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Auteur/autrice : AMCAdmin20

1/2021

LE NOUVEL AN  I  OshÎgatsu ou ganjitsu

°°°

© BNF Estampe
© BNF Estampe

Fin 2013, lors de mon 3Ăšme voyage, j’ai eu la chance et le bonheur de fĂȘter le Nouvel An chez mon amie Keiko. Cela m’a permis d’observer et de participer Ă  cette cĂ©lĂ©bration importante autant sur le plan familiale que religieux. Un Ă©vĂ©nement majeur pour tous les Japonais qui se rĂ©unissent en famille et se rendent dans les temples et les sanctuaires.

Les rites du Nouvel An, qui s’échelonnent sur plus d’un mois, se caractĂ©risent par l’accueil des ancĂȘtres, puis par celui du dieu de la nouvelle annĂ©e, auquel on demande d’assurer la continuitĂ© du temps et l’abondance de l’annĂ©e Ă  venir. Dictionnaire de la civilisation japonaise Hazan

Avant 1873, on se basait sur le calendrier chinois et le Nouvel An Ă©tait fĂȘtĂ© au dĂ©but du printemps. Par la suite, on a adoptĂ© le calendrier grĂ©gorien.

Le 31 dĂ©cembre, ƍmisoka_le rĂ©veillon

Fin dĂ©cembre, pour bien accueillir la nouvelle annĂ©e, on fait un double mĂ©nage intĂ©rieur : de son habitation ƍsƍji puis de son corps et son esprit shinshin. D’autre part, on est censĂ© acquitter les dettes et conclure les affaires en cours.

La veille du Nouvel An, on se rend dans les temples bouddhistes otera et les sanctuaires shintĂŽ jinja pour prier hatsumode*,  les prĂ©dictions omikuji** puis, un peu avant minuit, pour Ă©couter les 108 coups joya no kane frappĂ©s sur la cloche bonshƍ afin de chasser ses 108 passions ou souillures.

© Nippon.com

Comment prier hatsumode*  ?
Jeter une piĂšce dans la boĂźte en bois _Sonner la cloche 1 fois_Incliner la tĂȘte 2 fois en guise de remerciement_Taper 2 fois dans les mains_Incliner la tĂȘte encore uns fois

omikuji** « loterie sacrĂ©e » des divinations Ă©crites sur des bandes de papier que l’on tire au sort.  Si la prĂ©diction est mauvaise, la bande de papier est pliĂ©e et attachĂ©e Ă  un arbre, un pin matsu en gĂ©nĂ©ral, ou sur des supports spĂ©cifiques, afin de conjurer le mauvais sort.

Le 1er janvier

…on finit aux aurores en admirant le lever de soleil, symbole du bonheur car dans le culte shintĂŽ, la divinitĂ© du Nouvel An arrive avec le premier rayon de l’astre solaire. Amaterasu est, dans le shintoĂŻsme, la dĂ©esse du Soleil, et tous les empereurs japonais sont ses descendants.

Les décorations de Nouvel An

Certains ont adoptĂ© le sapin, mais tous restent fidĂšles aux dĂ©corations traditionnelles dont le rĂŽle est de souhaiter la bienvenue aux dieux en dĂ©but d’annĂ©e. D’ailleurs, les courts piĂ©destaux sur lesquels on les prĂ©sentent, ressemblent aux autels utilisĂ©s pour les offrandes aux divinitĂ©s.

Shimekazari : dĂ©posĂ©e Ă  l’entrĂ©e de la maison et composĂ© d’Ă©ventail pliable Sensu, orange amĂšre Daidai, crevette Ebi, fougĂšre Uragiro, algue Kombu (il existe plusieurs formes et styles)
Kagamimochi : placée dans le tokonoma ou ailleurs, conçue avec orange amÚre Daidai, gùteau de riz Kagami mochi, fougÚres Uragiro et papier de riz Hanshi format 26/35 cm. Le 10 janvier, les mochis sont retirés, partagés et cuisinés dans une soupe traditionnelle de haricots rouge azuki.
Kadomatsu : dĂ©posĂ©e de part et d’autres de la porte d’entrĂ©e, constituĂ©e de pin et de bambou.

TRADITIONs CULINAIREs
  • ToSHI-KOSHI SOBA

Le soir du rĂ©veillon omisoka, on mange des nouilles au sarrasin toshi-koshi-soba, littĂ©ralement “soba pour passer l’annĂ©e”.

  • Osechi ryĂŽri

Ce sont des plats traditionnels du Nouvel An nĂ©s durant l’ùre Heian (794-1185) qui, Ă  mes yeux, incarnent le summum du raffinement culinaire. La prĂ©sentation visuelle est tout aussi importante que la finesse du goĂ»t. Dans l’Éloge de l’ombre Tanisaki Junichiro Ă©crivait que la cuisine japonaise n’est pas chose qui se mange, mais chose qui se regarde, et mieux encore qui se mĂ©dite.

Il semble que le mot o-sechi dĂ©rive de sechiku, qui dĂ©signe des mets prĂ©parĂ©s pour les dieux. Autrefois, l’on prĂ©parait le sechiku plusieurs fois durant l’annĂ©e, qu’il s’agisse de marquer un changement de saison, de prier pour une bonne rĂ©colte, de souhaiter le succĂšs pour ses descendants ou la sĂ©curitĂ© du foyer. extrait magazine Niponica n°14

J’ai Ă©tĂ© Ă©merveillĂ©e par la dĂ©licatesse et les saveurs des mets ainsi que leur « mise en scĂšne » dans des sublimes boĂźtes laquĂ©es jĆ«bako, luxueuses en comparaison avec les bento qu’on utilise quotidiennement.
Pour dĂ©guster, on utilise les baguettes festives aux extrĂ©mitĂ©s pointues iwaibashi qu’on dĂ©pose sur hashi-oki repose-baguettes. Leur usage remonte au dĂ©but de l’ùre Heian (794-1192), lorsqu’un repose-baguettes de terre cuite en forme « d’oreille » fut placĂ© au centre d’un plateau d’offrande de nourriture aux dieux. La maniĂšre correcte de faire reposer les baguettes est de laisser dĂ©passer les pointes d’environ 3 cm pour que l’extrĂ©mitĂ© qui va dans la bouche ne touche pas hashi-oki !

De plus, chaque mets exprime, par son nom, un souhait de bonne santé et de prospérité.

daidai : orange amÚre, signifie « de génération en génération » quand il est écrit en kanji
datemaki : omelette roulĂ©e fourrĂ©e d’Ɠufs et de poisson Ă©mincĂ©. Le mot date Ă©voque l’élĂ©gance, voire l’ostentation, et c’est un mets qui certainement attire l’Ɠil. Autrefois, les documents importants Ă©taient rangĂ©s comme rouleaux. Aussi, cette roulade comporte-t-elle une autre connotation : l’espoir du succĂšs dans les Ă©tudes ou l’entraĂźnement ;
kamaboko : un gùteau de poisson grillé composé de tranches blanches et rouges dont la couleur rappelle le drapeau national ;
kohaku-namasu : « légume rouge et blanc » kuai, composé de radis daikon et de carottes coupés en fines tranches, conservés dans du vinaigre au yuzu agrume ressemblant au citron ;
kazunoko : kazu « nombre » ko « enfant », Ɠufs de hareng qui symbolisent le dĂ©sir d’avoir un enfant pendant la nouvelle annĂ©e ;
kuro-mame : des fĂšves de soja noir bouillies dans le sucre et de la sauce soja. Kuro signifie «noir» et mame «fĂšve», mais mame peut aussi signifier «dur travail», «diligence», et ce mets invite donc le convive Ă  travailler dur et avec enthousiasme durant l’annĂ©e Ă  venir ;
konbu : une algue, associée au mot yorokobu, signifiant « joie » ;
nishiki tamago : roulade d’Ɠuf, le blanc et le jaune sont sĂ©parĂ©s avant cuisson, le blanc symbolise l’argent et le jaune l’or ;
tai : brÚme, associé au mot japonais « medetai », il symbolise une opportunité ;
tazukuri : des jeunes anchois sĂ©chĂ©s sont frits puis recouverts d’un glaçage sucrĂ© Ă  base de sucre, vin doux mirin et sauce de soja mitonnĂ©s ensemble. L’on employait autrefois les anchois en guise de fertilisant en agriculture, et c’est pourquoi, dans le o-sechi, ils ont une connotation agraire, pour souhaiter d’abondantes.

  • ZĂŽni

La tradition interdisait l’utilisation de l’ñtre pour cuisiner durant les trois premiers jours de la nouvelle annĂ©e, Ă  l’exception du zƍni, le premier bouillon de l’annĂ©e qui symbolise la force divine de l’esprit du riz. Il est composĂ© de lĂ©gumes et de mochi pĂąte de riz gluant cuit Ă  la vapeur, mais il diffĂšre d’une rĂ©gion Ă  l’autre : dans le Kanto, il est clair et dans le Kansai on prĂ©fĂšre le miso.

© Niponica 25

La recette la plus populaire consiste en une soupe claire nommĂ©e sumashi, dont le bouillon est fait Ă  partir de katsuobushi (flocons de bonite sĂ©chĂ©e), de varech, et d’autres ingrĂ©dients encore, le tout constituant la base que l’on assaisonne de sauce soja et de sel. Il y a ensuite la soupe miso awase, dans laquelle diffĂ©rents types de miso (pĂąte de soja fermentĂ©) sont utilisĂ©s pour apporter du goĂ»t. Vient enfin la soupe shiro miso qui utilise du miso blanc. Mis Ă  part le mochi, on compte parmi les ingrĂ©dients Ă©pinards, carottes ainsi que du yuzu et du persil pour leur arĂŽme. LĂ  aussi, des variantes existent selon la rĂ©gion. Ces derniĂšres reflĂštent fortement le caractĂšre des diffĂ©rents territoires, et sont servies gĂ©nĂ©ralement dans des shikki alignĂ©s sur la table, qui prĂ©sentent eux aussi des caractĂ©ristiques propres Ă  chaque rĂ©gion. extrait Magazine Niponica n°25 Photos Yoshizawa Naho/Aflo

 

  • Nanakusagayo

Le 7 janvier on dĂ©guste au petit-dĂ©jeuner une soupe de riz aux sept herbes du printemps afin de s’assurer une bonne santĂ© pour toute l’annĂ©e Ă  venir.

  • Toso
© Adina

Pour nous protĂ©ger des maladies, il faut boire du toso (sake vin de riz macĂ©rĂ© avec des herbes). Mes amis m’ont servi aussi du sake* avec poudre d’or !!

 

sake* est une boisson alcoolisĂ©e (de 10 Ă  17~18°) japonaise obtenue Ă  partir de la fermentation du riz. Au Japon, il est aussi appelĂ© nihonshu, que l’on traduit par alcool japonais, Ă  ne pas confondre avec les alcools de riz plus forts comme les shochus ou les liqueurs de riz de Chine.

 

 

AUTRES TRADITIONS
  • nengajĂŽ

Envoyer des cartes de vƓux pour la nouvelle annĂ©e nengajĂŽ est une tradition qui se perpĂ©tue depuis l’ùre Heian (794-1185). Un jour, la poste japonaise Japan Post a eu l’idĂ©e de proposer des cartes prĂ©-timbrĂ©es otoshidama tsuki nenga hagaki portant un numĂ©ro pour une grande loterie nationale du Nouvel An. Pour le gagnant l’annĂ©e commence bien !

  • OTOSHIDAMA

A la base, c’est une tradition qui consiste Ă  Ă©changer les cadeaux mais de nos jours la famille fait plutĂŽt un don d’argent aux enfants.

  • KAKIZOME

Il s’agit de la premiĂšre calligraphie de l’annĂ©e. Le 2 janvier on Ă©crit ses rĂ©solutions pour attirer la chance.

Avant le dĂ©part…

Au printemps 2012, j’ai rĂ©alisĂ© mon rĂȘve le plus cher : la dĂ©couverte du Japon.Une fois ce premier pas accompli, je me suis lancĂ©e le dĂ©fit de faire le tour du pays du soleil levant auquel je voue une passion forte, profonde et intarissable.Depuis lors, j’ai effectuĂ© 5 voyages et il a fallu attendre 4 longues annĂ©es pour que le 6Ăšme voyage se concrĂ©tise au printemps 2019. Pourquoi le Japon ?
Je porte un intĂ©rĂȘt particulier Ă  la culture traditionnelle japonaise, plus qu’Ă  la modernitĂ©.« AsymĂ©trie, simplicitĂ©, sublimitĂ© austĂšre, naturel, subtile profondeur, dĂ©tachement et sĂ©rĂ©nitĂ© sont les 7 caractĂ©ristiques partagĂ©es par tous las arts traditionnels japonais. » maĂźtre zen Hosekei Shinichi HisamatsuToutefois, le jeu de forces contradictoires entre traditionalisme et modernisme aboutit Ă  des synthĂšses remarquables. La volontĂ© de conciliation entre passĂ© et prĂ©sent trouve son expression dans la perfection et la sĂ©rĂ©nitĂ© qui donnent Ă  la modernitĂ© japonaise son caractĂšre unique et personnel. Mon dernier voyage s’est dĂ©roulĂ© du 20 mai au 04 juin 2019.
Il se diffĂ©rencie des autres par son itinĂ©raire improvisĂ© et ce malgrĂ© un parcours planifiĂ© avant le dĂ©part et inspirĂ© entre autres par des films et des livres dont les paysages m’ont subjuguĂ©e.
Dans ce blog, vous découvrirez :
– l’Ăźle d’Awajishima et les oeuvres de l’architecte Tadao Ando
– l’Ăźle de Shikoku et Chiorii sauvĂ©e par Alex Kerr
– Nara
– Kanazawa
– la PĂ©ninsule de Noto
– Kyoto

Bonne lecture !

AWAJISHIMA

On parle si peu d’Awaji-shima pourtant c’est ici que commence la crĂ©ation du Japon. Elle aurait Ă©tĂ© la premiĂšre Ăźle qui a formĂ© l’archipel nippon.

Au dĂ©but du Kojiki, le plus vieux manuscrit d’histoire du Japon, on raconte que :

« Les deux Kamis Izanagi-no-mikoto et Izanami-no-mikoto ont mĂ©langĂ© une terre Ă©mergeante et chaotique avec du sel Ko’oro Ko’oro Ă  l’aide de la hallebarde « Ame no Nuboko », une goutte de sel serait tombĂ©e du bout de la hallebarde et en se cristallisant elle a donnĂ© naissance Ă  l’üle Onokoro.
C’est sur cette Ăźle que Izanagi-no-mikoto et Izanami-no-mikoto se sont mariĂ©s et ont enfantĂ© successivement toutes les Ăźles qui forment l’archipel japonais. La premiĂšre Ăźle nĂ©e de leur union est celle d’Awaji. »
source

Cette Ăźle est connue aussi pour ses forĂȘts d’arbres odorants destinĂ©s Ă  la production de l’encens.

On raconte qu’en 595, des pĂȘcheurs d’Awaji ont brĂ»lĂ© un morceau d’un bois sombre rejetĂ© par la mer. Il a dĂ©gagĂ© une senteur si Ă©blouissante qu’ils ont dĂ©cidĂ© de l’offrir Ă  la maison impĂ©riale. Le prince ShĂŽtoku qui a reçu l’offrande a aussitĂŽt reconnu le bois d’encens, parfum consacrĂ© aux cĂ©rĂ©monies bouddhiques. L’encens est la nourriture du Bouddha, on lui offre ses fumĂ©es purificatrices.

Il y a 3 sortes d’utilisation de l’encens :

« Sonaeko, encens offert Ă  Bouddha. Le kanji renvoie Ă  l’idĂ©e d’offrande. KĂ»kĂŽ, l’encens d’accueil et d’hospitalitĂ©. Le kanji renvoie Ă  l’idĂ©e de vide. GankĂŽ, l’encens utilisĂ© par plaisir. » Extrait Philosophie du KĂŽdĂŽ de Chantal Jaquet

Pour se rendre Ă  Awajishima de l’aĂ©roport de Kansai, il faut prendre le Bus Limousine direct Awajishima.

Il y a tant de choses Ă  voir sur cette Ăźle mais personnellement je l’ai choisie pour les oeuvres de l’architecte Tadao Ando. J’ai visitĂ© le temple Hompukuji et sĂ©journĂ© Ă  l’hĂŽtel Toto Seawind.

KURUMA

Je me suis arrĂȘtĂ©e d’abord Ă  Kuruma, une petite ville sans attrait mais idĂ©alement situĂ©e pour rejoindre le temple Hompukuji, Ă  20 mn de l’hĂŽtel en taxi.

Empreintes de pas

sur la plage se prolonge
Le jour printanier

SHIKI

 

toute la journée silencieux
face Ă  la mer
jusqu’à la marĂ©e haute
SANTOKA

 

Higashiura Sun Park Hana no Yu ‹2743, KURUMA, AWAJI SHI, HYOGO, 656 2311, JAPAN. | 6562311 Awaji Shi

C’est un hĂŽtel avec chambres traditionnelles japonaises, dont on tolĂšre sa vĂ©tustĂ© grĂące Ă  la gentillesse des employĂ©s, son onsen et la belle nature qui l’entoure… d’un calme bienfaiteur.

La riviĂšre et l’Ă©tang

dĂ©sormais ne font qu’un
pluie de printemps

BUSSON

 

Ă©tincellent les jeunes feuilles,

les feuilles vertes
dans la lumiĂšre du soleil

BUSSON

Seuls les chants d’oiseaux comme fond sonore, dont Uguisu (bouscarle chanteuse) mon prĂ©fĂ©rĂ©.

Le musicien Hiroshi Yoshimura l’a choisi comme interprùte dans l’album Green

En explorant la ville, sous une chaleur accablante, je suis tombée sur le café Kuruma 28.

Cafe Kuruma 28

 

Vue de ma table

 

Thé vert glacé et cake au macha et azuki

J’avais envie d’une bonne biĂšre fraĂźche mais hĂ©las on proposait que du thĂ© chaud ou du cafĂ©.

AussitĂŽt, les filles m’ont prĂ©parĂ© exprĂšs un thĂ© vert aux glaçons et pour s’excuser de ne pas avoir de biĂšre, on m’a offert un dĂ©licieux cake au matcha, azuki et crĂšme chantilly.


Le soir, j’ai dĂźnĂ© dans un izakaya traditionnel et populaire.

Temple Hompukuji

Le lendemain, j’ai pris le taxi direction temple Hompukuji qui appartient Ă  la branche Ninna-ji de la l’Ă©cole Ă©sotĂ©rique Shingon. Il est dĂ©diĂ© au bouddha Yakushi. Il est situĂ© sur une colline face Ă  la baie d’Osaka.

Le toit du Mizumido ou Temple de l’eau, un magnifique Ă©tang rempli de lotus et de nymphĂ©as, a Ă©tĂ© reconstruit par Tadao Ando en 1991.

« Pour les bouddhistes, le lotus symbolise l’accĂšs Ă  l’illumination de Shaka (en sanskrit : Sakyamuni). Le temple incarne le sohait d’Ando de crĂ©er une salle oĂč Bouddha et toutes les autres crĂ©atures vivantes pouraient venir dormir parmi les fleurs de lotus… C’est un monde oĂč les ĂȘtres humains, les animaux et la nature coĂ©xistent, toutes disticntions balayĂ©es, un espace oĂč la vie et la mort, le sacrĂ© et le profane forment un tout harmonieux. » Ando de Masao Furuyama

Les nĂ©nuphars me rappellent le Jardin des Beaux-Arts qu’il a bĂąti Ă  Kyoto oĂč les NymphĂ©as de Monet sont prĂ©sentĂ©es en milieu aquatique. J’en parle dans mon 1er blog

PĂ©tale qui tombe

bouche bée attend
le crapaud

ISSA

On reconnaßt aussitÎt son travail grùce aux murs de béton qui entourent le temple et à la pureté des lignes : droites et courbes.

« Le bĂ©ton se patinera et avec le temps les arbres se rapprocheront du bassin. NĂ©anmoins, les fleurs de lotus en Ă©tĂ© seront toujours de fleurs et rappelleront que ce lieu est sacrĂ©. L’architecture contemporaine ne s’intĂ©ressent qu’au prĂ©sent. Les constructions se font concurrence pour une splendeur momentanĂ©e. J’aimerais crĂ©er des bĂątiments qui continuent Ă  vivre, mĂȘme si leur apparence doit changer. » Tadao Ando

Une fois les murs franchis, on dĂ©couvre d’abord le toit-Ă©tang

Les fleurs des nymphéas

n’ont rien perdu de leur blancheur
vent de l’automne

SHIKI

 

puis un escalier centrale vous invite à pénétrer sous la terre

oĂč on dĂ©couvre Ă©merveillĂ©s l’intĂ©rieur rouge vermillon baignĂ© de lumiĂšre naturelle. Au soleil couchant (16h Ă©tĂ©, 15h hiver) la statue du Bouddha apparaĂźt dans un halo de lumiĂšre. En ressortant, le ciel rempli le champ de vision. L’architecture du temple fait le lien physique et mĂ©taphorique entre la terre et l’au-delĂ .

 

« La salle d’un rouge vermillon irrĂ©el… se compose d’une piĂšce ronde de 14 m de diamĂštre placĂ©e Ă  l’intĂ©rieur d’une pice carrĂ©e de 17,4 x 17,4 m. Le volume circulaire est divisĂ© par des colonnes cruciformes rĂ©guliĂšrement espacĂ©es tandis qu’un Ă©cran en trĂ©illis sĂ©pare le sanctuaire extĂ©rieur du sanctuaire intĂ©rieur. Cete forme recrĂ©e une disposition spatlale ancienne lie au rituel de la secte Shingon. La successsion d’espaces gĂ©omĂštriques – ellipse, carĂ©e, cercle et grile – accroĂźt notre concentration au fur et Ă  mesure que nous approchons de la zone la plus sacrĂ©e. » Ando de Masao Furuyama

SATO

De Kuruma, j’ai pris le bus qui longe la mer jusqu’à Tsuna Port. Les paysages ont dĂ©filĂ©s lentement. De lĂ , j’ai pris un taxi jusqu’à l’hĂŽtel construit Tadao Ando qui se cache sur une colline, entourĂ© de magnifiques maisons, dont la plupart semble ĂȘtre des rĂ©sidences secondaires.

TOTO Seawind Awaji 573 Umihira, Sato, Awaji-Shi, Hyogo 656-2143, Japan

« Tadao Ando est un des plus Ă©minents architectes du Japon et son oeuvre, surtout lorsqu’elle touche Ă  l’habitat, est un parfait exemple de transposition des concepts du design traditionnel japonais dans un langage moderne. » L’art de vivre au Japon Ă©dition Flammarion

Tadao Ando utilise le bĂ©ton comme matĂ©riau de base de ses bĂątiments, tous conçus en harmonie avec le monde naturel qui l’entoure. Les formes et les surfaces architecturales de l’hĂŽtel semblent varier constamment avec le reflet du soleil sur les murs, les marches et les toits.

DĂšs qu’on monte les premiĂšre marches, on aperçoit la mer et son horizon infini et Ă  droite, la cĂŽte Est de l’üle. Émerveillement absolu ! Le soleil Ă©tait au zĂ©nith et l’air sentait le beau temps, la mer, l’espace.

me voilĂ 
lĂ  oĂč le bleu de la mer
est sans limite
SANTOKA

 

La chambre attribuĂ©e prĂ©sentait un grand inconvĂ©nient : j’entendais le bain bouillonnant au dessus de ma tĂȘte ! Fort heureusement, Ă  20h, il est arrĂȘtĂ©.

 

Un point Ă©tonnant pour ce merveilleux hĂŽtel, l’accĂšs aux personnes Ă  mobilitĂ© rĂ©duite est impossible car pas d’ascenseur pour accĂ©der au niveau des chambres. Il faut descendre plusieurs marches. Les rĂšgles ne doivent pas ĂȘtre les mĂȘmes qu’en Europe ?!

 

Vue de l’accueil

Le petit déjeuner et le dßner sont un pur plaisir pour les yeux et les papilles.

Informations importantes

  • il faut connaĂźtre un minimum de japonais car personne ne parle anglais, ils se servent de l’application Voicetra
  • le check-in se fait Ă  15h ou 16h
  • le petit dĂ©jeuner se prend entre 7h et 9h, vous devez choisir une tranche horaire (toutes les demi-heures)

PrĂšs de l’hĂŽtel il y a des restaurants de type occidentale.

Que faire Ă  Awajishima ?

https://www.awajishima-kanko.jp/en/

http://fr.kuniumi-awaji.jp/heritage/

https://www.vivrelejapon.com/ville-kobe/ile-awaji-shima-mythe

NARUTO – VALLEE D’IYA _SHIKOKU

NARUTO

Le matin, avant de quitter TOTO Hotel, j’ai fait connaissance avec un groupe de musiciens français Peine Perdue

Ils ont donné un concert sur une ßle de Seto Nankai dans le cadre de la Triennale de Setouchi

Ils se sont arrĂȘtĂ©s ici par hasard, ils connaissaient vaguement Tadao Ando


J’ai quittĂ© l’hĂŽtel et son environnement paradisiaque avec des regrets.

Repris un taxi jusqu’à Tsuna Port et de là le bus pour aller à Naruto, sur l’üle de Shikoku.

Les deux Ăźles sont reliĂ©es par le pont le plus long au monde Akashi Kaikyƍ qui a coĂ»tĂ© la modique somme de 500 milliards de yen !

 

De ce pont ou d’un bateau, on peut admirer les tourbillons de Naruto – Naruto no Uzushio provoquĂ©s par les mouvements de la marĂ©e entre la mer IntĂ©rieure et l’ocĂ©an Pacifique. Les courants peuvent gĂ©nĂ©rer des tourbillons allant jusqu’à 20 mĂštres de diamĂštre pour 1,70 mĂštre de profondeur et une vitesse de plus de 20 km/h.

Un site web indique l’intensitĂ©, le lieu et l’heure exacte Ă  laquelle ils se produisent.

Naruto a Ă©tĂ© juste une petite halte avant de reprendre la route jusqu’à la vallĂ©e d’Iya.

J’ai sĂ©journĂ© Ă  l’HĂŽtel Naruto Kaigetsu, idĂ©alement situĂ© avec une vue splendide sur le pont et le dĂ©troit.

HĂŽtel Naruto Kaigetsu Narutocho Tosadomariura Fukuike 65-7, Naruto, 772-0053

On accĂšde Ă  la plage via un petit parc. On remarque des petits ilots par-ci par-lĂ .

Le soir, j’ai dĂźnĂ© dans le restaurant d’un autre hĂŽtel de la chaĂźne Kaigetsu conseillĂ©e par le personnel. J’ai dĂ©couvert le poisson Tai (daurade)

« Au Japon, il y a Ă  peu prĂšs 10 sortes de daurades, mais une d’entre elles, la rose (le madaĂŻ) est plus populaire. Sa couleur extĂ©rieure est rouge et l’intĂ©rieur est blanc. Pour les Japonais, cette combinaison de couleurs signifie le bonheur. Ce madaĂŻ est donc considĂ©rĂ© comme un symbole de bonheur, on le mange surtout lors des fĂȘtes : nouvel an, mariage ou naissance, etc. » source

Restaurant avec vue sur la mer parsemée de petites ßles.

Cette ville me rappelle le livre de Harumi Murakami Kafka sur le rivage dont l’action se passe entre autres sur l’üle de Shikoku et l’un des personnages principaux s’appelle Naruto.

Que visiter Ă  Naturo ?
https://japan-magazine.jnto.go.jp/en/1504_naruto.html
https://www.vivrelejapon.com/ville-tokushima/naruto-pelerinage-shikoku
https://www.japan-guide.com/e/e7850.html

 

VALLE D’IYA


De Naruto, j’ai pris le train pour Tokushima puis Oboke, une petite gare oĂč Fumiko-san se tient prĂȘte Ă  vous renseigner en anglais sur les nombreux spots de la rĂ©gion.

Il y a trĂšs peu d’hĂ©bergements dans la VallĂ©e d’Iya par consĂ©quent les prix sont Ă©levĂ©s, sans parler des bus et taxis !

J’ai choisi le ryokan Kazuraya avec chambres traditionnelles, onsen et dĂ©licieux repas pour sa situation Ă  5 mn du pont Kazurabashi et de minka Chiiori.

Ryokan Kazuraya Nishiiyayamamura Kanjo, Miyoshi, Tokushima 778-0102


Son ermitage

la lune, les chrysanthĂšmes
et un arpent de riziĂšre

BASHÔ

 

Au milieu des montagnes
inutile de cueillir des chrysanthĂšmes
ils parfument la source chaude
BASHÔ

 

Au bout de la tige

de l’iris la blancheur

crépuscule de printemps

SHIKI

Apprenant son nom

de nouveau je regarde
La fleur sauvage

Teiji un ami de BASHÔ

Au pied du pin

teinté violet pùle

des pensées en fleurs

SHIKI

 

Lune du soir

buste dénudé

de l’escargot

ISSA

 

Rien du tout
si ce n’est calme de l’Ăąme
et fraĂźcheur de l’air
ISSA

 

Ma chambre, un havre de paix !
Elle invite à la contemplation de la nature et à la méditation :

Comme est magnifique
par un trou dans la cloison
la Voie lactée
ISSA

je prends mon repas
en compagnie
du liseron du matin
BASHÔ

Les petits déjeuners et les dßners sont un pur plaisir pour les yeux et les papilles.

Ils sont servis dans les rĂšgles de l’art par des jeunes filles en kimono.

« Il serait grossier de prĂ©senter une table sans tenir compte de l’aspect visuel des plats, de leurs correspondance plastique avec les mets qu’ils contiennent et de leur impact poĂ©tique. Plus encore, on doit favoriser l’accord de tous les sens. Par exemple, il est de bon ton de choisir un rĂ©cipient de verre soufflĂ©, lĂ©gĂšrement bleutĂ©, pour contenir des nouilles glacĂ©es presque translucides afin d’évoquer en plein Ă©tĂ©, une cascade ombragĂ©e, alors que tinte au vent la clochette aigrelette de la vĂ©randa. En automne, on lui prĂ©fĂšre un plat en shino gris ou une cĂ©ramique au tons de terre Ă©voquant le rougeoiement des Ă©rables. En hiver, c’est une poterie de Bizen Ă  effet de feu pour donner une impression de chaleur ou un plateau de laque negoro. Au printemps, les baguettes de bambou vert fraĂźchement coupĂ©es jouent avec des laques rouges ou une porcelaine d’Imari pour diner de la gaĂźtĂ©. Dans cette vaisselle de saison et pour universaliser la rĂ©fĂ©rence Ă  la nature, les formes doivent rester modestes pour laisser transparaĂźtre non pas la virtuositĂ© de l’artisan mais seul l’expo de l’objet. » Aux sources du raffinement japonais de Dominique Buisson

Pont de Kazurabashi et les alentours :

sur le pont en planches suspendu

enroulé à nos vies
le lierre grimpant

BASHÔ

La nuit en secret

un ver au clair de lune

taraude le chĂątaignier

BASHÔ

Plus blanche que la roche

de la montagne rocheuse

brise d’automne

BASHÔ

Saule décharné

clair ruisseau asséché
ça et là des pierres

BUSON

Quel silence !

imprégnant la roche

le cri des cigales

BASHÔ

 

Un court moment

je me recueille prĂšs de la cascade
dĂ©but de la retraite d’Ă©tĂ©

BASHÔ


Depuis que j’ai lu le livre du rĂ©putĂ© japonologue amĂ©ricain Alex Kerr Living in Japan j’ai toujours rĂȘvĂ© de me rendre Ă  Chiiori pour admirer la ferme minka qu’il a sauvĂ©e de la destruction (situĂ©e dans la vallĂ©e de l’Iya et date de la pĂ©riode Edo). Je suis en contact avec lui depuis 2016.

« Le terme minka, littĂ©ralement « maison du peuple », dĂ©signe un large Ă©ventail d’habitations japonaises – de la rĂ©sidence du riche marchand Ă  la modeste hutte du paysan. Ce vocable peut aussi s’appliquer aux domiciles des prĂȘtes shinto, des nobles et des samouraĂŻs de rang infĂ©rieur et, dans un sens plus large, Ă  toutes les maisons ordinaires hormis celles de la haute sociĂ©tĂ©. » Ryokan Ă©dition Konneman

Alex Kerr vit Ă  Kyoto depuis +10 ans et restaure des maisons traditionnelles dans des rĂ©gions reculĂ©es du Japon dans le but de raviver l’Ă©conomie locale et dĂ©velopper un tourisme qui met en avant les riches traditions.

portrait d’Alex Kerr Ă  la gare d’Oboke

Vous avez la possibilitĂ© de sĂ©journer Ă  Chiiori. C’est une expĂ©rience Ă  vivre si ça vous tente de dormir avec des inconnus dans la mĂȘme piĂšce, sur des futons bien sĂ»r.

c’est le printemps
une montagne sans nom
dans la brume légÚre
BASHÔ

 

descendant un sentier de montagne
l’ineffable grñce
des violettes
BASHÔ
un moine boit son thé du matin
dans la quiétude
des chrysanthĂšmes en fleurs
BASHÔ

Irori et jizai-kagi

Irori « Il s’agit d’un foyer qui illustre mieux que tout autre ce qu’Ă©tait autrefois la vie de famille au Japon. Par les froides soirĂ©es suivant une journĂ©e de travail bien remplie, il n’y avait rien de plus plaisant qu’une bonne veillĂ©e autour de l’irori noir de suie. En fait, l’irori sert Ă  la fois de chauffage et de cuisiniĂšre. Un systĂšme ingĂ©nieux pour suspendre la bouilloire au-dessus des braises du foyer exploite l’Ă©lasticitĂ© jizai du bambou et permet de changer la position de la bouilloire en l’Ă©tirant ou le repliant. » We japanese

« Des siĂšcles durant, le jizai-kagi – une sorte de crĂ©maillĂšre confectionnĂ©e avec du bois, du mĂ©tal et du bambou – suspendu au dessus du foyer ouvert (irori) fut une image familiĂšre et le point de mire de tous les minka. Suspendu au crochet de la crĂ©maillĂšre : le cha-gama, la bouilloire Ă  thĂ© dont la forme fut spĂ©cialement conçue pour la cĂ©rĂ©monie du thĂ© Ă  la fin de la pĂ©riode Muromachi (1392-1573). Le tetsubin est une bouilloire en fer ou en porcelaine et il semble d’ailleurs que le fer soit un matĂ©riau particuliĂšrement propice au dĂ©veloppement de l’arĂŽme subtil du thĂ©. » Ryokan Ă©dition Konemann

les montagnes et le jardin
aussi s’invitent
dans la salon d’étĂ©
BASHÔ

« Les maisons n’Ă©taient pas Ă©difiĂ©es directement sur le sol mais surĂ©levĂ©es de façon Ă  se prĂ©server de l’humiditĂ© et favoriser la circulation de l’air. Un systĂšme parfaitement agencĂ© de portes coulissantes qui pouvaient d’ouvrir – et mĂȘme s’enlever – permettaient une rĂ©partition flexible de l’espace selon les besoins, pour s’isoler ou recevoir, ainsi qu’une utilisation optimale de la brise pour rafraĂźchir la maison tout en offrant une vue dĂ©gagĂ©e sr le paysage verdoyant des environs. Les Japonais qui vivaient en communion avec la nature en vertu de ces principes architecturaux ont dĂ©veloppĂ© une une rĂ©ceptivitĂ© particuliĂšre Ă  des signes et Ă  des ambiances subtils : aux gazouilles des oiseaux et au bourdonnement des insectes Ă  l’automne, au souffle de la brise Ă  travers les aiguilles de pin, Ă  l’odeur de la terre mouillĂ©e aprĂšs une pluie d’Ă©tĂ©. Puisqu’il n’y a pas d’animaux sauvages dangereux contre lequel l’homme doit de protĂ©ger et que les rares moustiques sont facilement tenues Ă  distance par les moustiquaires, la nature se montre suave, accueillante et irrĂ©sistiblement belle. » Ryokan Ă©dition Konemann

alentour
dans tout ce que le regard croise
fraĂźcheur
BASHÔ
au chĂȘne d’abord
je me confie
la forĂȘt en Ă©tĂ©
BASHÔ
le rossignol
dans le bosquet de jeunes bambous
chante son vieil Ăąge
BASHÔ


Que visiter Ă  Shikoku et la ValĂ©e d’Iya :

TOP

https://www.japan-guide.com/e/e7825.html
https://www.vivrelejapon.com/ville-tokushima/vallee-iya-shikoku

Spécialités de Shikoku
https://gurunavi.com/en/japanfoodie/2016/04/shikoku.html?__ngt__=TT0f0b2afde008ac1e4aeceftCWvNIEnfnVgYw4gvaTgiX

NARA_HONSHU

Cette fois-ci, le voyage ne s’est pas dĂ©roulĂ© comme je l’ai souhaitĂ©. J’ai dĂ» changer de plans en cours de route.

AprĂšs la VallĂ©e d’Iya, je comptais prendre le bateau Ă  Tokushima pour Wakayama puis faire une halte Ă  Nishi Yoshino puis Yoshino avant de me rendre Ă  Nara.

Malheureusement, le trajet Ă©tait trop complexe pour aller Ă  Nishi Yoshino : bateau, puis train et enfin un bus qui effectue que 2 trajets par jour Ă©tant donnĂ© que ce village n’est pas touristique.

Je rĂȘvais d’y aller depuis que j’ai visionnĂ© en 1997 le premier film de Naomi Kawase Moe no suzaku

Un plan fixe qui n’a jamais quittĂ© ma mĂ©moire : un paysage composĂ© de trois montagnes vues du toit d’une maison !

Par consĂ©quent, j’ai dĂ©cidĂ© d’atteindre Nara plus rapidement, en Shinkansen : Oboke-Okayama-Kyoto-Nara
Il est facile de se déplacer au Japon grùce au site web : Hyperdia

Images de Seto Nankai, la mer intĂ©rieure, lorsqu’on traverse le pont vers
Osaka :
Seto Nankai (la MĂ©diterranĂ©e japonaise) est un havre de beautĂ© dont les habitants gardent secrĂštement les traditions sĂ©culaires. Il y tant d’Ăźles Ă  explorer: Shodoshima, Naoshima, Teshime et Inujima pour l’art contemporain dont j’en parle dans mon 2Ăšme blog

NARA
Nara est le lieu incontournable lorsque vous visitez le Japon, dĂ©jĂ  pour son histoire. Elle a Ă©tĂ© la premiĂšre capitale fixe de l’archipel de 710 Ă  784 durant l’impĂ©ratrice Genmei, Heijƍ-kyƍ (ćčłćŸŽäșŹ?, kyƍ voulant dire « capitale »).

Par ailleurs, c’est la ville de naissance de Naomi Kawase. La plupart de ses films sont faits à Nara et ses environs.

« La rĂ©alisatrice KAWASE Naomi filme avec un amour infini la paisible Nara, berceau de lÊŒhistoire japonaise et premiĂšre capitale permanente, non loin de Kyoto et dÊŒOsaka. Elle affectionne aussi les paysages aux couleurs Ă©clatantes dÊŒune rĂ©gion qui est la sienne. Ses rĂ©cits sensibles et humanistes mettent en scĂšne des histoires simples. » source

J’ai sĂ©journĂ© Ă  l’hĂŽtel Centurion Classique, proche de la gare et du centre.

Centurion Classique 1-51 Aburasakacho, Nara, 630-8247, Japon +81 742-93-5066

Je n’ai pas Ă©tĂ© fort enchantĂ©e par Nara, trop de touristes !

Il faut tout de mĂȘme visiter le temple bouddhique Todai-ji qui inclut Daibutsu-den, la plus importante construction en bois au monde qui abrite la plus grande statue de Bouddha du Japon : 450 tonnes de bronze et d’or pour 15 mĂštres de hauteur.

au parfum des chrysanthĂšmes
Ă  Nara
les bouddhas anciens
BASHÔ

 

l’anniversaire du nirvana du Bouddha
de mains ridées jointes
le bruit des chapelets
BASHÔ

 

J’ai pu nĂ©anmoins apprĂ©cier le vieux quartier Nara machi.

Sortie des sentiers battus, je me suis laissĂ©e perdre. En flĂąnant, j’ai dĂ©couvert la maison traditionnelle Naramachi Nigiwai-no-le

et pas loin de lĂ , je me suis recueillie dans un temple shinto Goryo jinja shrine

Sur la cloche du monastĂšre
installé pour dormir
un papillon
BUSSON
VĂ©randa du monastĂšre
pour deux piĂšces en offrande
en emprunter la fraĂźcheur
ISSA

« Le shinto est profondĂ©ment ancrĂ© dans la culture japonaise. Depuis au moins 2000 ans, il dĂ©termine la piĂ©tĂ© japonaise, malgrĂ© l’introduction dans le pays du bouddhisme, du confucianisme, du taoisme et plus rĂ©cemment du christianisme. » Shinto Ă©dition GrĂŒnd

Que visiter Ă  Nara ?
https://www.vivrelejapon.com/ville-nara/nara-journee-de-visite
https://www.japan-guide.com/e/e2165.html
https://www.kanpai.fr/nara
https://www.japan.travel/fr/destinations/kansai/nara/

KANAZAWA – ISHIKAWA_HONSHU

KANAZAWA

En quittant Nara, j’ai souhaitĂ© m’arrĂȘter Ă  Tojinbo, aprĂšs avoir visionnĂ© le film de Vanja d’Alcantara Le Coeur rĂ©gulier dont l’histoire a Ă©tĂ© inspirĂ©e des faits rĂ©els qui se dĂ©roule sur ces falaises.

Mais en réalité, les paysages vus dans films sont ceux des ßles Oki, un archipel japonais situées dans la Mer du Japon, entre 40 et 80 km au nord de la péninsule de Shimane et Honshƫ.

J’ai abandonnĂ© le dĂ©tour et partie direct Ă  Kanazawa, ville jumelĂ©e avec Nancy depuis 45 ans.

J’ai choisi l’hîtel Wing International Premium Kanazawa Ekimae

Wing International Premium Kanazawa Ekimae 8-13 Horikawashinmachi, Kanazawa, Ishikawa 920-0849, Japon +81 76-290-7776
Vue nocturne du dernier Ă©tage, la ville a l’air apaisĂ©e.

Nuit trop brĂšve
tout prĂšs de l’oreiller
le paravent d’argent
BASHÔ
Par moments les nuages
à ceux-là donnent un répit
qui contemplent la lune
BASHÔ


J’ai aussitĂŽt Ă©tĂ© charmĂ©e par cette magnifique ville ainsi que sa douceur de vivre.

Toutes les autres photos je les ai effacĂ©es par mĂ©garde lors du tĂ©lĂ©chargement ! Un cauchemar ! J’ai dĂ» me rĂ©silier !
Il vous reste qu’Ă  suivre mes pas et dĂ©couvrir par vous-mĂȘme ces merveilleux endroits.

Étonnement, le chĂąteau de Kanazawa et le parc qui l’entoure dĂ©gagent quelque chose de glacial. Ils auraient Ă©tĂ© plus accueillants au printemps avec les cerisiers en fleurs.

En face, il y a le Parc Kenrokuen bien plus chaleureux et gracieux. Le seul inconvénient : il faut faire la queue pour y pénétrer.
Yamemashita ! Ce fut un dĂ©senchantement, j’ai abandonnĂ© !

Plus loin, explorez l’incontournable MusĂ©e d’art contemporain du 21Ăšme siĂšcle construit par le cabinet SANAA. En France, ils ont bĂąti Le Louvre-Lens.

Aussi, ne pas rater le quartier Higashi Chaya situĂ© sur les rives d’Asanogawa, caractĂ©risĂ© par des rangĂ©es d’anciennes Maisons de Geishas. Je conseille de visiter la maison de geishas Shima, classĂ©e bien culturel d’importance nationale et faire une promenade au long de la riviĂšre.

Il y a aussi les temples d’Utatsuyama situĂ©es dans des rues calmes et sinueuses.

En enfin, les anciennes résidences des Samuraïs de Naga-machi Buke Yashiki du clan Kaga. Leurs spécificité : les murs en terre et les portes longues Nagaya-mon.

On peut visiter la résidence des Takada, vassaux du clan Kaga.

Pour passer du quartier fĂ©odal au quartier contemporain, il suffit de quelques pas ! J’ai apprĂ©ciĂ© la rue Seseragi qui longe le canal Kutatsuki (seseragi = murmure de l’eau) remplie de cafĂ©s et petits magasins.

Que faire Ă  Kanazawa ?
https://fr.visitkanazawa.jp/mustgoplace


WAJIMA

Le mer me manquait déjà ! Je suis montée à Wajima, à la pointe de la péninsule de Noto.
Le prix de bus Ă©tait fort onĂ©reux 63 € aller/retour car peu de clients et aucun train.

J’ai sĂ©journĂ© dans un ryokan avec onsen datant des annĂ©es 70, au bord de mer.

Ryokan Onsen Koshuen 2-31-6 Tsukadamachi, Wajima, Wajima, Noto, 928-0003

 

Le printemps s’en va
l’oiseau pleure le poisson
a la larme Ă  l’oeuil
BASHÔ

 

Salle de bain Ă  la japonaise

Il a Ă©tĂ© impossible de dĂźner Ă  l’hĂŽtel alors je me suis rendue dans un petit restaurant oĂč j’ai fait la connaissance d’une cliente qui a fait l’Ă©cole pĂątissiĂšre Ă  Lyon !

La cîte n’est pas trop sauvage et la ville est calme.
J’ai pris le taxi pour me rendre sur une plage isolĂ©e, magnifique ! Malheureusement, j’ai perdu les photos comme celles de Kanazawa. Le cauchemar !

J’y ai vĂ©cu par contre une petite mĂ©saventure dĂ©sagrĂ©able durant plus de 30 minutes qui me sont parues une Ă©ternitĂ©. Brutalement une forte tempĂȘte, ciel noir et vents violents, je me suis accrochĂ©e Ă  un panneau de la circulation pour ne pas m’envoler. PaniquĂ©e, impossible d’appeler un taxi, j’ai eu l’idĂ©e de faire de l’auto-stop. Mais voilĂ  que les voitures Ă©taient extrĂȘmement rares et celles qui passaient m’ont complĂ©tement ignorĂ©e ou refusĂ©e de la tĂȘte… Je me sentais terriblement seule et en danger. Heureusement, j’ai aperçu au loin, dans une voiture un couple de jeunes amoureux qui allaient partir. J’ai aussitĂŽt couru vers la voiture et ils ont eu la gentillesse de me ramener Ă  l’hĂŽtel. Venus d’Osaka, ils ont dormi la veille dans le mĂȘme hĂŽtel que moi. J’ai Ă©tĂ© sauvĂ©e !

J’ai voulu me rendre sur lĂźle Hegura situĂ©e Ă  50 km de Wajima, mais on m’a dĂ©conseillĂ© car je risquais de ne pas pouvoir revenir Ă  cause du mauvais temps.
Le trajet prend 1h30 et si la météo est mauvaise, plus aucun bateau ne circule.

Je me suis consolée en visitant les riziÚres de Senmaida qui signifie « mille riziÚres » et qui appartiennent à des locaux.

Azalées en fleur
dans le village de montagne
blancheur du riz cuit
BUSON
le bruit incessant des vagues
mon village natal
si loin
SANTOKA
La bise d’hiver
souffle le soleil couchant
dans la mer
SÔSEKI
le soleil rouge
tombe dans la mer
quelle chaleur !
SÔSEKI
longue journée
mes yeux sont fatigués
de regarder la mer
TAIGI
Pleine lune d’automne
les nuages qui vont
vers oĂč se hĂątent-ils ?
SHIKI
Que faire sur la PĂ©ninsule de Noto :
https://www.tourisme-japon.fr/content_page/item/806-la-peninsule-de-noto
https://www.japan.travel/fr/destinations/hokuriku-shinetsu/ishikawa/noto/
https://www.vivrelejapon.com/ville-kanazawa/decouvrir-la-peninsule-de-noto

KYOTO – KANSAI _ HONSHU

KYOTO

La date de retour s’approchait à grands pas ! Impossible de quitter le Japon sans revoir Kyoto.

Je l’ai explorĂ©e pour la premiĂšre fois en 2012, lors de mon premier voyage. Je vous invite Ă  consulter mon 1er blog pour glaner des adresses.

Cette fois-ci, j’ai sĂ©journĂ© Ă  :

Nest Hotel Kyoto Shijokarasuma 551 Sannocho, Shimogyo Ward, Kyoto, 600-8424, Japon +81 75-341-2011

 

Proche de l’hĂŽtel j’ai dĂ©couvert un bar Ă  sakĂ©s…comme j’aime.

Kyoto Sakagurakan 1F Tora bldg 236 Kugikakushi-cho Bukkpji-Dori Muromachi Higashi-iru Shimogyo-ku, Kyoto 600-8423

 

 

Par contre, j’ai dĂźnĂ© Ă  cĂŽtĂ© chez Teppan Tachibana des okonomiyaki Ă  la façon d’Hiroshima, la meilleure recette ! J’en parle dans mon 2Ăšme blog

DerniĂšre promenade nocturne, les yeux embuĂ©s de larmes d’Ă©motion.

Que faire Ă  Kyoto :
https://www.kanpai.fr/kyoto
https://www.vivrelejapon.com/ville-kyoto
https://www.tourisme-japon.fr/content_page/147-kyoto
https://kyoto.travel/fr
https://japon-fr.com/visiter-kyoto-kansai-japon.htm

MORIOKA – MONT IWATE

du 17 au 18 avril 2015 °°° MORIOKA

Vendredi 17 avril 2015

Vu que la pluie n’avait pas l’intention de s’arrĂȘter les deux prochains jours, il fallait dĂ©cider de la direction Ă  prendre. Mon mari tenait Ă  faire un volcan, je lui ai proposĂ© le mont Iwate. Nous sommes repartis pour Minmaya et pris le train pour Morioka.

N’ayant rien organisĂ© pour ces vacances, j’ai demandĂ© Ă  l’office de tourisme de la gare oĂč pourrions-nous dormir le plus proche du mont Iwate. On nous a proposĂ© Yakehashiri onsen, situĂ© au pied du volcan, il y avait plusieurs maisons en bois. Mais, vu que ce n’était pas la pĂ©riode touristique
 il fallait prendre le taxi de la gare d’Obuke (un AR de 30 mn nous a coĂ»tĂ© 60 € !) et faire des courses pour 2 jours car soit disant rien dans le coin pour manger.

Nous avons dĂ©posĂ© les bagages Ă  l’hĂŽtel Hills proche de la gare, puis sommes vite ressortis boire une bonne biĂšre dans un izakaya pour souffler un peu avant la visite de l’allĂ©e des cerisiers en fleurs. Dans le nord du Japon, contrairement Ă  la rĂ©gion de Kanto, les cerisiers Ă©taient en pleine fleuraison.

La nuit tombe trĂšs vite au Japon, Ă©tĂ© comme hiver, dĂšs 18h-18h30. Le temps d’arriver en bus, nous avons admirĂ© les cerisiers sous la lumiĂšre des rĂ©flecteurs. Une star de sexe masculin Ă©tait en train de se faire interviewĂ©e sous le cĂ©lĂšbre Ishiwarizakura, vieux de 400 ans. Les passants s’empressaient Ă  faire des photos. MontĂ©s jusqu’au temple shintĂŽ situĂ© sur les hauteurs dans un parc oĂč ils restaient encore les murs d’un chĂąteau dĂ©moli en 1874. Le chemin est bordĂ© d’une centaine de cerisiers.

Je fais entrer la lune
Dans ma chambre d’ami
Et m’assieds dans son ombre
Seibe (1748-1816)

 

La promenade et « l’agglomĂ©ration » d’izakayas nous ont donnĂ© faim. Au menu, j’ai remarquĂ© une soupe encore inconnue : tenshi me. C’est un bouillon au poulet avec des nouilles fines et par dessus une Ă©paisse omelette japonaise (oeufs + soja + mirin + sucre). Exquise, j’en rĂȘve encore ! MangĂ© aussi des gyozas.

 

Une autre spĂ©cialitĂ© de la rĂ©gion, les desserts Kamome no Tamago. Ils ont la forme d’oeuf, tamago signifiant oeuf, et l’ntĂ©rieur est fourrĂ© avec de la crĂšme vanille. De consistance tendre qui fond dans la bouche, un pur dĂ©lice !

 

 

Samedi 18 avril 2015

Morioka n’est pas une ville de grand intĂ©rĂȘt Ă  part le parc aux cerisiers dont je vous ai parlĂ© et la riviĂšre qui offre une vue splendide sur le Mont Iwata e des belles promenades.

Photo : www.japan-guide.com
Une maison traditionnelle avec jardin entourĂ©e d’immeubles modernes

 

 

du 18 au 20 avril 2015 °°° MONT IWATE

Nous avons quittĂ© Morioka sans regrets pour nous isoler aux pieds du Mont Iwate. Il est tout aussi respectĂ© que le Mont Fuji Ă  qui il ressemble comme deux goĂ»tes d’eau.

« … la nature est un temple au Japon, un sanctuaire tout parĂ©e dont l’homme n’est que l’Ă©mondeur. » Maurice Pinguet extrait du ‘Le texte Japon’

Il faut se mĂ©fier de ce volcan « endormi ». Sa derniĂšre Ă©ruption date de 1919. Elle a crĂ©Ă© des champs de lave impressionnantes, d’un noir anthracite. Dans les annĂ©es 1990 est sorti de son ventre de la vapeur nocive. Par prĂ©caution, le mont a Ă©tĂ© interdit d’accĂšs durant plus de 2 ans. Les derniers incidents sur le mont Nagano, qui s’est subitement rĂ©veillĂ© et tuĂ© une soixantaine de randonneurs, prouve que l’on n’est jamais Ă  l’abri sur un volcan. MalgrĂ© les appareils ultra-sophistiquĂ©s, la nature est incontrĂŽlable et indomptable.
Une fois arrivĂ©s sur le site, j’ai eu droit Ă  un accueil exceptionnel : une feuille A4 avec des dessins Ă  la main, style manga, et quelques indications en anglais prĂ©parĂ©e par la jeune et belle responsable de l’établissement, Saori san :
« Welcome Adina Cernus et I dont speak English, I am sorry. »
En bas de la feuille, elle a dessiné une insecte : my name is ka-me-mushi, verry smell bad ! done touch me !! wrapitinpacking tape, the room has it
Elle m’a montrĂ© un rouleau de scotch et expliquĂ© comment coller l’insecte et l’envelopper sans l’écraser pour qu’elle ne sente pas plus mauvais que d’habitude.
Je me suis sentie trùs mal car je n’aime pas tuer des insectes ou des animaux
 tout en priant le bon Dieu qu’aucune n’atterrisse dans ma cabane.

Mais voilĂ  qu’à peine rentrĂ©s, je remarque par-ci par-lĂ  plusieurs kamemushi (sorte de blatte). J’ai commencĂ© Ă  les attraper avec mon scotch tout en pleurant sur la longue et atroce agonie que j’allais leur infliger.

Au dĂ©but, j’avais du mal Ă  les tuer mais au bout de 2 jours je suis devenue hystĂ©rique et fini par y prendre plaisir. J’en ai tuĂ© plus de 100, facilement !
Je l’ai signalĂ© Ă  la direction. Saori san m’a fait une remise de 50% et une bouteille de vin rouge de la rĂ©gion. Aussi, elle m’a proposĂ© de changer de maison mais cela n’aurait rien changĂ© car toutes Ă©taient envahies par des hordes de kamemushi.

Notre grande cabane avec vue sur le Mont Iwate :

Dans la nuit de printemps
Surgit l’arc-en-ciel d’un rĂȘve
Mais derriĂšre la montagne
Quel ciel lourd de nuages
Fujiwara no Teika dit Sadaie (1162-1241)

 

Que le tissus soit d’un tissu trop lĂ©ger
VĂȘtement de brume pour vĂȘtir le printemps qui vient.

 

Fort heureusement, le retour du soleil et Iwatesama m’ont procurĂ© du bonheur.
Le chemin vers l’ascension

 

Une fois dans le champ de lave, c’était magique ! Par endroits il y avait de la neige et quelques arbres solitaires ont transpercĂ© la lave. La vĂ©gĂ©tation reprend sa place petit Ă  petit.
La neige s’étale encore
Pourtant le printemps est lĂ .
Et les larmes du rossignol,
Qui étaient gelées
Auront bientĂŽt fondu.
Impératrice Nijo (842-910)

 

attiré par le parfum des pruniers
le soleil surgit
sur le sentier de montagne
Basho

 

Places de camping aménagées avec éviers !

 

En route vers Narita, photos du train :


Lundi 20 avril 2015 °°° NARITA

DĂšs qu’on arrive Ă  Narita, on prend conscience que les vacances sont finies. Difficile d’accepter le dĂ©part.

L’hĂŽtel APA Keisei Narita est parfait (286-0033, Narita, Hanasakicho 906). Par contre, je vous dĂ©conseille de manger dans le restaurant qui se situe Ă  l’entrĂ©e, c’est le piĂšge Ă  touristes, cher et en plus vous y trouvez mĂȘme des frites !
onsen

Le rĂ©cit de ce 5Ăšme voyage prend fin ici. J’espĂšre pouvoir vous raconter ma 6Ăšme expĂ©rience japonaise dĂšs l’annĂ©e prochaine. Je rĂȘve tant de faire le tour de Kyushu. De plus, le dernier film de Naomi Kawase, The still water, filmĂ© sur l’Ăźle d’Amami, en face de Kagoshima, n’a fait que renforcer mon dĂ©sir de dĂ©couverte.

« L’expĂ©rience japonaise…une valeur Ă©motive, hĂ©doniste, esthĂ©tique. » Maurice Pinguet, « Le texte Japon »

Komaki – Inuyama – Tokyo – Aomori pĂ©ninsule Shimokita – Morioka & Mont Iwate

Depuis printemps 2012, je me suis lancée le défi de faire le tour du Japon.

Ma fascination pour ce pays est nĂ©e des dizaines d’annĂ©es auparavant, lorsque j’ai commencĂ© Ă  Ă©tudier sa culture, bien avant le contact « physique ». Les raisons sont multiples, mais je prĂ©fĂšre citer RenĂ© Sieffert.

Les Japonais ont le « goût instinctif » pour tout ce qui est beau :

« un beau paysage, un bel objet, un beau geste n’ont jamais trouvĂ© un Japonais insensible ; ce sixiĂšme sens, ce sens de l’esthĂ©tique, le bouddhisme va l’exacerber en soulignant l’impermanence des choses de ce monde, concept acceptĂ© d’emblĂ©e dans cet archipel constamment Ă©prouvĂ© par les tremblements de terre, les typhons et les incendies, prodigue en sites grandioses, mais inhospitaliers et de rude abord pour l’homme ; enfin, nĂ©s de cette impermanence, un humour parfois naĂŻf, une ironie parfois fĂ©roce, un scepticisme parfois amer, tempĂšrent les enthousiasmes irrĂ©flĂ©chis, imposent la notion d’une juste mesure entre la double tentation de la rĂ©signation et de l’arrogance. » extrait de son livre ‘La littĂ©rature japonaise’

Au Japon, je me sens chez moi, comme si j’y ai toujours vĂ©cu. Je n’ai jamais Ă©tĂ© une touriste. Maurice Pinguet me le confirme dans son rĂ©cit ‘Le texte Japon’ :

« Le tourisme est un mode de perception : regard de surface, vite rassasiĂ©. L’ennui accourt. A l’entracte, avant mĂȘme l’entracte, beaucoup Ă©vacuent leur fauteuil et se tiennent quittes de leur devoir d’exotisme ».

Avec le Japon je suis unie par un lien fusionnel qui attise mon dĂ©sir de continuer Ă  l’Ă©tudier en profondeur et sans relĂąche.

Ce 5Ăšme voyage si attendu, s’est relevĂ© compliquĂ© autant avant que durant le sĂ©jour.

C’est « le moins rĂ©ussi » si je tiens compte de l’impossibilitĂ© Ă  visiter ce que j’avais prĂ©vu et en raison de la mĂ©tĂ©o : 7 jours de pluie sur 10, ce qui est inhabituel pour la saison. Le Japon non plus n’est pas Ă©pargnĂ© par le dĂ©rĂšglement climatique… !

Une semaine avant le dĂ©part j’ai appris via l’office de tourisme de Hokkaido que tous les sites que nous voulions explorer sont fermĂ©s Ă  cause de la neige : les parcs nationaux Akan, Daisetuzan (avec sa plus haute montagne Asahidake, 2 290 m) et Kushiro (zone de marais qui abrite une espĂšce rare de grue japonaise), puis enfin Shiretoko (pĂ©ninsule Ă©troite et montagneuse Ă  l’extrĂȘme est de l’üle).

DeuxiĂšme surprise, fut le permis de conduire international. Il ne suffit pas de le dĂ©tenir, lorsqu’on arrive au Japon il faut le faire traduire en japonais dans une des agences JAL (http://www.jaf.or.jp/inter/translation/specific_e.htm – dĂ©lai improbable) et avant de louer une voiture, il faut passer un examen de conduite. Donc, nous avons Ă©galement abandonnĂ© le projet de louer une voiture.

La grande question qui se posait : oĂč aller aprĂšs le sĂ©jour de 3 jours Ă  Tokyo ? Nous nous sommes dĂ©cidĂ©s pour la rĂ©gion Aomori et sa pĂ©ninsule Shimokita tout en laissant cours Ă  l’improvisation. Il s’est avĂ©rĂ© qu’au Japon, le pays ultra organisĂ©,l’improvisation est quasi impossible
.

 

Vendredi 10 avril 2015 °°° TOKYO

A notre atterrissage, un ciel gris et pluvieux nous attendait les bras ouverts, comme en septembre 2014. DĂ©cidĂ©ment, Tokyo se montre trĂšs « inhospitaliĂšre » avec nous pourtant nous l’aimons Ă  la folie !

A peine atterris, nous avons pris le NEX express pour Tokyo, il se distingue des autres trains par son design trĂšs particulier.

Les paysages dĂ©filaient. MalgrĂ© que la saison des cerisiers soit presque finie dans le Kanto, par-ci par-lĂ , au bord des routes et dans les forĂȘts, j’en ai aperçu quelques uns aux fleurs blanches, roses et fuchsias, parfois les trois teintes rĂ©unies Ă  la fois, trĂšs rare !
De la beauté des fleurs
Il ne reste déjà plus rien
Et moi qui n’ai portĂ© mon regard
Que sur des choses vaines
Au long de ma vie
Ono no Komachi (IXÚme, poétesse célÚbre pour sa beauté)

 

du 10 au 11 avril 2015 °°° NAGOYA – KOMAKI

De Tokyo nous avons pris le shinkansen pour Nagoya et 2 autres trains pour arriver chez les parents d’une de mes amies que nous n’avions plus revus depuis deux ans. Cette famille est devenue la nĂŽtre. Les Japonais sont d’une gĂ©nĂ©rositĂ© extrĂȘme : nous avons Ă©tĂ© gĂątĂ©s avec des repas exquis et tant de cadeaux. La mĂšre, sachant que j’aimais les desserts Ă  base de thĂ© matcha, elle m’en a achetĂ© 5-6 sortes. Mon mari aimant le whisky, le pĂšre lui a offert sa 3Ăšme bouteille en 2 ans sans parler de tous les alcools mis Ă  notre disposition lors du repas avec toute la famille rĂ©unie : biĂšre, sakĂ©, shochu… Aussi, nous avons reçu une belle enveloppe avec 10 000 Y pour notre voyage ce qui nous a d’abord mis mal Ă  l’aise puis touchĂ©s. Moi, qui Ă©tudie depuis des annĂ©es la culture japonaise, je ne connaissais pas une des traditions sĂ©culaires dĂ©nommĂ©e : senbetsu. Elle consiste Ă  donner de l’argent Ă  ceux qu’on aime avant leur dĂ©part pour un voyage. En Ă©change, nous devions envoyer un souvenir omiyage de notre voyage.

« Les bons amis sont de trois sortes. En premier lieu, les amis qui donnent gĂ©nĂ©reusement ; en seconde lieu, les mĂ©decins ; en troisiĂšme lieu, les hommes d’esprit. » KenkĂŽ-hĂŽshi (1283-1350)

Le lendemain matin, pendant qu’on dĂ©jeunait, la mĂšre a pris soin de son petit jardin remplis de camĂ©lias japonais d’hiver otome tsubaki et autres fleurs.

Dans la lumiùre incertaine du soir d’hier
J’ai vu une fleur si nouvelle et brillante
Mais pareille au brouillard du matin.
A prĂ©sent la douleur m’afflige
A la revoir Ă  nouveau.dans ‘Genji Monogatari’

 

AprĂšs nous sommes tous partis vers la gare d’Inuyama, petite ville connue pour son magnifique chĂąteau de l’époque Edo (1440) qui, perchĂ© sur la montagne, offre une vue splendide sur la riviĂšre Kiso.
Sur la route, nous avons visitĂ© deux temples shintoĂŻstes. Le premier, Oagata-jinja offrait une promenade dans la montagne sous les cerisiers jusqu’à un petit Ă©tang.
Les fleurs de cerisiers tombées
le temple appartient
aux branches
Buson

 

Dans l’horreur du vide
Qu’est-ce que la vie ?
Juste un arbre sur le chemin
Sogi (1421-1502)

 

« …le shinto ne se contente pas de regarder la montagne, il la gravit – le sentier de ses pĂšlerinages est sinueux et escarpĂ©, c’est prĂšs des sommets qu’il juche ses sanctuaires. Or, dans cette montagne japonaise, la forĂȘt rĂšgne sans partage. La forĂȘt : temple primordial… » Maurice Pinguet ‘Le texte Japon’

La riviĂšre et l’étang
dĂ©sormais ne font qu’un
pluie de printemps
Buson

 

Un cadre si apaisant, que l’on devient « zen ». Cela m’a rappelĂ© un poĂšme de Ikkyu :

Ce monde est provisoire.
Cette vie es comme un rĂȘve.
Je me repose en cours de voyage
Et mon rĂȘve est comme celui de la vie mĂȘme.

J’aimerais tant arriver un jour Ă  faire de la mĂ©ditation zazen, mais comment y parvenir alors que

Si vous pensez
A ne pas penser,
DĂ©jĂ  vous pensez

poĂšme qui figure dans le Recueil de Nambo

J’ai profitĂ© d’acquĂ©rir une nouvelle omamori (amulette), une minuscule poupĂ©e qui a le pouvoir de chasser tous les mauvais esprits. Aussi, j’ai eu la chance de voir la cĂ©rĂ©monie shintĂŽ du matin.

Tout à la pensée
des cerisiers en fleur
dessus la mousse
j’y Ă©tablis ma demeure
et sommeille au printemps
Fujiwara no Teika

 

Bassin rempli de koï, symbole de persévérance, force, amour et virilité.
La séparation a été trÚs difficile, les larmes aux yeux, mais nous étions attendus par la trépidante Tokyo et nos autres amis.
du 11 au 15 avril 2015 °°° TOKYO
Samedi 11 avril 2015
ArrivĂ©s Ă  Tokyo, nous sommes allĂ©s directement Ă  l’hĂŽtel, que je vous conseille vivement d’ailleurs:

MyStaysGotanda, Ă  3 mn Ă  pied de la station Gotanda (JR line Yamanote, gratuite avec JR Pass) dans le quartier universitaire trĂšs vivant.

Nous avons pris une petite chambre/appartement au prix imbattable de 80 € pour 2 personnes, confortable avec micro-ondes, bouilloire. Une salle lavomatique se trouve au rez-de-chaussĂ©e. ll y a mĂȘme des jeunes employĂ©s qui y habitent
 en attendant de trouver un logement ?!
Les bagages posés, nous sommes aussitÎt sortis boire un verre et manger une délicieuse ramen épicée au porc dans un restaurant de quartier.
A droite de l’hĂŽtel, sur le trottoir opposĂ©, il y a un bar, pratique lorsqu’on veut juste boire un verre Happy Jack : Shinagawaku Higashigotanda 1-25-10 Tokyo

Dimanche 12 avril 2015

Quel bonheur d’ĂȘtre enfin rĂ©veillĂ©s par le soleil !

Nous sommes partis explorer le quartier autour de l’hĂŽtel. Le dimanche tout est si paisible. En allant vers Hara Museum, le musĂ©e de la photo qui exposait Mika Nirogawa, nous avons Ă©tĂ© Ă©merveillĂ©s par quelques belles villas ultra-modernes. On y remarque la « signature » des architectes japonais : sobriĂ©tĂ© et raffinement jusque dans le moindre dĂ©tail.
Hara Museum

 

J’ai appris derniĂšrement qu’une place de parking Ă  Tokyo peut coĂ»ter plus cher que la voiture. D’ailleurs, on doit d’abord se trouver une place de parking avant d’acheter la voiture.

Pour revenir Ă  l’architecture de Tokyo, cette ville n’est pas vraiment belle, malgrĂ© tout elle a un fort pouvoir de sĂ©duction qui envoĂ»te au point de ne plus pouvoir s’en dĂ©faire.

L’architecte Bruno Taut Ă©crivait lors de son premier sĂ©jour au Japon en 1937, arrivĂ© donc aprĂšs la reconstruction en vitesse de Tokyo qui s’est imposĂ©e suite au grand tremblement de terre et incendie qui l’ont presque entiĂšrement dĂ©truite en 1923 :

« 
 nous restions abasourdis face Ă  la stĂ©rilitĂ© et la maniĂšre comique de vouloir Ă  tout prix ĂȘtre moderne, Ă  ce capharnaĂŒm tapageur et hideux de style architecturaux. OĂč donc Ă©tait le regard raffinĂ© des Japonais ? Les paysages de ce pays se semblaient-ils pas destinĂ©s Ă  apprendre la dĂ©licatesse au nerfs optiques de leurs habitants ?

























……………………………………………………………
Le tableau d’ensemble n’en apparaissait que plus intolĂ©rablement criard. AprĂšs tout, nos autres voyages nous avaient habituĂ©s Ă  trouver, partout dans le monde, les mĂ©faits de la civilisation. Mais cet arbitraire absolu, cette absence totale de ligne directrice, mĂȘme dans le mauvais goĂ»t, ne chamboulaient pas seulement l’idĂ©e que nous nous Ă©tions faite du Japon ; ils mettaient particuliĂšrement Ă  mal notre conception de la culture. Car aprĂšs tout, Berlin, Paris ou Londres, mĂȘme dans leurs aspects les plus tristes, ne sont jamais dĂ©pourvus de caractĂšres.
Voici Tokyo et sa grande avenue commerçante, la Ginza ! Ce qui tout Ă  l’heure avait constituĂ© un bruit pour l’oeil, devenait ici un vacarme assourdissant. L’aitre sensible qui vous parle sombra dans une terrible dĂ©pression ; je ne dis plus un mot et me mis Ă  regretter amĂšrement d’avoir entrepris ce voyage. » extrait de « La maison japonaise et ses habitants »

La suite on la connait, Bruno Taut est tombĂ© amoureux du Japon et de son architecture traditionnelle. Gropius aussi s’y est rendu en 1954 et le courant Bauhaus a Ă©tĂ© influencĂ© par celle-ci :

« Lorsque j’ai eu cette si grande chance d’ĂȘtre invitĂ© pour une visite de longue durĂ©e au Japon, en 1954, je me suis moi-mĂȘme trouvĂ© confrontĂ© Ă  une nouvelle expĂ©rience, Ă  savoir, de voir, d’une part dans l’architecture domestique japonaise les rĂ©sultats d’une tentative extraordinairement logique de crĂ©er un modĂšle culturel si homogĂšne, et que d’autre part si variĂ©e et riche dans ses Ă©lĂ©ments, elle reste incontestĂ©e parmi les rĂ©ussites architecturales les plus notables. L’architecture domestique traditionnelle inclut les principes et idĂ©aux gĂ©nĂ©raux de la sociĂ©tĂ© japonaise d’une façon si parfaite que, mĂȘme aujourd’hui, Ă  notre Ă©poque, son impact est fort et son influence culturelle omniprĂ©sente. »

AprĂšs avoir longĂ© un parc, nous sommes passĂ©s de l’autre cĂŽtĂ© de la voie ferrĂ©e oĂč se trouvait le quartier populaire.

 

la moindre petite parcelle est remplie de végétation

« Les Japonais admirent tellement les jardins, et leurs effets, que le plus petit morceau de terre est utilisĂ© dans ce but. » Masaharu Anesaki ‘L’Art, la Vie et la Nature au Japon’

Position jambes Ă©cartĂ©s du policier : pour se mettre au niveau du chauffeur ou pour l’empĂȘcher d’ouvrir la porte ?

 

Pris le mĂ©tro Shibuya puis marchĂ© jusqu’à la minuscule librairie design Cowbooks qui se situe au long du canal de Nakameguro, promenade rĂ©putĂ©e pour ses cerisiers en fleurs. Ici, s’alignent les boutiques de mode, des cafĂ©s et restaurants style « occidental ».
AprĂšs, direction Chidorigafuchi, au nord-ouest du Palais impĂ©rial (station Hanzomon, sortie 5). De cette allĂ©e aux 1000 cerisiers il en restait encore trĂšs peu fleuris. La fĂȘte des hanami ayant finie avant notre arrivĂ©e Ă  Tokyo (pĂ©riode oĂč tous les Japonais se retrouvent dans le parc Ă  boire, manger et chanter sous une pluie de pĂ©tales de cerisiers, symboles de la vie Ă©phĂ©mĂšre depuis le temps des guerriers).
le dernier cerisier survivant…

Lorsque nous avons repris Yamanote ligne pour rentrer Ă  l’hĂŽtel, il y a eu une panne Ă©lectrique. Nous avons dĂ» prendre un bus, conseillĂ©s et guidĂ©s par un Monsieur qui nous a proposĂ© son aide sans qu’on lui demande (cela arrive couramment). Nous avons passĂ© 35 mn interminables dans un bus bondĂ©, nĂ©anmoins cela nous a permis de visiter d’autres quartiers de Tokyo.

Lundi 13 avril 2015

RĂ©veillĂ©s pas une pluie torrentielle, dĂ©moralisante car… partie pour durer !

Que faire Ă  part les magasins ? Grande amatrice de thĂ©, je suis partie acheter un des meilleurs au Japon, le chiran-cha originaire de Kyushu. J’avais reçu l’adresse de la part d’une amie japonaises. Il s’agit d’une petite Ă©picerie nommĂ©e Kagoshima Yuraku-Kanproche Ă  cĂŽtĂ© de l’arrĂȘt de mĂ©tro Hibiya.
La forte pluie m’a obligĂ©e Ă  m’abriter sous un vieux passage remplis d’izakaya, situĂ© Ă  cĂŽtĂ© de la station Yurakucho.
photo : http://www.japan-guide.com/e/e3072.html
J’ai remarquĂ© un vieux mur en bois tapissĂ© de vieilles affiches. ThĂ©Ăątre ou cinĂ©ma ?
Le soir, j’ai retrouvĂ© mon premier ami Japonais dans un Izakaya dĂ©diĂ© aux spĂ©cialitĂ©s de Kyushu. J’ai rĂ©alisĂ© Ă  maintes reprises que tous mes amis Japonais retiennent mes envies et goĂ»ts afin de me faire plaisir le mieux possible. Il savait que je compte faire le tour de Kyushu l’annĂ©e prochaine, alors il m’a invitĂ© exprĂšs dans ce lieu afin que je dĂ©couvre d’avance la cuisine de cette rĂ©gion : mizutaki- nabemono (fondue chauffĂ© par un rĂ©chaud sur la table) de poulet et de lĂ©gumes servi avec du ponzu (sauce soja + vinaigre + jus d’agrumes + algues + bonite sĂ©chĂ©e), hakata ramen (des nouilles servies dans un bouillon d’os de porc tonkotsu), et j’en passe.

Mardi 14 avril 2015

La pluie toujours lĂ  ! MalgrĂ© tout, je suis sortie rejoindre une amie Ă  11h30 devant la banque Mizuho sur la rĂ©putĂ©e avenue Omotesando, un lieu habituel de rendez-vous comme la statue du chien Hachiko Ă  la station Shibuya. J’étais entourĂ©e d’une trentaine de personnes qui attendaient
 quelqu’un.

Mon amie m’avait invitĂ©e dans un restaurant traditionnel japonais, Marukaku, situĂ© Ă  l’étage d’un immeuble rempli d’autres restaurants et boutiques de luxe. Le repas a Ă©tĂ© simple et dĂ©licieux, un menu composĂ© de miso soupe, riz et poisson entier grillĂ© accompagnĂ© d’un thĂ© froid hojicha Ă  volontĂ©. Marukaku : 5-10-1 Omotesando GYRE 4F Jingumae Shibuya-ku Tokyo 150-0001
Pour manger un dessert, elle m’a proposĂ© de me faire dĂ©couvrir un petit cafĂ©, Omotesando Koffee, perdu dans des ruelles au dessus de l’avenue Omotesando. Un lieu magique ! A cause de la pluie, impossible de savourer notre gĂąteau et cafĂ© assises sous l’érable et le cerisier encore en fleurs. Omotesando Koffee : 4-15-3 Jingu-mae, Shibuya-ku, Tokyo 150-0001 Japan
L’entrĂ©e du cafĂ© par le jardin

 

AprĂšs nous nous sommes dirigĂ©es vers les musĂ©es en passant au dessus du premier cimetiĂšre public au Japon, Aoyama, qui se trouve Ă  l’origine sur une terre de la famille du mĂȘme nom qui faisait partie du clan Gujƍ dans la province de Mino (aujourd’hui dans la ville de Gifu). Connu pour ses allĂ©es de cerisiers, il a une superficie de 260 000 m2 !
Tout le gotha japonais est enterrĂ© dans ce « parc » gĂ©ant qui s’abandonne avec romantisme Ă  sa luxuriance d’arbres et d’azalĂ©es. Sous les tunnels de verdure se faufilent des sentes en mĂ©andres et une noble allĂ©e pavĂ©e de bois. Promenade sereine, divertissante et obligĂ©e. Extrait du guide vert Michelin

ArrivĂ©es aux musĂ©es, ils Ă©taient tous fermĂ©s le mardi. J’ai voulu visiter :
Suntory Museum of Art dĂ©diĂ© aux objets d’art traditionnel : cĂ©ramiques de Nara, laques de Kamakura, paravent de l’école Kano, cĂ©rĂ©monie du thé 
et
21_21 Design Sight, le premier musĂ©e japonais exclusivement consacrĂ© Ă  la mode et au design. SignĂ© Tadao Ando : murs de bĂ©ton, verriĂšres, toit en acier brossĂ©, le tout posĂ© sur un tapis de verdure. Directeurs artistiques : Issey Miyake pour la mode, Taku Satoh pour l’art graphique et Naoto Fukasawa pour la crĂ©ation d’objets.

Nous avons dĂ» nous contenter du musĂ©e Fuji camera qui prĂ©sentait une belle expo de paysages de plusieurs rĂ©gions : Tochigi, Chiba, Gifu, Shizuoka, Ishikawa, Goma, Nagasaki, Okinawa et mĂȘme Fukushima.

Le soir, nous avons dĂźnĂ© avec un ami libraire dans un izakaya mĂ©connu par les touristes… Un petit conseil : n’acceptez jamais des rdv Ă  la station de Shinjuku mĂȘme si on vous donne un lieu prĂ©cis car pour sortir c’est un vrai labyrinthe et casse tĂȘte tant la station est gigantesque, c’est un vrai quartier souterrain. ArrivĂ©s avec 15 mn de retard synonyme de mal politesse.
Shinjuku et Shibuya, la nuit, sous la pluie :
Mercredi 15 avril 2015
QuittĂ© Tokyo pour aller au Nord de Honshu, juste avant Hokkaido, sur la pĂ©ninsule de Shimokita qui fait partie de la prĂ©fecture d’Aomori.
Nous avons voulu visiter le Mont Osore, le lac Usorisan et le temple Bodai-ji. Une de mes amies Japonaise m’avait dit que jamais elle n’ira sur ces lieux tellement elle a peur !
Mais peur de quoi ?
Photo lac Usorisan : http://www.japan-guide.com/

Eh bien, Mont Osore dont le nom signifie le « Mont de la peur » est le lieu mythique de l’entrĂ©e des Enfers et le petit ruisseau du lac Usorisan surnommĂ© Sanzu-no-kawa marque la frontiĂšre (Ă©quivalent du dieu grec Styx qui personnifie un fleuve de l’enfer).

En outre, le temple Bodaiji organise des cérémonies pour les ùmes des défunts dont le festival annuel Itako Taisai qui a lieu le 20 juillet durant cinq jours. Itako, sont des médiums aveugles qui, pendant un rituel nommé kuchiyose, communiquent avec les morts.

L’essentiel, plus profondĂ©ment, est cette terre souriante et tĂ©nĂ©breuse tour Ă  tour, oĂč la nature et le surnaturel se pĂ©nĂštrent et s’Ă©changent. » Maurice Pinguet extrait du ‘Le texte Japon’

Fort malheureusement, une fois arrivĂ©s Ă  Shimokita, on nous a dit que le site est fermĂ© et le temple aussi car ce n’est pas encore la pĂ©riode
 touristique. On nous a conseillĂ© de pendre le bus qui partait dans 10 mn pour aller de l’autre cĂŽtĂ© de la pĂ©ninsule.
Nous y sommes montĂ©s, les mines tristes mais rĂ©signĂ©s Ă  faire un trajet de 2h, sous une pluie torrentielle et incessante, pour arriver
 Dieu sait oĂč !
La route longeait la mer. Des paysages sublimes ! On maudissait tant la pluie qui nous empĂȘchait de prendre des photos nĂ©anmoins par la vitre.
Pluie d’averse
Sans un bruit sur la mousse
Me reviennent les choses du passé
Yosa Buson

 

Nous sommes descendus Ă  Oma. Le chauffeur de bus nous a parlĂ© d’un ryokan avec onsen isolĂ© dans une petite forĂȘt mais Ă  30 mn de marche de la mer. J’ai profitĂ© de l’onsen et du repas gastronomique puis fait une balade sous le ciel gris.

« Le Japonais prend à table un plaisir à la fois esthétique et gastronomique. »
Masaharu Anesaki ‘L’Art, la Vie et la Nature au Japon’
Le soir, l’homme qui nous a prĂ©parĂ© les futons pour dormir, il nous a demandĂ© oĂč on allait le lendemain. On lui a dit qu’on voulait aller Ă  Sai un petit village et de lĂ  prendre le bus ou le bateau pour visiter la cĂŽtĂ© escarpĂ©e Hotokegaura, des Ă©tranges falaises façonnĂ©es par le vent. Il nous a dit qu’il sera impossible de les visiter car aucun moyen de transport Ă  part le taxi vu que ce n’est pas la pĂ©riode touristique, phrase qu’on connaissait dĂ©jĂ  par coeur
 Que faire ? D’Oma pour aller sur l’autre pĂ©ninsule nommĂ© Tsugaru on avait le choix entre prendre le bus pour Sai puis le bateau pour Wakinosawa, de lĂ  un autre bateau pour Kawta, cela aurait pris beaucoup de temps et nous aurait coĂ»tĂ© trĂšs cher. Du coup il nous a proposĂ© de prendre le bateau pou Hakodate situĂ© sur l’üle de Hokkaido puis prendre la ligne de train JR pour aller de l’autre cĂŽtĂ© de la pĂ©ninsule.

Jeudi, 16 avril 2015

Réveillés à 5h30. Petit déjeuné annulé et remboursé afin de pouvoir prendre le bateau à 7h pour Hakodate. Vues du bateau :

Intérieur du bateau

A la gare de Hakodate, on trouve des pĂątisserie du fameux Mori Yoshida qui a ouvert sa boutique Ă  Paris en 2013.

De Hakodate pris le train pour Kanita puis Minmaya et enfin le bus pour Tippa
Mise en garde pour les claustrophobes : dans le train, on vous prévient lorsque vous entrez dans le tunnel sous la mer. Fiers de leurs prouesses techniques, chaque passager a les détails sous ses yeux collés sur le siÚge avant.

J’ai demandĂ© au chauffeur oĂč pourrions-nous dormir. ArrivĂ©s Ă  Tippa, il nous a montrĂ© un minshuku et nous a parlĂ© d’un ryokan et d’un hĂŽtel que surplombait la cĂŽte.

Nous Ă©tions trĂšs attirĂ©s par le mishuku collĂ© Ă  une corniche sur le petit port. Je m’y suis dirigĂ©e pour demander les prix. A l’entrĂ©e, il y avait 2 gros matous qui m’ont accueillie
 avec leur odeur d’urine ! J’allais faire demi-tour mais comme on m’avait remarquĂ© je suis rentrĂ©e. Deux femmes dont une ĂągĂ©e Ă©taient assises sur des tatamis. La plus vieille en me voyant a dit Ă  l’autre sur un ton dĂ©sagrĂ©able entre les dents que j’étais une gaijin. J’ai compris que je n’étais pas la bienvenue, chose extrĂȘmement rare au Japon. Une troisiĂšme femme est apparue et m’a dit avec une voix tonitruante qu’il y a un hĂŽtel sur la colline.

Me revient du coup une autre anecdote. Dans une petite gare de village, nous attendions le train. Dans la salle d’attente il y avait assis un jeune qui mangeait. Entre temps, un autre Monsieur rentre, je le vois se pencher pour ramasser un papier parterre et nous jette un regard de reproche. Il Ă©tait certain que c’est nous les Ă©trangers qui avons laissĂ© tombĂ© nos ordures sans les ramasser… alors que c’Ă©tait le jeune japonais. J’aurais dĂ» faire la rapporteuse, tellement j’ai Ă©tĂ© vexĂ©e !

J’apprĂ©cie tant la propretĂ© des japonais mĂȘme si limite « obsessionnelle ». Les villes, les moyens de transports brillent et jamais personne en vandalise quoi que ce soit. Belle leçon de civisme !

Petit temple shinto oĂč les pĂȘcheurs prient avant de prendre la mer
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Couché de soleil sur le petit port

AprĂšs le refus du minshuku de nous loger, nous sommes partis vers l’hĂŽtel situĂ© au somet de la colline via des escaliers interminables et presque insurmontables avec nos bagages.

Plaque d’Ă©gout

ArrivĂ©s Ă  l’hĂŽtel, on a reçu « le coup du bambou » : une nuit coĂ»tait environ 250 € avec repas et onsen. Etant extĂ©nuĂ©s et dĂ©couragĂ©s par la pluie mais hypnotisĂ©s par la sensationnelle vue sur la mer depuis le salon, nous y sommes restĂ©s une nuit. Le tout restera gravĂ© dans la mĂ©moire : la nourriture gastronomique, la chambre traditionnelle japonaise avec vue sur la mer, l’onsen


Le petit déjeuner

L’ImpĂ©ratrice et l’Empereur du Japon ont fait « une halte » dans cet hĂŽtel pour boire le thĂ©. AussitĂŽt partis, la direction de l’hĂŽtel a mis en vitrine les fauteuils et la table qu’ils ont utilisĂ©s car devenus « sacrĂ©s ».

Tokyo – Ăźle de Sado – Kamikochi – Nikko – Ăźle d’Oshima – Hayama

Avant ce 4Ăšme voyage, j’ai publiĂ© sur facebook mon Ă©tat d’esprit. Je m’étais sentie bouillonnante, effervescente, Ă©mue, enthousiaste, exaltĂ©e, fĂ©brile, surexcitĂ©e…

Aussi, j’ai fait part à tous de ma pathologie en citant Jean-François Sabouret (chercheur CNRS / Japon) :

« Parmi toutes les contrĂ©es de l’Est de l’Asie, le Japon, oĂč j’ai longtemps vĂ©cu, est dĂ©sormais ancrĂ© en moi. Quand je n’y suis pas, ce pays me manque, une pathologie, dont bien sĂ»r, je ne veux pas guĂ©rir.
J’ai besoin du Japon. D’abord parce que la civilisation japonaise m’intĂ©resse en tant que telle : son passĂ©, son peuple, sa culture, sa langue, son regard extĂ©rieur et son sens du dĂ©fi. Ensuite parce que, ayant amassĂ© sur mes routes d’Asie des trĂ©sors d’images et de voix, de rencontres et d’Ă©changes, ma vision du monde, et surtout du monde français, en a Ă©tĂ© modifiĂ©e ». extrait livre Besoin de Japon

Un de mes amis Japonais m’a dit : « Adina san, ne vient pas au Japon en Ă©tĂ©, tu vas mourir
 ». J’aurai dĂ» l’écouter car j’ai failli « mourir » plusieurs fois. Une chaleur humide qui colle vos vĂȘtements Ă  la peau et l’air si lourd au point de vous Ă©touffer. De plus, la nuit tombe brutalement vers 18h30.

C’est la mĂ©tĂ©o (pluie, brouillard, chaleur…) qui a modifiĂ© le circuit de ce voyage minutieusement prĂ©parĂ© d’avance. J’ai dĂ» rayer sur ma carte les lacs de Fuji san et la pĂ©ninsule d’Izu.

Je me suis restreinte Ă  :
Tokyo – Ăźle de Sado – Kamikochi (les Alpes Japonaises) – Nikko – Ăźle d’Oshima – Hayama (pĂ©ninsule de Miura)

 

TOKYO _ 28.08>04.09.2014

J’en ai tant rĂȘvĂ© de Tokyo et Ă  la fois ma premiĂšre crainte Ă©tait : vais-je l’aimer ?

Toute ville est un roman. Philippe Forest

Sortie de l’avion j’ai dĂ©couvert un ciel gris, pluvieux qui me rappelait Bruxelles. Au secours !
Dans le train, qui m’a emmenĂ©e de l’aĂ©roport de Narita Ă  Tokyo, le robot rĂ©pĂ©tait rĂ©guliĂšrement son nom. Sa voix fĂ©minine rĂ©sonne encore dans ma tĂȘte comme une musique : Tokyo, Tokyo mamonaku, Tokyo tsugi wa


ArrivĂ©e Ă  la gare d’Ueno, je me suis vue engloutie par la foule pressĂ©e qui se dĂ©plaçait Ă  grand pas dans tous les azimuts. Un chaos organisĂ© par des rĂšgles : la discipline et la politesse. Ce qui m’a toujours impressionnĂ© au Japon sont justement les transports en commun qui brassent des millions de gens tout en douceur. Tous fonctionnent de maniĂšre fluide et efficace. Ce dernier mot me rappelle un vieux couple de Français qui dĂ©barquait ce matin pour la premiĂšre fois au Japon et qui Ă©bahi par l’organisation et la vitesse Ă  laquelle on passait aux postes de contrĂŽle l’homme a dit : « Nous allons en prendre des leçons d’efficacitĂ© dans ce pays ! ». J’ai aussitĂŽt ris au Ă©clats !

Tout est sĂ©curisĂ© et propre. Comme l’indique Eriko Nakamura dans son livre Naaande ! la propretĂ© et le respect des lieux publics sont dus Ă  l’éducation reçue dĂšs le plus jeune Ăąge. Dans les Ă©coles les femmes de mĂ©nages n’existent pas, ce sont les Ă©lĂšves qui nettoient le tout afin de les responsabiliser, chaque classe Ă  tour de rĂŽle
et toilettes inclus !

D’Ueno je devais prendre le mĂ©tro pour le quartier Asakusa. Me revoilĂ  confrontĂ©e Ă  une profusion d’informations : sons, panneaux, signalĂ©tiques
 et tout cela en japonais. Au chaos s’est rajoutĂ© la complexitĂ©. Fort heureusement, je n’étais plus une dĂ©butante ! D’ailleurs, dĂšs le deuxiĂšme voyage au Japon, je me suis sentie comme un poisson dans l’eau. Et Ă  chaque fois que j’atterris dans ce pays, j’ai l’impression d’y avoir toujours vĂ©cu et instantanĂ©ment toutes les tensions intĂ©rieures disparaissent… comme nul part ailleurs !

Quartier Asakusa _ 28.08 > 31.08.2014

Vue de ma chambre

Asakusa est un des rares quartiers traditionnels restĂ© en petite partie intact : devantures en bois, ruelles pavĂ©es
 J’y ai sĂ©journĂ© 3 jours.

 

Ici, j’ai visitĂ© le sanctuaire shintoĂŻste Asakusa-jinja, un des seuls sorti indemne des guerres, feux et sĂ©ismes. Construit en 1649, il rend hommage Ă  deux pĂȘcheurs qui auraient trouvĂ© la statue de la dĂ©esse Kannon dans la riviĂšre Sumida.

VisitĂ© aussi le temple bouddhique Senso-ji oĂč trĂŽne cette dĂ©esse de la misĂ©ricorde. Pour y arriver, on passe d’abord sous la « porte du Tonnerre » Kaminarimon connue pour son Ă©norme lanterne rouge encadrĂ©e par deux divinitĂ©s Raijin, la Foudre Ă  gauche et Fujin, le Vent Ă  droite.

 

De cette porte et jusqu’au temple, on marche dans la Nakamise-dori bordĂ©e de boutiques traditionnelles. J’ai achetĂ© juste des sembei, chips japonais Ă  base de riz, tout frais, un dĂ©lice !
J’ai adorĂ© cette partie du quartier car ici on remonte le temps.

CĂŽtĂ© Asakusa contemporaine, j’ai Ă©tĂ© curieuse de dĂ©couvrir le cĂ©lĂšbre bĂątiment de Philippe Starck bĂąti en 1989 : Asahi Super Dry Hall (un monolithe de granit noir poli avec une flamme dorĂ©e sur son toit qui se voudrait ĂȘtre un verre de biĂšre avec sa mousse
) Sans commentaires !

A quelques pas se trouve la tour de Tokyo Sky Tree (634 m) oĂč j’ai Ă©tĂ© impatiente de grimper pour contempler toute la ville : 2 000 Km2 contenant 12 millions d’habitants. Fuji san a refusĂ© de se montrer, prĂ©fĂ©rant restĂ© cachĂ© derriĂšre un Ă©pais voile de brouillard.

« Cette tour s’inspire des formes traditionnelles avec un profil qui n’est pas sans rappeler la cambrure des sabres japonais ou les colonnes des temples et sanctuaires. » Revue Niponica n°4/2011.

Elle a rĂ©sistĂ© au sĂ©isme du 18 mars 2011 car son systĂšme de contrĂŽle des vibrations est semblable Ă  celui utilisĂ© dans les pagodes Ă  5 Ă©tages. Le secret : le gros pilier central unique nommĂ© shinbashira dont le rĂŽle est tenu ici par la cage d’escalier en bĂ©ton armĂ©.

Tokyo, ville interminable. Nicolas Bouvier
Insolite !
VoilĂ  comment embellir les paravents qui entourent un chantier !
Coller des beaux papiers peints !
On vous rappelle Ă  tous les pas : interdit de fumer dans la rue !
Au pire, ayez toujours un cendrier de poche sur vous.

Redescendue sur terre, j’ai longtemps marchĂ© vers Edo-Tokyo Museum accompagnĂ©e par un aimable jeune garçon car je m’Ă©tais Ă©garĂ©e en route. Il m’a guidĂ© via des petites ruelles coquettes et calmes. Le musĂ©e se trouve dans un bĂątiment futuriste inspirĂ© par les greniers de riz et raconte l’histoire de la ville grĂące Ă  des objets archĂ©ologiques, estampes, maquettes, plans, mannequins


En marchant, j’ai pensĂ© Ă  l’écrivain MichaĂ«l Ferrier pour qui le meilleur moyen de s’y retrouver Ă  Tokyo est de s’y perdre : « au moment oĂč l’on se perd, plus de carte plus de gps qui tiennent, Ă  ce moment prĂ©cis un Ă©norme, immense plaisir vous envahit, une espĂšce de libertĂ© retrouvĂ©e et vous vous dites : lĂ  vraiment, je suis Ă  Tokyo. »

Il a raison, c’est en s’égarant qu’on dĂ©couvre des trĂ©sors, la face cachĂ©e de la ville. A Tokyo, seulement les grades avenues portent des noms. Ses ruelles, avec des bĂątiments qui comportent uniquement des numĂ©ros en dĂ©sordre sont
 dĂ©routantes !

« Cette ville ne peut ĂȘtre connue que par une activitĂ© de type ethnographique : il faut s’y orienter, non par le livre, l’adresse, mais par la marche, la vue, l’habitude, l’expĂ©rience ; toute dĂ©couverte y est intense et fragile, elle ne pourra ĂȘtre retrouvĂ©e que par le souvenir de la trace qu’elle a laissĂ© en nous : visiter un lieu pour la premiĂšre fois, c’est de la sorte commencer Ă  l’écrire : l’adresse n’étant pas Ă©crite, il faut bien qu’elle fonde elle-mĂȘme sa propre Ă©criture. » Barthes – L’empire des signes

« La ville : une infinitude limitĂ©e. Un labyrinthe oĂč vous n’ĂȘtes jamais perdu. Votre plan individuel, oĂč tous les blocs d’immeubles portent le mĂȘme numĂ©ro. MĂȘme si vous vous fourvoyez, vous ne pouvez pas faire fausse route. » Abe Koko – Le plan dĂ©chiquetĂ©

AprĂšs le musĂ©e, j’ai eu l’intention de passer au stade national des sumo Kokugikan pour les voir s’entraĂźner mais j’avais perdu mes forces.

Selon le Kokiji (recueil de mythes datant de 712 concernant l’origine des Ăźles formant le Japon et des dieux) c’est un combat de sumo ĂȘtre deux divinitĂ©s qui dĂ©cida de l’occupation de l’archipel par les Japonais. La lignĂ©e impĂ©riale aurait Ă©tĂ© crĂ©Ă©e par le vainqueur de ce combat nommĂ© Takemikazuchi. C’est Ă  partir du VIe que le sumo a Ă©tĂ© liĂ© au culte shintoĂŻste et ses rituels purificateurs comme jeter le sel en l’air et boire une gorgĂ©e d’eau avant le combat.

« Ces lutteurs forment une caste ; ils vivent Ă  part, portent les cheveux longs et mangent une nourriture rituelle. Le combat ne dure qu’un Ă©clair : le temps de laisser choir l’autre masse. Pas de crise, pas de drame, pas d’épuisement, en un mot pas de sport : le signe de la pesĂ©e, non l’érĂ©thisme du conflit. » Barthes – L’empire des signes

Le dernier jour, j’ai pris le train sans conducteur Yurikamome line. J’ai Ă©tĂ© Ă©merveillĂ©e par ce voyage entre les buildings jusqu’à l’üle d’Odaiba.
L’idĂ©al aurait Ă©tĂ© de faire ce trajet la nuit pour admirer le Tokyo enluminĂ© et polychrome.

D’Odaiba, Ăźle artificielle reliĂ©e au centre ville par le cĂ©lĂšbre pont Rainbow Bridge, j’ai pris le bateau pour retourner Ă  Asakusa. Il a flottĂ© sous tous les ponts de Sumida. ll est passĂ© devant le fameux marchĂ© de poisson Tsukiji oĂč se fournissent tous les restaurants. Puis, j’ai eu la chance de voir quelques canaux rescapĂ©s grĂące auxquels Tokyo ressemblait avant 1868 Ă  Venise. Depuis, la plupart des canaux ont Ă©tĂ© couverts par du bĂ©ton et des pierres. Des ruelles ondulantes suivent les traces des anciennes riviĂšres. En outre, on retrouve d’autres genres de ruelles labyrinthiques qui ont Ă©tĂ© construites stratĂ©giquement afin d’éviter les attaques frontaux du chĂąteau oĂč vivait le Shogun.

Buren ?
« Venise »

J’ai eu quelques aventures Ă  Asakusa. Un soir je suis repassĂ©e devant un ancien cafĂ© de quartier, c’est-Ă -dire un troquet avec 3 chaises devant un mini-bar donnant sur la rue, tenu par un vieux Monsieur. Les gens, une dizaine, nous ont invitĂ©, moi et mon mari, Ă  boire avec eux. Avec mon japonais prĂ©caire j’ai rĂ©ussi Ă  communiquer et j’ai compris qu’ils Ă©taient tous des SDF. ExtrĂȘmement pauvres, mais alors, quelle gĂ©nĂ©rositĂ© !! Ils nous ont payĂ© au moins 5 biĂšres et un whisky. Impossible de les arrĂȘter. Nous sommes tombĂ©s dans un guet-apens ! De plus, ils n’ont pas acceptĂ© qu’on les rĂ©invite.

On parlait de tout et de rien, on rigolait jusqu’à ce que l’un des SDF m’a racontĂ© que des yakuzas viennent rĂ©guliĂšrement les tabasser tard dans la nuit sans raisons quelconques !

Jamais je n’oublierai leur accueil et gĂ©nĂ©rositĂ© ni les puces que j’ai eu en cadeau et dont je me suis difficilement dĂ©barrassĂ©e aprĂšs 3 jours grĂące Ă  un produit miracle dont la fumĂ©e qu’il a dĂ©gagĂ© dans l’appartement a tuĂ© toutes insectes et parasites, mĂȘme les acariens ! En souvenir, j’ai gardĂ© des semaines quelques stigmates sur mes jambes.

AprĂšs 2h en leur compagnie, nous avons cherchĂ© un izakaya pour manger. Nous sommes rentrĂ©s dans un snack oĂč il y avait que des vieilles personnes mais la patronne nous a refusĂ© l’entrĂ©e.

Ce soir lĂ , j’ai basculĂ© dans l’autre Tokyo, l’hors-champs, celui des pauvres et des brigands et pourtant pas une seule fois je me suis sentie en insĂ©curitĂ© ! Comment expliquer cela ?!


Quartier Shimbashi/Ginza _ 31.08.2014

J’ai dormi dans le quartier de Shimbashi/Ginza au Nakagin Capsules Hotel. J’ai louĂ© une capsule Ă  son propriĂ©taire, Mr Abe Masato, via airbnb. Cet immeuble, Ă  usage rĂ©sidentiel et de bureaux, a Ă©tĂ© dessinĂ© par l’architecte Kisho Kurokawa. Construit dĂ©but 1970, il est prĂ©destinĂ© Ă  ĂȘtre dĂ©moli car les rĂ©parations et les coĂ»ts d’entretiens sont trop Ă©levĂ©s pour pouvoir le sauver. Bien dommage alors qu’ils comptait l’inscrire au patrimoine de l’Unesco.

Porte d’entrĂ©e
Le hall d’accueil

C’est une expĂ©rience inoubliable car l’intĂ©rieur fait penser Ă  un vaisseau spatial. Chaque capsule est amĂ©nagĂ©e, meublĂ©e et Ă©quipĂ©e de systĂšmes audio et tĂ©lĂ©phoniques.

Par contre, Ă  ce jour, il n’y a plus d’eau chaude dans la bĂątiment, on se lave dans une cabine de douche extĂ©rieure et chacun doit s’inscrire la veille sur le planning. DrĂŽle d’aventure !

photo © Michel Mazzoni

Les concierges ont été adorables puis un propriétaire est venu discuter et nous a offert en partant les gùteaux aux azuki : dokidori. Aurait-il deviné que se sont mes gùteaux favoris indispensables au petit déjeuner ?

Ginza la nuit

« TatouĂ©e Ă  toute heure du jour et de la nuit de discours et de sons, la ville offre un spectacle hypnotique et changeant, qui dĂ©route ou qui dĂ©goĂ»te, Ă©puise ou Ă©merveille, mais ne laisse personne indiffĂ©rent » MichaĂ«l Ferrier Tokyo petits portraits de l’aube

Quartier Ebisu _ 01.09 > 3.08.2014

Ici, aussi j’ai louĂ© un appartement pour 3 nuits via airbnb, Ă  5 mn Ă  pied de la station de mĂ©tro. Emplacement idĂ©al de tous les points de vus. Un quartier chic, Ă  la fois feutrĂ© et agitĂ©, avec des petites boutiques tenues par des jeunes branchĂ©s sans oublier les nombreux bars et d’izakayas. Il y a eu de quoi faire ! Un soir j’ai mangĂ© des ramen que mes papilles ne risquent pas d’oublier


« On ne sait plus oĂč donner de la tĂȘte, on se tord le cou pour mieux se remplir les yeux de se spectacle. Je comprends pourquoi il y a tant de cabinets de massage ici, c’est Tokyo qui veut ça, ce torticolis Ă©bloui de ruelles et de gens. » MichaĂ«l Ferrier – Tokyo petits portraits de l’aube

Le rue de mon appartement

Ebisu est une marque de biĂšre, la meilleure Ă  mon goĂ»t, propriĂ©taire d’une grande partie des immeubles. Les fabricants ont choisi le nom du Dieu confucĂ©en du logis et des riziĂšres. Sur l’étiquette, vous remarquerez un moine pĂȘcheur ventripotent et souriant qui tient une dorade rouge Ă  la main en signe de prospĂ©ritĂ©.

 

Proche de Shibuya, j’ai profite de passer le soir sur le lieu de rendez-vous des jeunes : la statue de Hachi-ko Ă©levĂ©e en hommage au chien fidĂšle qui aprĂšs la mort de son maĂźtre a continuĂ© Ă  l’attendre tous les soirs Ă  la sortie de cette station de mĂ©tro. La statue, je l’ai juste devinĂ©e car il faisait nuit, il pleuvait et les touristes ne finissaient pas de se prendre en photo devant elle
 Aussi, j’ai jetĂ© un coup d’oeil sur l’intersection emblĂ©matique de Tokyo, Shibuya Crossing, et sa foule compacte munie de parapluies. J’ai filmĂ© l’ambiance joyeuse, bruyante et ses buildings avec les publicitĂ©s multicolores gĂ©antes.

Intérieur gare par Tadao Ando
Photo maquette

Visité aussi dans le quartier Shirokanedai, un autre bùtiment de Philippe Starck construit avant Asahi : Nani Nani

photo © Michel Mazzoni

J’ai essayĂ© au maximum d’éviter les clichĂ©s mais difficile. Pour visiter le Nezu Museum j’ai dĂ» passer via l’avenue Omote-Sando, « les Champs-ElysĂ©es de Tokyo »  en moins larges. Il est vrai qu’elle compte beaucoup de boutiques de luxes dont les bĂątiments ont Ă©tĂ© crĂ©Ă©s par des cĂ©lĂšbres architectes. J’ai vu entre autres la fameuse boutique Prada avec sa façade de verres-loupes trapĂ©zoĂŻdaux dessinĂ©e par Herzog et de Meuron.

Mon intĂ©rĂȘt s’est portĂ© surtout sur le musĂ©e ouvert par Kaichiro Nezu, fondateur de la compagnie de fer Tobu et riche collectionneur d’art oriental : cĂ©ramique, calligraphie
 Ce qui m’a marquĂ© irrĂ©vocablement sont les 7 pavillons de thĂ© placĂ©s dans un luxuriant jardin japonais. Un pur bonheur ! Il m’a paru insurmontable de m’extraire de ce paradis terrestre. J’en rĂȘve encore !

J’ai visitĂ© aussi l’ancien stade national construit par Kenzo Tange pour les jeux olympiques de 1964. « Le toit de tĂŽle d’acier mobilisant Ă©galement de techniques de construction navale possĂšde une beautĂ© qui n’est pas sans rappeler celle du hall principal du Toshodai-ji (temple bouddhiste de la secte Ritsu situĂ© dans la ville de Nara). Les constructions traditionnelles japonaises en bois on toujours mis l’accent sur l’aspect du toit, et le toit du Stade olympique reflĂšte l’esthĂ©tique japonaise traditionnelle avec des courbes prononcĂ©es. » revue Niponica n°4 2011

En face de celui-ci, il y a le parc Yoyogi dans lequel j’ai remarquĂ© des affiches prĂ©ventives contre des moustiques qui transmettent des maladies. J’ai vu des infos Ă  la tĂ©lĂ© le soir mais incomprĂ©hensibles vu mon niveau en japonais. En rentrant, j’ai lu un article de LibĂ©ration et appris que certaines risquent de transmettre la dengue, une infection virale nommĂ©e aussi «grippe tropicale».

Un autre parc dans lequel j’ai flĂąnĂ© a Ă©tĂ© Ueno. Je me suis rendue au minuscule temple shintoĂŻste Gojo-Tenjinja gardĂ© par le kami Inari, le renard.

Puis, j’ai tournĂ© autour du National Museum of Western Art juste pour admirer ce bĂątiment construit par Le Corbusier en 1959.

 

photo © Michel Mazzoni

Puis, le jour oĂč j’ai revu un de mes amis, j’ai tenu Ă  me rendre dans le parc voisin au Palais ImpĂ©rial. Malheureusement, un concert Ă  hauts dĂ©cibels a gĂąchĂ© notre sĂ©jour : conversations rendues impossibles. Sur la route, j’ai voulu voir Imperial Hotel. Mais je ne savais pas que le bĂątiment de Franck Lloyd Wright bĂąti en 1923 a Ă©tĂ© dĂ©moli en 1968. Sa structure a servi Ă  un nouvel hĂŽtel de luxe fait de bĂ©ton et marbre. Il reste intacte juste le dĂ©cor du bar. La façade et les bassins de l’ancien Ă©difice ont Ă©tĂ© transportĂ©s au musĂ©e d’architecture Meiji-Mura Ă  Inuyama proche de Nagoya.

Le mercredi, j’avais fait un saut au Shinjuku. La gare est un immense complexe souterrain de 11 Ă©tages comprenant quais de trains, boutiques, restaurants, jardins
 on y est vite emportĂ© par le « typhon » des gens.

Ce quartier ne dort jamais ! On y trouve de tout pour s’amuser surtout dans la partie nommĂ©e Kabukicho : bars Ă  hĂŽtesses, Ă  strip-tease, cinĂ©mas, pachinko, karaoke
 Moi, j’avais envie de voir l’incontournable Golden Gai, une partie du vieux Tokyo qui a survĂ©cu Ă  tout. Il se compose de six petites ruelles Ă©troites pour piĂ©tons oĂč s’alignent environ 200 bars et cafĂ©s. Deux jeunes Ă©lectriciens super sympas nous y ont conduit tout en rigolant : « ahh, vous avez envie de boire ! »

« Personne ne parle jamais du manque de sĂ©rieux des Japonais, de leur lĂ©gĂšretĂ©, de leur sentimentalitĂ©, de leur insouciance, de leur nonchalance, en un mot : de leur gentillesse et de la douceur de vivre qui rĂšgne dans une citĂ© comme Tokyo. » Philippe Forest – Sarinagara

 

En fin d’aprĂšs-midi la plupart Ă©taient fermĂ©s mais, Ă©tant de nature curieuse et courageuse, j’ai osĂ© entrer dans un bar ouvert avec les mots clĂ©s : gomen kudasai ! C’est Ă  dire, je m’excusais de rentrer. Pourquoi, alors que c’est un bar « public » ? Parce que dans ce quartier, certains acceptent que les habituĂ©s et d’autres refusent carrĂ©ment les Ă©trangers vu que la majoritĂ© sont infiniment petits et personne ne parle anglais !

 

Le monde est devenu infime dans ce bar de 5 places nommĂ© Spade (sis Shinjuku Kabukicho 1-1-5), tenu par Keiko san qui ressemblait ce jour-lĂ  Ă  Yoko Ono en raison de sa silhouette, son chapeau et ses petites lunettes. J’ai aussitĂŽt senti les ondes positives que ce lieu dĂ©gageait. En discutant durant au moins 2 h, elle m’a dit qu’elle Ă©tait chanteuse et m’a offert son CD. Je l’écoute souvent en pensant Ă  son hospitalitĂ© et Ă  celui de son client Hiroshi san. J’ai Ă©tĂ© gĂątĂ©e en alcool et nourriture ! C’était dur de les quitter autant moralement que
 physiquement.

Le kare de Keiko san

DĂšs qu’on se retrouve dans un bar avec les Japonais, en gĂ©nĂ©ral tous des bons vivants « francs, rieurs, joueurs,  » leurs armures tombent sous l’effet de la potion magique : l’alcool. Ils sont comme le soleil et la lune. Ils changent de rĂŽles en fonction de la lumiĂšre : jour/nuit. J’adore ça, entrer dans un bistro et attendre patiemment que l’alcool fasse l’effet : les langues se dĂ©lient et les gestes se libĂšrent
 la fĂȘte commence ! Des moments Ă©phĂ©mĂšres qui s’évanouissent mais survivent Ă  jamais dans la mĂ©moire (en japonais on utilise le terme hakanaĂŻ pour la notion d’évanescent).

Pour Michaël Ferrier, les Japonais sont comme le saké daiginjÎ fait avec le coeur du riz, « il faut savoir enlever les strates supérieures, les couches superficielles : alors, ils se révÚlent ».

AprĂšs le travail, les gens font le tour des bars et des izakayas le soir aprĂšs le travail jusqu’au dernier train de 24h-1h du matin, d’oĂč l’expression hashigo o suru qui veut dire faire l’échelle


Les Japonais divisent la nuit en plusieurs « soirées » successives :

« La premiÚre soirée est assez calme ichiji-kai : elle commence tÎt, vers 18h ou 19h. On mange dans un restaurant, on discute, on boit modérément.
La deuxiĂšme soirĂ©e (nijikai), de 21h Ă  23h environ: c’est le dĂ©but des choses sĂ©rieuses. D’abord on trouve un bar ou une nomi-ya (sorte de pub japonaise oĂč la principale occupation est de boire, tout en faisant semblant de manger). La discussion va bon train, on se demande quand la biĂšre va s’arrĂȘter de couler.
La troisiĂšme soirĂ©e commence (sanjo-kai) : les esprits sont dĂ©jĂ  bien Ă©chauffĂ©s. Ceux qui veulent attraper le dernier mĂ©tro ou le dernier train (aux environ des 0h30) fuient comme s’ils avaient le dĂ©mon Ă  leurs trousses, Ă  peine s’ils vous disent au revoir : un petit salut de la tĂȘte, et les voilĂ  Ă©vanouirent dans la grande ville – ces Japonais ont le gĂ©nie de filer Ă  l’anglaise.
Ceux qui font semblant d’hĂ©siter, vous pouvez dĂ©jĂ  les considĂ©rer comme perdus : cette heure lĂ  on ne tergiverse plus, s’ils hĂ©sitent c’est qu’ils ont dĂ©jĂ  dĂ©cidĂ© de ne pas rentrer tout de suite mais, par une charmante coquetterie de comptoir, ils se font juste un peu prier. Il faut alors trouver un autre bar ou bien un karaokĂ©. PrĂ©parez vos poumons : ici il est rare de passer une soirĂ©e sans chanter.
Enfin, vient le moment dĂ©cisif, l’heure oĂč le cercle se resserre, oĂč les limites sont franchies. C’est yoji-kai : la quatriĂšme soirĂ©e. Vos compagnons ivres, tombent comme des mouches. BientĂŽt il ne restera plus que vous et Tokyo, comme une affaire personnelle, un vieux compte Ă  rĂ©gler. Alors seulement, vous connaĂźtrez le pouvoir de cette ville, toute la puissance de ses envoĂ»tements. » MichaĂ«l Ferrier – Tokyo petits portraits de l’aube

Un peu d’histoire
Avant 1868, annĂ©e de la rĂ©ouverture du Japon au monde, Tokyo (la capitale de l’Est) s’appelait Edo (Porte de l’Estuaire). Elle a commencĂ© Ă  connaĂźtre son essor jusqu’au tremblement de terre de 1923 qui a fait environ 100 000 victimes et rĂ©duit la ville en cendres. A partir de lĂ , dĂ©bute l’urbanisme de la ville, tout devait ĂȘtre reconstruit. Le deuxiĂšme choc et grande blessure lui a Ă©tĂ© infligĂ©e par les bombardements amĂ©ricains en 1945. Puis, la troisiĂšme grande pĂ©riode de reconstruction s’est imposĂ©e lors des jeux olympiques de 1964. Depuis, Tokyo, continue son expansion
 limitĂ©e par les montagnes et la mer.

« Tu n’as qu’à lever la tĂȘte si tu trouves le temps long°, Tokyo est un superbe et mĂ©connu livre d’images. N’essaie pas d’imposer ton allure, tu n’y arrivera pas : chaque pays a son temps, sa pulsation, sa minutie. Il faut retrouver le rythme de la ville, il change selon les quartiers, les moments, les saisons, tu dois toi-mĂȘme prendre les marques sur cette gigantesque table des temps.(au feu piĂ©ton) MichaĂ«l Ferrier Tokyo petits portraits de l’aube

Tokyo est gigantesque mais paradoxalement dans chacun des quartiers on a l’impression de se trouver dans « un village » car beaucoup de quartiers gardent leurs indĂ©pendance et leurs esprits de village ! Ce qui rend cette ville un peu plus « humaine » selon mon ressenti, bien plus qu’Osaka que je n’ai pas su apprĂ©cier (il faudrait peut-ĂȘtre que j’y retourne un jour).

J’ai retenu l’histoire de l’écrivain Akira Mizubayashi qui racontait que dans son quartier, encore aujourd’hui, une personne fait le tour tous les soirs Ă  23h avec deux bouts de bois qu’elle frappe produisant un bruit sec. Ce son particulier « qui dialogue avec le passĂ© » rappelle au gens de faire attention au feu, penser Ă  tout Ă©teindre avant le coucher. Ses bĂątons sont Ă©galement utilisĂ©s par les moines dans les temples pour signaler les repas et les activitĂ©s.

Chaque quartier a des lieux de refuge : des parcs, tes temples
 des « zones de silence au milieu du son » (Nicolas Bouvier – Chroniques japonaises). Dans ces derniers, on y passe entre deux rendez-vous de travail ou pour se reposer, se promener paisiblement. Ici, le bruit du silence est spirituel : shiiiiin
 (onomatopĂ©e du silence en japonais).

« A Tokyo, les constructions, dĂ©tachĂ©es de leurs voisines, diversement orientĂ©es, mĂ©nageaient d’amusants contrastes de perspective. MĂȘme au coeur de la ville, elles proposaient aux passants des recoins plus tranquilles, des petits havres de paix

Surtout, je me suis aperçu qu’il suffisait de quitter les grandes artĂšres et de s’enfoncer dans des voies transversales pour que tout change. TrĂšs vite, on se perdait dans des dĂ©dales de ruelles oĂč des maisons basses, disposĂ©es sans ordre, reconstituent une atmosphĂšre provinciale. Le jardinait qui les flanquait pouvait ĂȘtre minuscule : le choix et l’arrangement des plantes n’en tĂ©moignaient pas moins pour le goĂ»t et l’ingĂ©niositĂ© des habitants. » Claude LĂ©vy-Strauss – Aux habitants de Tokyo

Ce silence est troublĂ© en Ă©tĂ©, dĂšs 18h, par le chant des cigales. Sons percutants !! Plus fort et plus variĂ©s que dans le Sud de ma France. D’aprĂšs l’artiste photographe Naoya Hatakeyama, il y a 4 types de cigales Ă  Tokyo : ablazemi, miminzemi, ninizemi et higurashi. Chacune chante diffĂ©remment mais
 aux mĂȘmes dĂ©cibels !

Cri-cri de grillons
cri-cri de grillons
tout le reste s’est tu
Shiki

Enfin, Tokyo a rĂ©ussi me rendre follement amoureuse d’elle au point d’en devenir addict. Il est certain que j’y retournerai plus d’une fois !

Pour vous la dĂ©finir, tant de mots se bousculent dans ma tĂȘte :
immense, paradoxale, attachante, hypnotique, ludique, électrique, mystérieuse, glamour

inondĂ©e de couleur, ciel gris anthracite, nuances d’ombres et de pĂ©nombres

diversitĂ©, fluiditĂ©, sĂ©curité 
bruyante avec ses sons particuliers : les voix faites pour rassurer, celles humaines dans les transports, les magasins et celles robotisĂ©es ; la musique des stations de mĂ©tro qui diffĂšre de l’une Ă  l’autre, les bruits des pas, les chants des cigales