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Je ne compte plus depuis combien d’annĂ©es je m’entends dire : « mon rĂŞve, c’est d’aller au Japon ».
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Le dĂ©clic a Ă©tĂ© la littĂ©rature japonaise. Des livres achevĂ©s la faim au ventre car souvent une part d’incomprĂ©hension subsistait après leur lecture au point de rester frustrĂ©e.
Puis, le cinéma, les films qui abordent le couple, en général présenté comme froid et dépourvu de tendresse (Ozu, Kurosawa Kyoshi, Suwa Nabuhiro…).
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Sans oublier sa mythologie car le Japon n’a pas Ă©tĂ© « créé » mais « procréé » ! Il est nĂ© de l’amour charnel entre frère et sĹ“ur : Izanagi (celui qui invite) et Izanami (celle qui invite). « La mer barattĂ©e s’Ă©paissit et un grumeau tombĂ© de leur lance forme le premier Ă®lot de la mer IntĂ©rieure. Le frère et la sĹ“ur s’y posent, ils examinent, elle se fait provocante, et ma foi… ils s’invitent. Dans une auguste union, ils joignent leurs augustes parties et engendrent 3 avortons, car il n’Ă©tait pas sĂ©ant que la femme fĂ®t ainsi les avances. » extrait Japon de Nicolas Bouvier.
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Par consĂ©quent, les Japonais ne connaitraient ni pĂŞchĂ©, ni châtiment, ni enfer !Â
Les plaisirs physiques, dont l’adultère, seraient bons et dignes d’ĂŞtre cultivĂ©s ainsi que les autres « émotions humaines » fondamentales dans leur culture et qui ont un sens très diffĂ©rent voir opposĂ© au nĂ´tre : le bain, le sommeil, la nourriture, l’ivresse.
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Mais malgrĂ© cela, le bonheur est une dĂ©tente Ă laquelle ils s’adonnent quand ils ont le temps. Les plaisirs ne doivent pas interfĂ©rer avec les choses sĂ©rieuses de la vie : travail, famille,… Tout Japonais nĂ© avec des obligations qui exigent d’Ă©normes sacrifices (on, gimu, giri…). C’est pourquoi on dit qu’ils ont une grande force d’âme, la vertu la plus admirĂ©e au Japon. L’autodiscipline, la raideur, la politesse et la rĂ©serve extrĂŞmes dans le monde de l’Ă©tiquette japonais sont remarquables.
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Je suis fortement attirĂ©e par cette culture Ă©trangère Ă la nĂ´tre, leurs comportements et pensĂ©es, traditions et rituels qui ordonnent la rĂ©alitĂ© avec cĂ©rĂ©monie « pour tenir sĂ»rement le chaos Ă l’Ă©cart » N.B. Et encore plus par le raffinement austère.Â
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Chez les Japonais, le sens de la beauté est partout, on le retrouve dans les idées de Miyabi (élégance raffinée), du Mono no Aware (sensibilité esthétique), du Wabi (calme apaisant) et du Sabi (élégante simplicité). Trois mots expriment le sentiment de la beauté depuis la nuit des temps : utsukushûte (petit, joli et fragile), kuwashi (fin, raffiné et détaillé), kiyoshi (beau à travers la pureté).
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La liste de ce qui m’intrigue est longue, preuve que tant de choses nous sĂ©parent gĂ©ographiquement, historiquement et philosophiquement. Certains points m’ont Ă©tĂ© Ă©clairĂ©s par le livre culte de Benedict Ruth « Le Chrysanthème et le Sabre », par les journaux de Nicolas Bouvier dont j’ai extrait quelques paragraphes et bien Ă©videmment par tant d’autres Ă©crivains.
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J’ai achetĂ© mes billets longtemps Ă l’avance. Depuis, je dĂ©couvre que lorsqu’on a vraiment un but, les jours ne se ressemblent pas. Il n’y a plus de quotidien, plus rien qu’une immense trajectoire tendue et la crainte qu’Ă tout moment un Ă©vĂ©nement pourrait s’interposer pour vous empĂŞcher d’atteindre ce but.
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Vais-je retrouver le Japon que je me suis « créé » Ă l’aide de mes lectures ? Pour m’Ă©viter quelconque dĂ©ception, je ferais mieux de tout oublier et rĂ©apprendre Ă sentir par moi-mĂŞme. Nicolas Bouvier Ă©crivait avec ironie :« On s’emballe, on mythifie le Japon, puis, la dĂ©ception venue, on « dĂ©mystifie » avec autant d’aigreur qu’on croit avoir Ă©tĂ© trompĂ©, avec l’amertume de la vacherie d’une femme insatisfaite par un amant compromettant. « MalgrĂ© ses deux grands sabres, il ne vaut pas cher au lit ».
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J’ai choisi d’arriver au Japon avec le printemps pour pouvoir admirer les cerisiers en fleurs sakura et voir les geishas danser Haru no Odori. Une fois sur place, je vivrai dans l’instant. Je passerai le temps Ă observer, Ă contempler le moindre dĂ©tail en profondeur, remplir mon journal avec mes cinq sens. Le temps Ă©tant comptĂ©, je dois organiser ce voyage avec minutie, alors que j’aurais prĂ©fĂ©rĂ© me laisser portĂ©e au grĂ© du vent… printanier.