KIMONO & ART DU maquillage traditionnel
Artifice ou célébration de la beauté ?
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Le maquillage traditionnel, contrairement à la coiffure et au vêtement, a évolué légèrement entre l’Antiquité et le XIXe siècle. En dissimulant ses traits, la femme était devenue une abstraction qui ne prenait de sens que dans la rigidité des codes sociaux propres à chaque époque.
Depuis le 6 janvier 1869, date du décret impérial qui a interdit le fard d’un autre âge, seuls les geisha, les maiko et les acteurs de kabuki maintiennent cet art vivant.
Mon article dévoile les secrets de maquillage à travers sa palette de base – blanc, noir et rouge – ainsi que les soins du visage et, pour finir, quelques accessoires remarquables par leur raffinement.
BLANC
« Un visage blanc cache beaucoup de défauts » – proverbe
[いろのしろいのはしちなんかくす, iro no shiro no wa shichinan kakusu] « Iro no shiro » désigne la blancheur d’un visage de femme, 七難 – しちなん- shichinan ; désigne les 7 infortunes bouddhistes et dans son sens figuré un grand nombre de défauts. Il faut se méfier des apparences.
Pour cela, on employait une poudre blanche – keifun blanc de mercure ou o-shiroi blanc de céruse (en dépit du Saturnisme dû au plomb !) – fondue dans l’eau et appliquée avec des pinceaux sur le visage, le cou, la nuque et le décolleté qui étaient enduits auparavant de l’huile de camélia bintsuké-abura. Après Edo (1603-1868), ces poudres nocives ont été remplacées par une pâte non métallique neri-o-shiroi et la poudre kona-o-shiroi.
Les geisha mettent en valeur leur nuque en la blanchissant, mais gardent nus trois triangles de peau naturelle dénommés « trois jambes » sanbon-ashi (les apprenties maiko n’ont que deux !). Ce minime détail invite à l’érotisme en laissant imaginer les secrets d’une intimité interdite.
Aujourd’hui encore, la blancheur de la peau demeure la condition première de la beauté. En été, la japonaise cache son visage du soleil sous des chapeaux, des ombrelles,… et les bains de soleil font défaut à sa culture.
NOIR
Le noir est inhérent aux coutumes de passage de l’existence féminine, de l’enfance à l’âge adulte.
- Les sourcils
La coutume d’épiler ou de raser les sourcils existait en Chine pendant la première dynastie Han et fut importée au Japon. L’aristocrate et la femme des samuraï se rasaient les sourcils à partir de la maturité (13 ans) tandis que la femme du peuple, une fois mariée ou devenue mère, coutume dénommée hongenpuku.
On redessinait les sourcils rasés avec du noir mayuzumi obtenu par un mélange de fleurs brûlées, de poudre d’or, de suie et d’huile de sésame ou par de la pelure de châtaigne, du charbon de paulownia.
Dans l’ouvrage Kewai mayuzukuri kuden La tradition du maquillage des sourcils, Mizushima Bokuya détaille les règles pour dessiner les sourcils et les accessoires nécessaires.
- Les dents
La coutume detsushi ou kanetsuke qui consistait à se noircir les dents était usitée par les femmes et les hommes de classes supérieures jusqu’à l’ère Meiji « pour se différencier des esclaves et des animaux » (à la période de Tokugawa (1603-1867) les prostituées appelées « les mariées d’une nuit » également).
La poudre hagurome était composée de débris de fer oxydés et de noix de galle fushi, dissoute dans du thé ou du saké.
ROUGE
Le rouge beni-guchi, extrait de benibana*, plante de la famille du chrysanthème Carthamus tinctoris, servait pour rougir les lèvres, les joues et parfois pour le contour des yeux afin d’éclairer l’iris et creuser un peu l’arcade.
*Entre parenthèse, ces agents colorants de benibana servirent pour teindre les tissus, puis à partir du XVIIe dans la fabrication des encres d’imprimerie pour les estampes ukiyo-e de type benizuri-e et beni-e.
LES SOINS
A l’époque Edo 1813 est paru un ouvrage sur l’esthétique intitulé Le Guide de la beauté dans la capitale Miyako fûzoku keshôden de Sayama Hanshichimaru et illustrations de Hayami Shungyôsai.
- Le visage
Les femmes utilisaient des sachets de tissus nuka-bukuro remplis de son de riz hydratant nuka, de plantes médicinales ou aromatiques, de poudre de haricots rouge azuki nettoyante araiko qui contenait de la saponine. Elles plongeaient les sachets dans l’eau chaude puis les essoraient avant de frotter leurs visages.
- Les dents
On utilisait une brosse à dents fusayôji en bois de saule, de cèdre ou de bambou sur laquelle on mettait du sel ou une poudre abrasive rouge mêlée à des parfums.
Source : catalogue de l’exposition Secrets de beauté, Maquillage et coiffures de l’époque Edo dans les estampes japonaises à la Maison de la culture du Japon à Paris
ACCESSOIRES
Voici un aperçu de quelques accessoires qui ont été présentés du 19 mai au 10 juillet 2021 lors de l’exposition Secrets de beauté, Maquillage et coiffures de l’époque Edo dans les estampes japonaises à la Maison de la culture du Japon à Paris
@ Maison de la culture du Japon à Paris
SECRETS DE BEAUTE
Michiyo Watanabe du POLA Research Institute of Beauty & Culture nous éclaire sur les rituels du maquillage des Japonaises de l’époque Edo. Fard blanc, rouge à lèvres, dents noircies ou encore sourcils rasés signifient souvent bien plus qu’une simple mise en valeur esthétique de ses atours. Elle nous explique en quoi le maquillage était souvent le reflet d’une position sociale ou d’un statut marital.