Étiquette : 1ervoyage
KOYASAN
J’ai atterri à Kansaï à 9h du matin, un aéroport d’exception vu du ciel, bâti sur la mer par l’audacieux Renzo Piano. Ma valise a subi une fouille complète et minutieuse. Je représentais un cas complexe pour des insulaires : origine Roumaine, nationalité Française, résidente Belge.
Tout en traversant les couloirs du temple devancée par un moine, j’ai été conquise par l’architecture, le décor traditionnel (tatamis, paravents, portes coulissantes peintes, fenêtres en papier de riz), les jardins… Ce que j’ai toujours rêvé de voir !
Je suis arrivée à ma chambre émerveillée et abasourdie par tant de beauté. Une 1ère porte coulissante donnait sur une mini-entrée où je me devais de contempler la peinture et une statuette (okimono) qui se trouvaient sur la gauche. Ici, on abandonne ses babouches tout en plaçant leurs bouts dirigés vers la sortie et ce avant d’ouvrir la 2ème porte coulissante. Cette dernière était peinte en or et représentait des Koï (carpes sacrées, symboles d’amour et de virilité).
« Toute la maison, est fondée sur des multiples ou sous-multiples de l’unité fondamentale (le tatami) ; c’est sur elle que sont calculées la hauteur et la largeur des fusama (portes à glissière), la hauteur du plafond, le diamètre des colonnes, la largeur des vérandas, etc. Quatre siècles au moins avant que le Corbusier inventât son modulor, l’espace vital minimum, ces poètes des choses simples étaient, à l’autre extrémité du monde, parvenus aux mêmes conclusions… » F.M.
A peine installée, on m’a servi un délicieux thé vert accompagné d’une mini friandise à la pâte de haricots rouges azuki. Puis, on m’a apporté un pinceau à calligraphie pour recopier la portrait de Bouddha, discipline que l’on appelle shabutsu. Elle exige de la concentration et un travail sur la respiration pour y aboutir de la manière la plus parfaite possible. Faute d’être capable de recopier des sutras, ce véritable art étant réservé à ceux qui maîtrisent la calligraphie japonaise ou chinoise !
Malgré que mes journées aient été rythmées par la vie du temple, j’ai eule temps d’admirer, de m’étonner, de respirer un air chargé de parfums inconnus, de méditer…
Les moines lisaient en chœur les écritures sacrées en une envoutante mélopée de baryton rehaussée par le battement sourd et saccadé du tambour et du timbre clair d’une cloche, tous enveloppés par le parfum de l’encens qui brûle en continu.
18h30 on vous apporte le futon et le nécessaire : un oreiller remplit de haricots, 2 kimonos (1 d’hiver et 1 en coton léger yukata), serviettes et brosse à dent
Des nuées d’encens constants enveloppent ces lieux et leur parfum pénètre tous les sens. Dans la culture bouddhiste, elles traduisent l’éphémère et la fragilité de l’existence humaine tout comme les fleurs de cerisiers. A la fois, elles représentent les voies évanescentes qui élèvent l’homme vers la divinité. C’est pourquoi, l’encens est indissociable des rites funéraires. D’autre part, les bonzes Shingon enduisent leur bras et mains d’encens en poudre en signe de purification.
KYOTO_1
Dimanche 1er avril 2012
J’ai quitté Koysan et le temple Ekoin remplie de regrets malgré mon impatience à découvrir Kyoto, « le cœur » de la culture japonaise. Arrivée à la gare de Namba, où je devais prendre le métro pour Osaka puis le train pour Kyoto, j’ai été prise de panique ! Je me suis retrouvée dans un grandiose labyrinthe de plusieurs étages rempli d’une foule pressée. Les panneaux indicateurs étant uniquement en japonais, j’ai été contrainte de demander de l’aide et là j’ai découvert combien les Japonais sont serviables. Une fille m’a accompagnée d’Osaka jusqu’à mon hôtel qui soi-disant se trouvait sur son trajet !
La gare actuelle de Kyoto est gigantesque ! Elle a été reconstruite en 1997 par l’architecte Hiroshi Hara à l’occasion du 1200e anniversaire de la notification de la ville (anciennement Heian Kyo) comme capitale du Yamato (ancien nom du Japon) par l’empereur Kammu en 794. Elle est constituée de vitres transparentes et de structures d’acier surplombant toute la surface et comprend des hôtels, restaurants, cafés, théâtres, magasins, musées…
KYOTO_2
Lundi 2 avril 2012
Dans un des jardins, j’ai aperçu pour la première fois un prunier japonais. Il s’est démarqué par ses grandes fleurs fuchia semblables aux rosiers sauvages.
Concernant les jardins japonais, l’orientaliste Fosco Maraini a tout compris : « Le jardin en Extrême-Orient est en effet une œuvre d’art aussi belle qu’un tableau, une statue ou un poème. Nous considérons le jardin comme une simple décoration, au moyen de pièces d’eau et de fleurs, de l’habitation : villa, institut ou palais ; et la nature offensée d’être si peu sollicitée nous accorde peu ; le jardin sert de cadre à la vie mondaine de l’homme. Sage et docile, il garnit la maison, comme la salade, le bifteck. L’artiste oriental crée le jardin en musicien comme un chant, une symphonie dont les notes sont les herbes, les pierres, les eaux, les fleurs. Il vise très haut et dans ses moments heureux il parvient très haut. »
Sanctuaire Kamigamo (UNESCO) sur 664 000 m2 comprenant 34 bâtiments. Ici, j’ai eu la chance de voir un jardinier travailler son jardin zen de pierres.
Temple Daitokuji, un des plus importants temples Zen du Japon, fut construit en 1319 et remplis de biens offerts par de nombreux seigneurs féodaux. Il ressemble à un minuscule village où l’on peut s’égarer dans le labyrinthe des rues aux murs tapissées d’herbes folles, de mousse et de fleurs de champs.
Dans les bus, l’entrée se fait à l’arrière et on règle en descendant un montant en fonction de la distance parcourue si on ne possède pas un pass. Les chauffeurs de bus sont très distingués avec leurs gants blancs et leurs casquettes. Ils annoncent au micro l’arrêt et remercie chaque personne lors du paiement avec une grande patience.
Pour monter dans le taxi, toujours derrière à gauche, la porte s’ouvre et se referme automatiquement. La file est en sens inverse, il faut prendre le dernier et non pas le 1er car les taxis se rangent en marche arrière.
KYOTO_3
Mardi 3 avril 2012
Temple Ginkakuji – Pavillon d’Argent (UNESCO). Pour se rendre au temple, on monte une route jalonnée de maisonnettes et de jardins. Construit en 1489, il a d’abord servi de villa de repos pour le shogoun Yoshimasa Ashigaka qui élabora en compagnie des plus grands artistes de son temps, les idéaux d’une beauté rigoureuse purifiée de tout superflu. Les idées mûries à cette époque ont fait sentir leur influence et ont imprégné la vie japonaise jusqu’à nos jours : l’architecture, l’ameublement, le style de vie…
Le jardin a pour fond la foret verte et luxuriante du Mont du Levant. J’ai pris le petit chemin qui mène vers le haut de cette montagne, à travers une végétation luxuriante composée de fleurs et divers arbres. La vue du sommet était sublime même sous la pluie car une brume enveloppait les cimes lointaines.
Sur l’étang mort
un bruit de grenouille
qui plonge
Basho
Fleur de camélia
en tombant pleura l’eau
de la corolle
Basho
Le sanctuaire Shintoïste Heian Jingu Shrine a le torri le plus imposant du Japon. Il a été construit en 1895 pour marquer le 1100ème anniversaire de Kyoto qui fut capitale impériale du Japon, jusqu’à ce que l’avant dernier empereur Meiji décide son transfert à Tokyo en 1868. Il est dédié aux esprits du premier et du dernier empereur de Kyoto : l’Empereur Kammu et l’Empereur Komei. A l’arrière du sanctuaire il y a des jardins d’azalées et de cerisiers.
KYOTO_4
Mercredi 4 avril 2012
Des métros, les travailleurs sortent en file indienne et avancent très disciplinés deux par deux, tous à la même cadence, comme des fourmis.
Traversé le Parc du Palais Impérial, les cerisiers étaient légèrement dévastés par la tempête de la veille. Que des travailleurs à vélos dans tous les sens, cachés sous des parapluies (parapluie maintenu par un support car interdit de le tenir à la main sous peine d’être verbalisé, téléphoner est également interdit).
J’ai commencé par visiter le temple Toji (UNESCO) qui a été construit dans le but de prier pour la paix et la tranquillité de la capitale quand Heian-Kyo (nom originel de Kyoto) fut déplacée en 794. Sa pagode de 5 étages est la plus élevée du Japon (56,4 m). Le temple regorge d’objets d’arts, tous trésors nationaux. Tous les 21 du mois un grand marché aux puces y a lieu.
Temple Nishi Honganji (UNESCO) fut transféré à sa place actuelle en 1591 par le shogoun Toyotomi Hideyochi. La chambre Shoin et la Porte Chinoise Karamon, sont toutes deux enregistrées au rang de trésor national. Il y a aussi un très célèbre jardin et le plus vieux théâtre Nô du Japon.
De plus, cette villa est un modèle esthétique de la méthode « construction par ajout » à l’opposé de la « méthode sur plan ». A partir d’une pièce on rajoute d’autres qu’on relie par des couloirs (partant des parties on arrive à tout). La conception traditionnelle de l’espace selon la méthode par ajout, présente deux particularités : les petits espaces où l’on se concentre sur les détails et l’asymétrie. Les cloisons de papier sont d’une parfaite géométrie et modulables à l’infini. Les couleurs et les motifs sont d’une modernité inimaginable. Les motifs floraux et géométriques pourraient dater des années 1970 !!
Dernière destination de la journée, le temple Kiomizu-dera (littéralement eau limpide) classé UNESCO. Le bâtiment principal dispose d’un balcon surplombant une petite falaise supportée par une structure en bois compliquée. Malheureusement, le temps que j’arrive en haut de la colline, il a fermé pour préparer la grande fête des sakura aux feux d’artifices qui allait durer toute la nuit. Je regrette tant d’avoir raté une vue impressionnante de Kyoto !
Le soir, j’ai pris le taxi pour me rendre dans mon nouveau quartier où j’allais dormir jusqu’à la fin de mon séjour : le Gion, quartier des geisha. J’ai dormi dans un vieux ryokan, nommé Sawai, tenu par un vieux couple octogénaire.
Pour y aller, le taxi a traversé le quartier des bars et restaurants, le Pontchoko éclairé par des lanternes en papier de riz. Unique moment où j’ai regretté de voyager en solitaire !
Anecdotes du jour :
KYOTO_5
Jeudi 5 avril 2012
Il paraît qu’il est difficile de se faire une idée exacte de l’histoire de l’art japonais, parce qu’un grand nombre d’œuvres significatives appartiennent à des collections privées inaccessibles.
UJI / KYOTO_6
Après, j’ai pris le train pour la ville de Uji à 20 mn au sud de Kyoto. Cette petite ville de 200 000 habitants est traversée par la rivière Ujigawa. Le plus vieux pont vermillon a assuré la richesse de la ville qui relie Kyoto à Nara. C’est le clan des Fujiwara qui y a élu domicile à l’époque Heian.
605-0801
KYOTO-SHI HIGASHIYAMA-KU
MIAKAWASUJI 2-CHOME 239
KOUEN-MAE BUILDING 1se Floor
KYOTO_7
Samedi 7 avril 2012
Je ne voulais pas quitter Gion sans voir le spectacle annuel donné par les Geishas. J’avais pris plein les yeux ! D’abord, les kimonos, les plus anciens et plus beaux qui existent (la pièce vaudrait entre 20 000 et 50 000 euros). Puis l’originalité des décors et des éclairages et le temps record mis pour les changer d’une pièce à l’autre ! Malheureusement, il m’a été interdit d’immortaliser quoi que ce soit… à part la scène avant le spectacle.
Après, je suis allée à la fête du Parc Maruyama, situé juste derrière le sanctuaire Yasaka, qui comporte des étangs et des centaines de cerisiers le tout sur 90 000 m2. Au centre, vit depuis 300 ans un cerisier géant qui ressemble à un saule. Ses branches sont retenues par des fils et maintenues par des béquilles en bois. Les gens se bousculent pour photographier cette « star » du pays.
J’ai été enchantée à la vue des nombreux gens qui se sont retrouvés pique-niquer pour la fête des fleurs. Le sol a été couvert de bâches bleues, qui se sont remplies jusqu’au petit matin, malgré que le temps ait été très frais. Tous joyeux, on entendait crier, chanter, rire… un vacarme !
Le soir je suis retournée à mon café déterminée à ne pas boire un seul gramme d’alcool. J’ai fait d’autres connaissances. Un jeune chercheur en ingénierie qui angoissait de devoir quitter le Japon pour la première fois de sa vie et durant 1 an pour Londres. Je ne pense pas l’avoir encouragé en lui parlant de la cuisine anglaise et de l’éternel temps pluvieux ! Un couple élégant et distingué dont la femme est restée 1 an en France pour apprendre à faire le pain. Malgré tout, elle ne savait pas un mot de français, par timidité certainement.
KYOTO_8