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10/2021

La Mer I UMI NO HI

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Le Japon est un État insulaire dont la superficie terrestre est augmentée par l’étendue de ses eaux territoriales, couvrant au total 4,51 millions de km2 et comptant officiellement 8 645 îles. source

Écrire cet article sur la mer fut un défi ! J’ai réalisé que le sujet est limite tabou pour les Japonais alors que leur pays est maritime !

La mer est fêtée que depuis 1996, le troisième lundi du mois de juillet, Umi no hi, littéralement « Jour de la mer ». En outre, cette célébration n’est rattachée à aucune tradition ancienne malgré que la mythologie et l’histoire nippones soient nées dans la Mer Intérieure Setonaikai !

Mythologie et folklore
Ryujin est le dieu de la mer dans la mythologie japonaise. C’est un dragon, symbole de la puissance de l’océan, pourvu d’une large gueule et capable de prendre forme humaine. Il vit à Ryūgū-jō d’où il contrôle les marées grâce à des joyaux magiques. Les tortues marines, les poissons et les méduses sont souvent décrites comme étant ses serviteurs.
Ryujin est le père de la magnifique déesse Otohime qui épousa le prince chasseur Hoori. Le premier empereur du Japon, Jimmu, étant présenté comme le petit-fils d’Otohime et de Hoori, Ryujin est considéré comme l’un des ancêtres de la dynastie impériale japonaise. Wikipedia
Umi-bozu est le moine de la mer, démon de la tempête, craint des marins. On le représente comme un religieux bouddhiste vêtu entièrement de noire et la tête rasée. Parfois confondu avec Shojo, esprit marin des légendes, que l’on croit avide de saké. Cet être est représenté sous apparence humaine, avec de longs cheveux rouges. Le Japon Dictionnaire et civilisation de Louis Frédéric

RELIGION

Les poissons, les coquillages et les algues faisaient partie des produits marins offerts aux divinités jôbun.  Le sel, pour sa part, il a une fonction purificatrice qui demeure vivace dans les habitudes populaires notamment lors des funérailles.

Dans l’odeur du port
du village de pêcheurs
les danses sous la lune
SHIKI

histoire et politique

L’histoire de l’univers maritime aurait toujours été occultée par l’État et par les historiens eux-mêmes, d’après une étude approfondie réalisée par Yoshihiko Amino – Les Japonais et la mer

Le tribut offert à l’empereur par les pêcheurs ama, les marins kaifu et les poseurs de filets amiudo  fut composé de produits de la mer : poissons, coquillages et algues.

Au Moyen Age, des impôts furent créés sur les revenus tirés du commerce et des transports. Puis, des péages et des barrières furent installés le long des routes terrestres, fluviales et maritimes.

Au 14ème siècle, le long du littoral sur des collines dominant la mer on construit des châteaux de mer umishiro  postes de garde pour juguler la piraterie  mais par la suite aux 15e et 16e siècles ils se transformèrent souvent en établissements de contrôle des taxes que les navires devaient acquitter.

A partir du 17ème siècle, la mer s’est vue attribuer une place secondaire durant le replis protectionniste qui a duré deux siècles. En 1603, le shōgun Tokugawa Ieyasu (1543-1616) a imposé la fermeture du pays sakoku, littéralement enchaînement du pays. Par conséquent, la mer s’est vue occultée par la rizière ! La cour impériale et les seigneurs ont imposé des taxes et des redevances à la population. Ainsi, le riz est devenu un produit noble, symbole de richesse.

 arts

Il suffit de comparer les deux œuvres picturales des maîtres Hokusai et Hiroshige pour comprendre le caractère bipolaire de la mer.

Hokusai représente la mer dévastatrice, périlleuse, en pleine colère dans la baie de Sagami.

L’écume de la vague en forme de griffes de dragon est l’une des particularités du style de Hokusai […] L’artiste souligne la domination de la force impétueuse de la nature sur la fragilité humaine, représentée ici par de petites barques à la merci de la mer. Japon de Rosella Menegazzo

© Katsushika Hokusai, Kanagawa-oki nami-ura Sous la vague au large de Kanagaa de la série Fugaku Sanjurokkei Trente-six vue du mont Fuji vers 1830-1832

Tandis que Hiroshige nous révèle une mer apprivoisée, peu profonde, la Mer Intérieure Setonakai, typiquement nippone, avec des îlots parés de pins torturés. Les tourbillons de Naruto attirent encore aujourd’hui les spectateurs. J’ai eu l’occasion d’admirer ce tableau marin unique lors de mon 6ème voyage.

© Utagawa Hiroshige Awa naruto no fukei vue des tourbillons du détroit de Naruto , près de l’ile d’Awaji de la série Neige, lune, fleurs, 1857

Depuis des siècles, l’activité artistique a pour cadre les côtes de la Mer Intérieure Setonakai. Elle a été classée parc national naturel en 1934 avant le Mont Fuji ! Je l’ai découverte lors de mon 2ème voyage. Ces milliers de petites îles m’ont émue par leur magnificence.

Naoshima et Inujima abritaient des usines de bronze dont la pollution à l’acide sulfurique s’étendait jusqu’à Teshima. Une fois leur activité stoppée, les îles se sont retrouvées avec peu d’habitants, principalement des personnes âgées. C’est Tetsuhiko Fukutake, devenu fortuné grâce à l’édition de manuels scolaires, qui a eu l’idée en 1990 de transformer ses îles de son enfance en Musées à ciel ouvert. Depuis sa disparition, son fils, Soichiro a pris la relève de la fondation paternelle.

Lieux magiques à explorer et si passionné(e) d’art rendez-vous à la triennale de l’art contemporain de Setouchi qui se déroule sur… 12 îles !

Mettez « les voiles »… dès que possible !

Tout sent la mer
dans le voyage en bateau
BASHO