoyer des cartes de vœux pour la nouvelle année nengajô est une tradition qui se perpétue depuis l’ère Heian (794-1185). Un jour, la poste japonaise Japan Post a eu l’idée de proposer des cartes pré-timbrées otoshidama tsuki nenga hagaki portant un numéro pour une grande loterie nationale du Nouvel An. Pour le gagnant l’année commence bien !

  • OTOSHIDAMA

A la base, c’est une tradition qui consiste à échanger les cadeaux mais de nos jours la famille fait plutôt un don d’argent aux enfants.

  • KAKIZOME

Il s’agit de la première calligraphie de l’année. Le 2 janvier on écrit ses résolutions pour attirer la chance.