IRIS, LE RADIEUX
°°°
Je vous invite Ă (re)dĂ©couvrir l’Article 8/2021 concernant la place de l’Iris dans la culture japonaise.
© Hokusai Katsushika, Iris et sauterelle, Série dite des « Grandes Fleurs »
°°°
Je vous invite Ă (re)dĂ©couvrir l’Article 8/2021 concernant la place de l’Iris dans la culture japonaise.
© Hokusai Katsushika, Iris et sauterelle, Série dite des « Grandes Fleurs »
JARDINS POLYCHROMES
°°°
Au milieu de mai, grĂące aux rayons de soleil et aux torrents de pluie, la nature resplendit, parĂ©e de verts et bigarrĂ©e de couleurs. Aux teintes variĂ©es de roses, des fleurs de pruniers, de pĂȘchers et de cerisiers, succĂšdent les arbustes fleuris et multicolores : les azalĂ©es, les pivoines, les glycines puis, dĂ©but juin, les hortensias.
Il existe au Japon toute une gamme de jardins : beaucoup sont centrĂ©s sur un Ă©tang constellĂ© d’Ăźlots ; certains d’entre eux reproduisent sur terre le paradis bouddhique ; d’autres cĂ©lĂšbrent le mariage heureux de la pierre et de l’eau, l’union Ă©lĂ©mentaire du statique et du dynamique. Il y a aussi des espaces dĂ©pourvus d’eau et, parfois, de vĂ©gĂ©taux. Il y a encore des jardinets secrets menant au pavillon oĂč a lieu la cĂ©rĂ©monie du thĂ©, et de grands parcs conçus pour la promenade et ouverts sur l’horizon. extrait Berthier François. Les jardins japonais : principes d’amĂ©nagement et Ă©volution historique. In: ExtrĂȘme-Orient, ExtrĂȘme- Occident, 2000, n°22. L’art des jardins dans les pays sinisĂ©s. Chine, Japon, CorĂ©e, Vietnam. pp. 73-92.Â
Je vous emmĂšne au Japon pour admirer l’harmonie des couleurs et l’Ă©lĂ©gance des formes des massifs de fleurs de quelques jardins d’exception !
LES COULEURS ET LEURS SYMBOLIQUES
Au dĂ©but, au milieu et Ă la fin de la saison, si nous ouvrons nos capteurs sensoriels, nous prenons conscience des micro-changements qui se relaient dans la nature pour annoncer lâavĂšnement de la nouvelle saison. Les Japonais parlent dâailleurs de soixante-douze saisons. Sensibles aux changements de saison, ils ont toujours manifestĂ© un intĂ©rĂȘt profond, voire une obsession, pour le fait dâapprendre le secret de la nature en observant minutieusement ses « Ă©tats » rĂ©vĂ©lateurs, dont les couleurs. extrait Sumiko OĂ©-Gottini Sensation Soustraction MNAAG
Dans sa Chronique colorée Iro-ké publiée par le magazine Tempura Numéro 2, Sumiko Oé-Gottini nous fait savoir que :
En japonais, le mot couleur (« iro ») a une origine bien particuliĂšre. L’idĂ©ogramme chinois est fait de deux signes : un humain qui en chevauche un autre pour n’en faire qu’un. Oui, « faire l’amour », telle serait la provenance du mot « couleur » au Japon.
Au mois de mai et début juin, le rouge et le violet prédominent. Mais, quelle est leur symbolique ?
La premiĂšre laque arrivĂ©e au Japon Ă l’Ă©poque JĂŽmon (13000-400 av J.C.) Ă©tait rouge, considĂ©rĂ©e sacrĂ©e puisqu’elle est la couleur du soleil reprĂ©sentĂ©e par la dĂ©esse Amaterasu, la plus importante divinitĂ© shintoĂŻste. Mais encore :
Le rouge, couleur du sang et du feu, exprime Ă la fois la pudeur, la vulgaritĂ©, l’amour, la cruautĂ©, l’espoir, la dĂ©sespĂ©rance, la noble rĂ©sistance jusqu’Ă la mort… » Sumiko OĂ©-Gottini, Chronique colorĂ©e Iro-kĂ©, magazine Tempura NumĂ©ro 2.
A l’Ă©poque de Nara, durant le rĂšgne de l’ImpĂ©ratrice Suiko (592-628), le violet Ă©tait la couleur la plus noble. Il Ă©tait impossible de la porter Ă la Cour sans recevoir son autorisation ! Cette couleur, murasaki en japonais, nous ramĂšne Ă l’Ă©crivaine Murasaki Shikibu auteure du chef-dâĆuvre Le Dit de Genji I Genji monogatari de l’Ăšre Heian (794-1185).
LES MASSIFS DE FLEURS
Il existe dâinnombrable variĂ©tĂ©s dâazalĂ©es aux teintes vives ou pales. Elles apportent de la couleur Ă lâarchitecture traditionnelles en bois.
Sanctuaire shinto Nezu-jinja, au nord de Tokyo, est célÚbre pour sa colline aux azalées.
Sur les rochers,
des fleurs dâazalĂ©es rouges
teintes par les larmes du coucou
BashĂŽ
Temple Shoden-ji, Ă Kyoto, crĂ©Ă© par le jardiniste adepte du sen Kobori EnshĂ» (1579-1647). David Bowie, aurait pleurĂ© d’Ă©motion.
L’originalitĂ© de ce jardin rĂ©side dans le fait que l’on a substituĂ© aux pierres des buissons taillĂ©s : sur une couche de sable, des massifs d’azalĂ©es arrondis sont disposĂ©s par groupes de trois, cinq ou sept, selon un rythme aimĂ© des Japonais qui dĂ©couvrirent la musicalitĂ© de l’impair bien avant que Verlaine ne la chante 10. Le ShĂŽdenji est en quelque sorte une version vĂ©gĂ©tale du RyĂŽanji. Une autre particularitĂ© de ce jardin est qu’il inclut dans son champ le Mont HieĂŻ, le plus haut des sommets qui dominent Kyoto. Le procĂ©dĂ© consistant Ă intĂ©grer le paysage extĂ©rieur Ă l’espace d’un jardin est appelĂ© shakkeĂŻ(« emprunt du paysage ») et connut son apogĂ©e au XVIIe siĂšcle. Plus tardif que le RyĂŽanji et le DaĂŻsen.in, le ShĂŽdenji montre comment Ă©voluĂšrent les jardins Zen aprĂšs l’Ăąge d’or de l’Ă©poque Muromachi. extrait Berthier François. Les jardins japonais : principes d’amĂ©nagement et Ă©volution historique. In: ExtrĂȘme-Orient, ExtrĂȘme-Occident, 2000, n°22. L’art des jardins dans les pays sinisĂ©s. Chine, Japon, CorĂ©e, Vietnam. pp. 73-92.
Dans une chaumiĂšre,
une bonzesse seule et insensible –
Azalées blanches
BashĂŽ
Arrivée de Chine à la période Heian (794-1185) en tant que plante médicinale, la pivoine devient une fleur ornementale. Transformée, la pivoine japonaise est pleine de grùce.
Jardin Yûshien, sur Daikonshima, une petite ßle au milieu de la lagune Nakaumi
L’Ăźle de Daikonshima est nĂ©e de l’Ă©ruption Âd’un volcan, la terre est noire, et c’est dans ces cendres que le ginseng et la Âpivoine Âarbustive trouvent leur bonheur. Hidehisa Inutani, directeur du jardin de Yuushien.
Sur cent lieu Ă la ronde
les pivoines
repoussent les nuages de pluie
Busson
Les glycines sont mises en scĂšnes de maniĂšre spectaculaires au Japon ! Les rameaux de 20 ou 30 mĂštres portent dâĂ©normes grappes blanches violacĂ©es, une cascade de fleurs.
Voici la plus vieille glycine géante, ùgée de +140 ans, transplantée pour lui permettre de continuer sa croissance dans le parc florale de la ville Ashikaga située au Nord de Tokyo.
En voyage au pays de Yamato
Cherchant une auberge
fatiguĂ© –
Ah ces fleurs de glycine
BashĂŽ
A Kamakura (ancienne capitale 1185-1333), le temple Meigetsu-in de l’Ă©cole bouddhiste Rinzai Ă©merge d’un ocĂ©an bleu d’hortensias.
Hortensias –
Ce buisson est le petit jardin
d’un salon privĂ©
BashĂŽ
Pour en savoir plus sur les saisons et les couleurs, je vous invite à (re)découvrir mes articles :
5/2022 KIMONOÂ IÂ HEIAN LâAGE DâOR
°°°
Passant l’automne
un papillon lĂšche
la rosée des chrysanthÚmes
BashĂŽ (1644-1694)
Les insectes, tout autant que les arbres, les fleurs, les oiseaux,âŠ, apportent de la magie Ă nos vies scandĂ©es par les rythmes de saisons. Contrairement aux Occidentaux, les Japonais et les Grecs anciens ont toujours Ă©tĂ© sensibles aux insectes et Ă leurs chants.
En avril, émergent les premiers papillons. Gracieux, ils puisent leur énergie du soleil, sous la protection de la déesse Amaterasu, et se nourrissent du pollen des fleurs. Bien que leur vie soit éphémÚre, ils occupent une place significative dans la culture japonaise.
Parmi les fleurs Ă©closes
sur la haie
un papillon volige
ah ! lâenvie dâĂȘtre avec lui
si éphémÚre
SaigyĂŽ (1118-1190)
CROYANCES POPULAIRES
En solitaire, le papillon symbolise la longĂ©vitĂ© lorsquâil vole au dessus dâun prunier, la joie ou un pressage heureux lorsquâil entre par hasard dans une maison, mais aussi lâĂ©closion de la fĂ©minitĂ©. Pour cette raison, le papillon dĂ©core le kimono des jeunes filles le furisode « manche flottante », en tant que mĂ©taphore de la jeune fille qui dĂ©ploie ses ailes pour devenir femme tandis que les manches longues jusquâaux chevilles sont synonymes de puretĂ© et dâinnocence. De plus, pour maintenait le furisode, la ceinture obi Ă pans longs, peinte ou brodĂ©e, est largement nouĂ©e dans le dos en forme de papillon cho musubi. Leurs coiffures aussi portent le nom de papillon chocho mage : les cheveux sont partagĂ©s en quatre coques symĂ©triques.
Dâautre part, les papillons qui voltigent en couple, reprĂ©sentent le bonheur conjugal sur les kimonos lors d’un mariage. Et les dĂ©corations en papier en forme de papillon origami pour la cĂ©rĂ©monie dĂ©nommĂ©es o-chĂŽ et mechĂŽ symbolisent lâunion heureuse et Ă©ternelle.
La phalĂšne est le symbole du rĂȘve et de la vie insouciante. Certains jours de fĂȘte, la « danse du papillon » a une importante signification. Deux papillons sont les tĂ©moins symboliques des noces au Japon : accompagnateurs dansants sur le chemin de la vie, ils mĂšnent le couple vers lâavenir Ă travers un merveilleux jardin fleuri. extrait Japonisme, WICHMANN Siegfried, EditĂ© par ChĂȘne/Hachette
En grand nombre, les papillons inspirent lâeffroi, comme lâindique lâhistoire du clan Taira (lâun des quatre clans qui dominĂšrent durant l’Ăšre Heian, avec les Fujiwara, les Minamoto et les Tachibana, dont le blason mon Ă©tait un papillon machaon de couleur jaune, noir et bleu appelĂ© ageha-chĆ.
Papillon qui bat des ailes
je suis comme toi –
poussiĂšre dâĂȘtre
Issa (1763-1828)
Valsent les papillons –
je parle
avec les morts
Yokohama HahkkĂŽ
<
A ce titre, le bouddhisme considĂšre que les phĂ©nomĂšnes qui composent la personnalitĂ© dâune personne dĂ©cĂ©dĂ©e pourront se rĂ©incarner sous des formes animales, vĂ©gĂ©tales et minĂ©rales.
Couvert de papillons
lâarbre mort
est en fleurs
Issa (1763-1828)
Le papillon est lâincarnation dâune Ăąme dĂ©funte bienfaisante et protectrice ou lâĂąme dâune personne qui sâenvole vers lâautre monde.
Sur lâĆillet
Un papillon blanc –
ou une ùme égarée
Masaoka Shiki (1867-1902)
La plupart des lĂ©gendes sont d’influence chinoise Ă part ce conte populaire : un homme inconsolable, dĂ©nommĂ© Takahama, a veillĂ© toute sa vie la tombe de sa bien-aimĂ©e Akiko jusquâau jour oĂč son Ăąme lâa rejoint dans le royaume des morts sous forme la forme du papillon blanc.
Le Papillon bat des ailes
comme sâil dĂ©sespĂ©rait
de ce monde
BashĂŽ (1644-1694)
Dans le bĂątiment principale Daibutsu-den du temple TĂŽdai-ji Ă Nara, au pied du grand Bouddha en bronze de 14,98 m de hauteur, on remarque des fleurs de lotus et deux papillons…
Les poĂštes, les artistes et les danseuses ont souvent choisi un nom dâartiste geimyĂŽ de papillon : ChĂŽmu rĂȘve de papillon, IchĂŽ papillon solitaire. Il existe aussi des noms propres pour les filles KochĂŽ ou ChĂŽ papillon… On sait aussi que le marchand d’armes britannique Glover Ă©pousa la fille d’un samouraĂŻ qui inspira le livret d’opĂ©ra de Puccini, Madame Butterfly ChĂŽchĂŽ san.
De passage dans un pavillon de thĂ©, une femme appelĂ©e « Papillon » m’a demandĂ©e, en me donnant une piĂšce de soie blanche, de composer un hokku sur son nom. J’ai donc Ă©crit :
Parfum dâorchidĂ©e –
en sont imprégnées
les ailes du papillon !
BashĂŽ (1644-1694)
Mais, retournons dans les Ă©poques anciennes :
Dame Murasaki Shikibu intitula le chapitre 24 de son Dit du Genji Genji Monogatari « Les Papillons », KochĆ. Elle nous apprend lâexistence de la danse des papillons KochĂŽ mai exĂ©cutĂ©e lors des festivitĂ©s de printemps au palais de lâImpĂ©ratrice par des filles dĂ©guisĂ©es en papillon et oiseaux.
Image Dames de la Cour impériale exécutant la « danse du papillon ».
Oiseaux et papillons
s’agitent avant l’envol –
Nuages de fleurs
BashĂŽ (1644-1694)
A lâĂ©poque Edo, nĂ©e la poĂ©sie humoristique kyĂŽka. Je me rĂȘve papillon et jâembrasse
tes lÚvres pour goûter un nectar de ta fleur
comme on piÚge la libellule sur une tige engluée
je te tiendrai si tu cherches Ă mâĂ©chapperARTS DĂCORATIFS ET JAPONISME
Les premiers dessins d'insectes (libellules, araignées, papillons...) semblent avoir été faits par les Japonais, un siÚcle avant J .C., pour orner les poteries et les cloches des temples, technique en relief dénommée dÎtakus.
Encore aujourd'hui, le papillon est prĂ©sent dans les arts dĂ©coratifs (vases de porcelaine, lâart de la tableâŠ) et souvent en compagnie dâune pivoine « la rose du Japon ».
Les artisans dâart europĂ©en ont vu leur crĂ©ations influencĂ©e par lâartisanat japonais vers 1875. A la diffĂ©rence de lâenthousiasme de la noblesse du XVIIIe siĂšcle pour la Chine, le japonisme sâest rĂ©pandu grĂące Ă lâExposition universelle de Paris de 1867 (article Ă (re)dĂ©couvrir Kimono I Symbole du japonisme)
* CĂ©ramiste français : LâĆuvre de ThĂ©odore Deck (1823 -1891) est caractĂ©ristique dâun grand Ă©clectisme. En effet, lâartiste fait cohabiter dans sa production plusieurs influences qui touchent les arts au XIXe siĂšcle, en passant par lâhistoricisme que lâon retrouve dans les portraits de personnages historiques ou cĂ©lĂšbres de ses plats, lâorientalisme, le japonise ou lâart chinois. source
°°°
Les mois de mars et avril cĂ©lĂšbrent les fleurs de poirier rika, de pĂȘcher momo et de cerisier sakura.
°°°
Le mois de février célÚbre son arbre, le prunier ume. Ses fleurs gracieuses au parfum suave annoncent le printemps pendant que celles de cerisier sommeillent encore.
Les fleurs de prunier sont Ă lâorigine de la tradition o-hanami qui appelle Ă leur contemplation et les premiĂšres Ă avoir Ă©tĂ© louĂ©es dans les poĂšmes, les rĂ©cits et les missives amoureuses. Puis, rĂ©vĂ©rĂ©es par les plus grands artistes, elles ont illuminĂ© les arts de leur Ă©clat.
Que n’ai-je un pinceau
Qui puisse peindre les fleurs du prunier
Avec leur parfum !
Satomura JĂŽha (1525-1602)
AprĂšs vous avoir exposĂ© l’origine de o-hanami et la symbolique du prunier, je vous propose un voyage dans le temps : un aller-retour entre l’Ăšre Heian et aujourd’hui.
La fleur de prunier, quâelle soit blanche ou rouge, vit deux fois plus longtemps que celle de cerisier. Dans Notes de chevet Makura no sĂŽshi (chapitre 21. Fleurs des arbres), Sei Shonagon nous ouvre son cĆur :
Lâobservation des fleurs o-hanami a commencĂ© avec le prunier umemi, coutume empruntĂ©e Ă la Chine des Tang Ă lâĂšre Nara (710-794). La cĂ©lĂ©bration des fleurs de cerisier, devenues tardivement symboles emblĂ©matiques du Japon, sâest rĂ©pandue Ă partir de lâĂ©poque Edo.
La beautĂ© Ă©phĂ©mĂšre des fleurs suggĂšre l’impermanence de lâexistence, de la jeunesse qui se fane. Une douce mĂ©lancolie ressort de ce poĂšme anonyme :
Les fleurs, elles sâĂ©panouissent : – alors
On les regarde : – alors
Elles se fleurissent : – alorsâŠ
Les qualitĂ©s et la symbolique que l’on confĂšre Ă la fleur de prunier sont multiples : patience, optimisme, espoir, force, vitalitĂ©, bravoure, loyautĂ©, Ă©lĂ©gance, noblesse, beautĂ©, qualitĂ©s morales, discrĂštes et dĂ©licates de la femme, de la mĂšre qui enfante et Ă©lĂšve son enfant.
La fleur de prunier est un thĂšme rĂ©current dans le Man’yĆshĆ«, le plus ancien recueil de poĂšmes waka compilĂ© au VIIIe, mais elle est dĂ©trĂŽnĂ©e par celle de cerisier Ă partir du Xe siĂšcle.
La Cour, lieu dâĂ©panouissement culturel, mĂšne une vie oisive et futile, consacrĂ©e aux divertissements : concours de poĂ©sie, contemplation des fleurs o-hanami, calligraphie, amours courtois et libres, etcâŠ
Le prunier en fleur attend son maĂźtre dans le jardin Kikaku (1661-1707) |
Les fleurs du prunier parfumées qui tombent glissent sur la branche mais transmettent à la manche leur fragrance. Extrait Le Dit de Genji de Murasaki Shikibu |
Les missives amoureuses Ă©taient nouĂ©es de maniĂšre particuliĂšre en fonction du sexe de la personne qui lâenvoyait. Le parfum et la couleur du papier nâĂ©taient pas choisis au hasard. Un code Ă©tait Ă respecter : papier rose perle Ă la floraison des cerisiers, papier parme durant la floraison des glycines⊠et Ă chaque missive on nouait une branche ou une fleur de saison. LâĂ©tiquette amoureuse voulait que lâamant, peu aprĂšs son dĂ©part matinal avant l’aurore, envoie Ă la dame de ses pensĂ©es une lettre et un poĂšme pour confirmer ses sentiments et… sa culture littĂ©raire. La rĂšgle exigeait que la dame fasse Ă©cho avec un poĂšme waka. Un savoir-faire et savoir-vivre dâun raffinement extrĂȘme !
Les beaux garçons
dessaleurs de prunier et les saules pleureurs
de belles femmes
BashĂŽ (1644-1694)
Les nobles dĂ©pensaient sans compter pour des bois prĂ©cieux, ingrĂ©dients des pastilles d’encens neriko, qu’ils composaient en fonction de leur goĂ»t, leur imagination et sur base des recettes traditionnelles. Ils s’en servaient Ă parfumer les vĂȘtements, les Ă©ventails et les lettres.
L’encens Baika a Ă©tĂ© inspirĂ© par le parfum doux et entĂȘtant de la fleur de prunier.
neriko : pastilles d’encens pĂ©tries, fabriquĂ©es Ă partir de poudre d’encens, de miel et de prune, laissĂ©es « mĂ»rir » pendant 3 Ă 5 ans dans un pot.
Dans le Dit de Genji Genji Monogatari de Murasaki Shikibu, on apprend que le prince Kaoru portait un parfum sans pareil :
Pour en savoir plus, (re)découvrez mon article 4/2021 Encens I Art olfactif
Les couleurs des fleurs Sont brouillĂ©es sous la neige, Tellement quâon ne peut les voir : Mais leur parfum quâon respire RĂ©vĂšle leurs prĂ©sence. PoĂšmes du recueil KokinshyĂ» du VIIIe |
Par cette nuit de printemps, Obscure et sans formes, Des fleurs de prunier La couleur est invisible ! Oui ! Mais leur parfum ! peut-il se dérober ? PoÚmes du recueil Kokinshyû du VIIIe |
Sugawara no Michizane (845-903) poĂšte et politicien de renom, victime d’un complot organisĂ© par les Fujiwara, il tomba en disgrĂące et fut contraint Ă l’exil Ă Kyushu. Il regretta tant de quitter son prunier favori qu’il lui composa un waka avant le dĂ©part :
Quand le vent d’Est souffle,
fleurissez, fleurissez, fleurs de prunier !
MĂȘme si votre maĂźtre n’est plus lĂ ,
n’oubliez pas le printemps !
La lĂ©gende dit que celui-ci s’envola de Kyoto pour le rejoindre Ă Dazaifu, d’oĂč son nom Tobiume « prunier volant ».
AprĂšs son dĂ©cĂšs, les familles des rivaux vĂ©curent que des malheurs vus par l’Empereur comme une vengeance de l’esprit de Sugawara. Pour le consoler, il le consacra au rang de Dieu des Ă©tudes et des lettres Tenjin et Ă©rigea un sanctuaire shinto en sa mĂ©moire : Dazaifu Tenman-gĆ«, prĂ©fĂ©cture de Fukuoka.
L’Ăąme japonaise vĂ©nĂšre les fleurs et l’apparition de certaines d’entre elles est l’occasion de fĂȘtes populaires matsuri.
Lors des fĂȘtes du 1er jour de lâan, des vases de porcelaines et de bronze sont ornĂ©s de branches de pin matsu, de bambous take et de pruniers ume. Ces trois compagnons des grands froids ont inspirĂ© le motif de bonne augure des kimono dĂ©nommĂ© shĆchikubai, symbole du Nouvel An japonais.
LâAn se lĂšve, obscur ;
La neige voile lâaurore.
Ciel rend nous lâazur,
Car le prunier vient dâĂ©clore,
Et son doux parfum tâimplore !
poĂšme extrait de Le Japon par Judith Gauthier
Umemi est une invitation Ă contempler la floraison Ă©vanescente, sentir le parfum tenu des fleurs dans lâair doux et caressant et faire la fĂȘte sous les confettis de pĂ©tales emportĂ©es par la brise qui se dĂ©posent parterre formant un lit somptueux. Les festivals ont lieu entre mi-fĂ©vrier et mi-mars dans des parcs publics, des sanctuaires et des temples Ă travers tout le pays.
Prunier en fleur
Le souffle discret du vent
pour ne pas les disperser
BashĂŽ (1644-1694)
Dans le parc, tout blanc,
De Tchiyoda, quelle chose,
Le premier de lâAn,
Souris dĂšs l’aube morose ?âŠ
Câest la fleur du prunier rose.
poĂšme extrait de Le Japon par Judith Gauthier
Pendant umemi on cĂ©lĂšbre autant la fleur que le fruit de cet arbre sacrĂ©. Prumus mume produit lâingrĂ©dient principal de divers dĂ©lices : umeboshi, prune salĂ©e et sĂ©chĂ©e utilisĂ©e pour les onigiri, kobai petit gĂąteau Ă base de pĂąte de haricots rouges azuki et de farine de blĂ© cuite Ă la vapeur, umeshu alcool japonais Ă base de prunes marinĂ©es dans la liqueur, etc.
LE PIN ĂTERNEL I MATSU æŸ
°°°
Le pin vit mille ans,
Le petit liseron du matin une journée seulement,
Mais tous deux jouent leur rĂŽle.
PoĂšme zen anonyme
Les Japonais vivent avec la nature, charitable et impitoyable. Elle est la source Ă©ternelle de leurs aspirations et de leurs inspirations.
Chaque mois de l’annĂ©e possĂšde sa fleur ou son arbre favori. En janvier, on cĂ©lĂšbre le pin matsu qui exprime sa beautĂ© Ă travers ses dĂ©formations et ses courbes façonnĂ©es par la toute-puissante nature et parfois par l’homme.
Je vais vous rĂ©vĂ©ler dans cet article, sa place dans les croyances et dans quelques domaines de l’art car le sujet est vaste.
Lâarchipel nippon est un pays de forĂȘts imprĂ©gnĂ©es de profonde spiritualitĂ© et de surnaturel. Dans la croyance shinto, les arbres sont habitĂ©s par les esprits de la nature dĂ©ifiĂ©s, dĂ©nommĂ©s kami. Bois, plantes, pierre⊠tous ont une Ăąme. Dans cette estampe, Katsushika Hokusai (1760-1849) sĂ©pare par une barriĂšre de pin, le monde des humains de celui des dieux.
La brise fraĂźche
emplit le vide ciel
de la rumeur du pin
Onitsura
De son cĂŽtĂ©, le bouddhisme zen invite l’homme Ă se connecter Ă son monde intĂ©rieur.
L’un de mes coup de foudre est ce chef-dâĆuvre de la peinture monochrome Ă l’encre noire sur deux paravents byĆbu-e, qui reprĂ©sente un bois de pins dans le brouillard.
Un pin ne me semble vĂ©ritablement pin quâenveloppĂ© de brumes ou de nuages.[âŠ] Le fond brumeux, traversĂ© par une pĂąle lumiĂšre hivernale, entraĂźne le spectateur dans les profondeurs de la forĂȘt, peut-ĂȘtre en direction du sommet enneigĂ© visible sur la droite, ou dans les mĂ©andres dâinvisibles sentiers entre les arbres. extrait Petit Ă©loge des brumes de Corinne Atlan
Les branches et les aiguilles de pin symbolisent la joie, une longue vie ou lâĂ©ternitĂ©.
Vent dans les pins â
Des aiguilles de pin tombant sur lâeau
le son agréable
Matsuo BashĂŽ (1644-1694)
AssociĂ© au bambou take, symbole de puretĂ©, de noblesse, de force et de souplesse, le pin Ă©voque le Nouvel An. La coutume veut que lâon dĂ©pose de part et dâautre dâune porte dâentrĂ©e de mi-dĂ©cembre au mi-janvier un kadomatsu littĂ©ralement «pin du seuil » pour accueillir le dieu shinto du nouvel an, Toshi-gami, afin de protĂ©ger le foyer. Par contre, dans le quartier des geisha Ă Kyoto, dĂ©nommĂ© Gion, le kadomatsu se limite Ă un pin avec ses racines et symbolise la croissance Ă©ternelle.
A la fin, cette offrande est brĂ»lĂ©e avec les autres dĂ©corations du Nouvel An au temple shintĂŽ et la fumĂ©e qui s’en Ă©chappe permet au kami de l’an de repartir.
Le pin est indissociable du jardin japonais qui est toujours ingĂ©nieusement composĂ©. Tailler et façonner le pin pour lui donner une forme prĂ©cise et gracieuse, cela exige un savoir-faire millĂ©naire. Un jeune surgeon peut ĂȘtre coupĂ© et ligotĂ© Ă lâaide de fils de fer et de ficelle durant des annĂ©es jusquâĂ ce quâil atteint lâaspect dĂ©sirĂ© par le jardinier.
Lors de mon 1er voyage en 2012, j’ai visitĂ© la sublime Villa impĂ©riale Katsura prĂšs de Kyoto. redĂ©couverte par l’architecte allemand Bruno Taut en 1933 qui disait : « A Katsura, les yeux pensent ! ».
Suite Ă cela, cet ermitage princier a influencĂ© d’autres pionniers de l’architecture : Walter Gropius, Wies ven der Rohe, Le Corbusier, Franck Lloyd Whright.
Mon regard s’est portĂ© sur le pin solitaire de Sumiyoshi. Autrefois, Ă sa gauche, il y avait le pin Takasago citĂ©s dans la prĂ©face de l’Anthologie de la poĂ©sie ancienne et moderne Kokin WakashĂ». (lire plus bas ThĂ©Ăątre NĂŽ)
Deux autres pins révérés par les artistes dans les estampes, sont la preuve vivante de cet art : Tsuki no Matsu et Yogo no Matsu.
Lâactuel Parc dâUeno se trouve sur une terre qui appartenait autrefois au Temple Kanei-ji, le temple familial des shoguns (chefs militaires du Japon jusquâau milieu du 19e siĂšcle). Dans un des coins du parc se dressait le Tsuki no Matsu (Pin de la Lune), surplombant lâĂtang Shinobazu-no-ike. Ses Ă©lĂ©gantes branches circulaires Ă©taient lâĆuvre dâhorticulteurs. Les gens raffinĂ©s croyaient y distinguer une pleine lune, sâimaginant en train dâadmirer le superbe astre illuminer la nuit. source Niponica 22
© Utagawa Hiroshige, Uenosannai Tsuki no Matsu, 1857
Â
A l’art du jardin se rajoute le bonsaido, l’art des bonzaĂŻs qui rĂ©unit ciel et terre dans un pot.
Lâarchitecture traditionnelle est fondĂ©e sur lâamour du bois, elle encense la force et la splendeur de la nature.
Les matĂ©riaux dâameublement et de construction, comme lâossature dâune maison, sont confiĂ©s Ă divers espĂšces de pin :
A l’Ă©poque d’Edo, les routes furent en gĂ©nĂ©ral balisĂ©es Ă chaque ri (1 ri = 3.9 km) au moyen dâun pin matsu. On y trouve encore des pins solitaires ippon matsu qui rappellent lâemplacement de ces Ă©tapes importantes ichirizuka.
Des pins sur chaque Ăźle –
le bruit du vent
est frais
Shiki
Plusieurs fameux poĂštes, dont SaigyĆ (1118-1190), « passionnĂ©s de meisho », rĂ©coltaient pendant leurs pĂ©rĂ©grinations de prĂ©cieux souvenirs : aiguilles de pin, grenouille sĂ©chĂ©e, coquillageâŠ.
MĂȘme ici le cĆur sâennuie
de nouveau le dĂ©sir de sâenvoler
et ce pin restera seul
vraiment seul
sans ami
chap X vers le pays Sanuki 11, Vers le vide de SaigyĂŽ
Ă l’Ă©poque d’Edo, le lettrĂ© confucianiste Shunsai Hayashi, nĂ© GahĆ Hyashi (1618-1680), a nommĂ© les trois plus beaux paysages du Japon, les Nihon Sankei : Amanohashidate, la baie de Matsushima et l’Ăźle de Miyajima.
Leur point commun ? Des pins murmurants au bord de rivages sableux.
Amanohashidate, littéralement « passerelle céleste » dans la préfecture de Kyoto, une langue de sable plantée de plus de 6000 pins dont certains atteignent une hauteur de 40 m. Je me suis rendue lors du 2Úme voyage en 2013.
Est-ce pour admirer pins et cyprĂšs ?
La brise parfumée
souffle bruyamment
Matsuo BashĂŽ (1644-1694)
La baie de Matsushima, au nord de Kyoto, parsemĂ©e dâenviron 260 Ăźlots couverts de pins maritimes. CĂ©lĂ©brĂ©e dans un haĂŻku par le poĂšte Basho (1644-1694) qui, restĂ© sans mots face Ă un tel paysage, il a usĂ© de la rĂ©pĂ©tition pour exprimer sa beautĂ© captivante.
Oh, Matsushima !
Oh, Matsushima, ah !
Oh, Matsushima !
Matsuo BashĂŽ (1644-1694)
Depuis, dâautres paysages ont gagnĂ© en reconnaissance comme Miho-no-Matsubara. Une plage impressionnante, longue de 7 km et couverte de plus de trente mille pins a Ă©tĂ© inscrite au patrimoine culturel mondial en tant quâĂ©lĂ©ment du mont Fuji en juin 2013.
L’ukiyoe de Hiroshige Utagawa (1797-1858) et des poĂšmes waka tĂ©moignent de sa beautĂ©.
Serais-je le seul
à leur demander abri ?
Non, les blanches vagues
Elles aussi, les harcĂšlent
Les sveltes pins du rivage
poÚme de Tsurayuki-shƫ
Ce lieu est connu aussi pour lâancien conte Hagoromo-no-Matsu « La robe de plume » qui donna lieu Ă une cĂ©lĂšbre piĂšce de NĂŽ, Hagoromo.
Une divinitĂ© cĂ©leste, descendue sur une plage pour se baigner, abandonne sa robe de plumes sur le sable. Un pĂȘcheur sâaperçoit et, dĂ©sirant la jeune beautĂ©, cache sa robe. Elle nâa plus alors dâautres ressources que de devenir lâĂ©pouse du pĂȘcheur. AprĂšs lui avoir donnĂ© des enfants, elle prie son mari de lui rendre la robe de plumes. Celui-ci ayant cĂ©dĂ© Ă son dĂ©sir, elle retrouve sa nature divine, et avant de regagner son domaine cĂ©leste, danse pour remercier le pĂȘcheur.[Bibl. -ar RenĂ© Sieffert, In NĂŽ et KyĂŽgen, Paris 1979] Le Japon Dictionnaire et civilisation Louis FrĂ©dĂ©ric Collection Bouquins
Parlant du thĂ©Ăątre NĂŽ, le seul dĂ©cor est la peinture dâun pin sur le paroi arriĂšre de la scĂšne.
Le pin de Takasago est un symbole dâextrĂȘme longĂ©vitĂ©.
Je nâai guĂšre envie
de mâentendre dire :
comment, toujours en vie ?
ce que pourrait penser le pin de Takasago
me remplit de confusion
poĂšme Kokin waka rokujĆ (no 3057)
Les tissus de kimono comportent des motifs reprĂ©sentant les fleurs de saison et leurs couleurs ou des motifs de bon augure et significations magiques. Le pin matsu symbolise la longĂ©vitĂ©, puis l’hiver, lorsqu’il est associĂ© Ă la neige ou Ă deux autres compagnons des grands froids : le bambou take et le prunier ume.
Les ouvrages en cĂ©ramique tĂŽgei, considĂ©rĂ©s comme le sommet de lâĂ©nergie crĂ©atrice artistique, ont les couleurs qui sâharmonisent avec celles de la nature et des saisons.
Ă Suminoe
Plus le vent dâautomne
Souffle sur les pins
Plus les vagues blanches au large
Y ajoutent leur fracas
ĆshikĆchi no Mitsune, âšKokin shĆ«, « CĂ©lĂ©brations », poĂšme no 360
°°°
A la diffĂ©rence de lâenthousiasme de la noblesse du XVIIIe siĂšcle pour la Chine, le japonisme sâest rĂ©pandu grĂące Ă lâExposition universelle de Paris en 1867.
Le public fut fascinĂ© par le pavillon japonais et la dĂ©couverte du kimono portĂ© par les premiĂšres femmes japonaises venues en Europe et accueillies avec une curiositĂ© extrĂȘme.
On peut affirmer que le kimono est le symbole national du Japon et conjointement du japonisme en Europe qui gagna par la suite l’Occident. Nous allons dĂ©couvrir pourquoi il a Ă©tĂ© une source dâinspiration autant pour les peintres que pour les crĂ©ateurs de mode et les Ă©crivains.
A Londres, la premiĂšre exposition d’art appliquĂ© japonais de 1854 et l’Exposition universelle de 1862 ont Ă©tĂ© le dĂ©tonateur de l’intĂ©rĂȘt des artistes pour le Japon, mais le terme japonisme nĂ© en 1867 avec l’Exposition Universelle de Paris.
Hayashi Tadamasa (1853-1906), interprĂšte durant l’exposition universelle, puis traducteur de documents sur l’art japonais et marchand, a jouĂ© un rĂŽle fondamental dans l’histoire du japonisme durant son sĂ©jour Ă Paris de 1878 Ă 1893, et Ă la fois en tant qu’ami des peintres (Claude Monet, Camille Pissaro, Paul Renouard), des intellectuels et des hommes de lettres (Edmond de Goncourt, Ămile Guimet, FĂ©lix RĂ©gamey).
Puis, Louise MĂ©lina Desoye (1836-1909) a Ă©tĂ© l’unique femme qui a contribuĂ© Ă la premiĂšre vague du japonisme en vendant dans sa boutique des produits importĂ©s du Japon. Ce lieu a Ă©tĂ© frĂ©quentĂ© par les peintres de la vague « japonisante » dont le prĂ©curseur anglais James Whistler : installĂ© Ă Paris dĂšs 1855, ses Ćuvres ont diffusĂ© lâimpressionnisme en Angleterre et aux Ătats-Unis.
|
|
Toujours Ă Paris, Samuel Bing (1838-1905) marchand et critique d’art, collectionneur et mĂ©cĂšne français d’origine allemande) avait acquis des milliers dâestampes japonaises qu’il a reproduites de 1888 Ă 1891 dans sa revue mensuelle Le Japon artistique. Documents dâart et dâindustrie publiĂ©e simultanĂ©ment en français, anglais et allemand. En 1890, il a enfiĂ©vrĂ© le monde avec l’exposition de 725 peintures et 428 livres illustrĂ©s japonais Ă lâĂcole des Beaux-Arts de Paris.
A partir du mois de juillet 1893, la revue littĂ©raire et artistique La Revue Blanche, publie en couverture une estampe en noir et blanc dâun peintre de la mouvance symboliste : Bonnard, Vouillard, Roussel, Manet, Monet, Pissaro, Renoir…
Certains artistes qui collectionnaient des estampes ont fini par changer la technique et la forme de leur art, comme Henri Toulouse-Lautrec et Vincent Van Gogh. Ce dernier, Ă©crivait du Sud de la France Ă son frĂšre « Ma vie devient ici de plus en plus celle dâun peintre japonais ». (cf. article 8/2021 Iris, le radieux). A sa mort en 1890, son mĂ©decin a trouvĂ© un carton de quatorze estampes prĂšs de son lit.
ParallÚlement, les contrastes des couleurs des kimono ont également influencé la palette des artistes.
L’estampe, perçue en Europe comme une nouvelle forme d’expression artistique, a connu un immense succĂšs, nombreux peintres y ont puisĂ© leur inspiration :
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
MalgrĂ© la fascination exercĂ©e par le Japon sur ces artistes, aucun n’a fait le voyage pour le dĂ©couvrir ou confronter leurs idĂ©es Ă celles des artistes japonais !
A lâinverse, des artistes japonais se sont rendus Ă Paris – devenu centre artistique de lâEurope grĂące aux impressionnistes – pour apprendre les nouvelles techniques de la peinture et fini par peindre « Ă lâoccidentale » : Kuroda Seiki, Saeki YĂ»zĂŽ, Aoki Shigeru, Kihida RyĂ»sei, Fujita Tsuguji qui sâest fait naturaliser françaisâŠ
|
|
|
|
Les soieries japonaises ont envouté les artistes, mais également les femmes qui les arrachaient des mains des marchands.
Entre 1860 et 1920, lâattitude et les gestes de la parisienne ont Ă©tĂ© influencĂ©s par le kimono.
Issey Miyake Ă©crivait dans le livre Kimono de Sylvie et Dominique Buisson que plusieurs crĂ©ateurs de mode occidentaux ont subi l’influence orientale tandis que ceux japonais sont partis de la mode occidentale pour obtenir leur originalitĂ©.
Frederick Worth (1825-1895), couturier français d’origine britannique et l’un des fondateur de la haute couture Ă Paris, s’est inspirĂ© des tissus japonais et du kimono pour la crĂ©ation de ses robes.
Par la suite, le célÚbre Paul Poiret (1879-1944) créa en 1910 un manteau kimono et des robes.
|
|
Lâinfluence du Japon sâest dĂ©ployĂ©e non seulement dans les arts plastiques mais aussi en littĂ©rature, dâoĂč le terme de japonisme littĂ©raire.
Les Ă©crivains ont pressenti trĂšs tĂŽt la fascination que prĂ©sentait le Japon. De la fin du XIXe siĂšcle et du dĂ©but du XXe siĂšcle, certains Ă©crivains composaient dans le « goĂ»t japonais » par exemple Judith Gautier, autrice de plusieurs romans et nouvelles inspirĂ©s par l’histoire japonaise et Pierre Loti avec Madame ChrysanthĂšme.
|
|
En guise de conclusion :
°°°
Pour faire Ă©cho, je rajouterais lâĂ©ventail et lâombrelle kasa Ă qui je dĂ©die ce dernier article en tant qu’accessoire du kimono.
AprĂšs une brĂšve prĂ©sentation de ses origines, j’aborde son mode de fabrication et les modĂšles selon leur usage, ainsi que sa place dans la croyance populaire.
Les premiĂšres ombrelles rigides auraient Ă©tĂ© dĂ©couvertes parmi les tributs envoyĂ©s par le roi de Kudara, une ancienne province corĂ©enne, Ă lâempereur Kimma (539-571).
Avant cela, les femmes portaient des chapeaux larges et plats, en fibres végétales tressées (bambou ou cyprÚs).
Quittons-nous –
Je porte des vĂȘtements dâĂ©tĂ©
et kasa Ă la main
BashĂŽ (1644-1694)
Ici, un aperçu en images de divers modÚles de chapeaux pour femmes et hommes dont les paysans et les moines pÚlerins.
 © Domaine public , Kusakabe Kimbei via Wikimedia Commons
Durant Edo (1603-1868), afin de pouvoir voyager plus aisĂ©ment Ă pied, les artisans ont inventĂ© divers objets pliants et lĂ©gers Ă base de bambou et de papier : lâombrelle et la lanterne.
SĂ©vĂšre
le bruit de la grĂȘle
sur mon kasa en cĂšdre !
BashĂŽ (1644-1694)
La monture des kasa est faite de bambous fendus et sur le réseau flexible des branches on tend du papier washi huilé imperméable, décoré ou pas de peinture ou logo. Les kasa pour femmes sont plus grands que ceux des hommes et comptent 40 baleines au lieu de 50.
Les kasa sont souvent représentées dans les estampes ukiyo-e « images du monde flottant » puis dans les premiers photographies.
La forme du kasa traditionnel est immuable, par contre, il change de nom selon sa conception et son utilisation.
Les artisans de Kyoto excellent dans la fabrication des ombrelles et ont rapidement adapté leur technique traditionnelle aux goût modernes.
Les ombrelles de type occidental sont appelés kÎmorigasa littéralement « parapluie en forme de chauve-souris ».
A l’Ăšre Meiji (1852-1912), le prix des premiĂšres ombrelles occidentales Ă©tait exorbitant, synonymes de luxe et de raffinement.
Dans le folklore, le kasa-obake littĂ©ralement « esprit-ombrelle » est un monstre yĆkai de la famille tsukumogami composĂ©e d’objets du quotidien qui peuvent prendre vie aprĂšs 100 ans d’existence. Il a la forme d’une ombrelle traditionnelle pourvue d’un Ćil, d’une langue, de deux bras et d’une seule jambe. Il n’est pas redoutable, mais tout simplement… dĂ©goutant. Pour en savoir plus, cliquez ici
Artifice ou célébration de la beauté ?
°°°
Le maquillage traditionnel, contrairement Ă la coiffure et au vĂȘtement, a Ă©voluĂ© lĂ©gĂšrement entre lâAntiquitĂ© et le XIXe siĂšcle. En dissimulant ses traits, la femme Ă©tait devenue une abstraction qui ne prenait de sens que dans la rigiditĂ© des codes sociaux propres Ă chaque Ă©poque.
Depuis le 6 janvier 1869, date du dĂ©cret impĂ©rial qui a interdit le fard dâun autre Ăąge, seuls les geisha, les maiko et les acteurs de kabuki maintiennent cet art vivant.
Mon article dĂ©voile les secrets de maquillage Ă travers sa palette de base – blanc, noir et rouge – ainsi que les soins du visage et, pour finir, quelques accessoires remarquables par leur raffinement.
« Un visage blanc cache beaucoup de dĂ©fauts » – proverbe
[ăăăźăăăăźăŻăăĄăȘăăăă, iro no shiro no wa shichinan kakusu] « Iro no shiro » dĂ©signe la blancheur dâun visage de femme, äžéŁ â ăăĄăȘă- shichinan ; dĂ©signe les 7 infortunes bouddhistes et dans son sens figurĂ© un grand nombre de dĂ©fauts. Il faut se mĂ©fier des apparences.Â
Pour cela, on employait une poudre blanche – keifun blanc de mercure ou o-shiroi blanc de cĂ©ruse (en dĂ©pit du Saturnisme dĂ» au plomb !) – fondue dans lâeau et appliquĂ©e avec des pinceaux sur le visage, le cou, la nuque et le dĂ©colletĂ© qui Ă©taient enduits auparavant de lâhuile de camĂ©lia bintsukĂ©-abura. AprĂšs Edo (1603-1868), ces poudres nocives ont Ă©tĂ© remplacĂ©es par une pĂąte non mĂ©tallique neri-o-shiroi et la poudre kona-o-shiroi.
Les geisha mettent en valeur leur nuque en la blanchissant, mais gardent nus trois triangles de peau naturelle dĂ©nommĂ©s « trois jambes » sanbon-ashi (les apprenties maiko nâont que deux !). Ce minime dĂ©tail invite Ă lâĂ©rotisme en laissant imaginer les secrets dâune intimitĂ© interdite.
Aujourdâhui encore, la blancheur de la peau demeure la condition premiĂšre de la beautĂ©. En Ă©tĂ©, la japonaise cache son visage du soleil sous des chapeaux, des ombrelles,⊠et les bains de soleil font dĂ©faut Ă sa culture.
Le noir est inhĂ©rent aux coutumes de passage de lâexistence fĂ©minine, de lâenfance Ă lâĂąge adulte.
La coutume dâĂ©piler ou de raser les sourcils existait en Chine pendant la premiĂšre dynastie Han et fut importĂ©e au Japon. Lâaristocrate et la femme des samuraĂŻ se rasaient les sourcils Ă partir de la maturitĂ© (13 ans) tandis que la femme du peuple, une fois mariĂ©e ou devenue mĂšre, coutume dĂ©nommĂ©e hongenpuku.
On redessinait les sourcils rasĂ©s avec du noir mayuzumi obtenu par un mĂ©lange de fleurs brĂ»lĂ©es, de poudre dâor, de suie et dâhuile de sĂ©same ou par de la pelure de chĂątaigne, du charbon de paulownia.
Dans l’ouvrage Kewai mayuzukuri kuden La tradition du maquillage des sourcils, Mizushima Bokuya dĂ©taille les rĂšgles pour dessiner les sourcils et les accessoires nĂ©cessaires.
La coutume detsushi ou kanetsuke qui consistait Ă se noircir les dents Ă©tait usitĂ©e par les femmes et les hommes de classes supĂ©rieures jusquâĂ lâĂšre Meiji « pour se diffĂ©rencier des esclaves et des animaux » (Ă la pĂ©riode de Tokugawa (1603-1867) les prostituĂ©es appelĂ©es « les mariĂ©es dâune nuit » Ă©galement).
La poudre hagurome était composée de débris de fer oxydés et de noix de galle fushi, dissoute dans du thé ou du saké.
Le rouge beni-guchi, extrait de benibana*, plante de la famille du chrysanthĂšme Carthamus tinctoris, servait pour rougir les lĂšvres, les joues et parfois pour le contour des yeux afin dâĂ©clairer lâiris et creuser un peu lâarcade.
*Entre parenthĂšse, ces agents colorants de benibana servirent pour teindre les tissus, puis Ă partir du XVIIe dans la fabrication des encres dâimprimerie pour les estampes ukiyo-e de type benizuri-e et beni-e.
A lâĂ©poque Edo 1813 est paru un ouvrage sur lâesthĂ©tique intitulĂ©Â Le Guide de la beautĂ© dans la capitale Miyako fĂ»zoku keshĂŽden de Sayama Hanshichimaru et illustrations de Hayami ShungyĂŽsai.
Les femmes utilisaient des sachets de tissus nuka-bukuro remplis de son de riz hydratant nuka, de plantes mĂ©dicinales ou aromatiques, de poudre de haricots rouge azuki nettoyante araiko qui contenait de la saponine. Elles plongeaient les sachets dans lâeau chaude puis les essoraient avant de frotter leurs visages.
On utilisait une brosse Ă dents fusayĂŽji en bois de saule, de cĂšdre ou de bambou sur laquelle on mettait du sel ou une poudre abrasive rouge mĂȘlĂ©e Ă des parfums.
Source : catalogue de lâexposition Secrets de beautĂ©, Maquillage et coiffures de l’Ă©poque Edo dans les estampes japonaises Ă la Maison de la culture du Japon Ă ParisÂ
Voici un aperçu de quelques accessoires qui ont Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©s du 19 mai au 10 juillet 2021 lors de l’exposition Secrets de beautĂ©, Maquillage et coiffures de l’Ă©poque Edo dans les estampes japonaises Ă la Maison de la culture du Japon Ă Paris
Michiyo Watanabe du POLA Research Institute of Beauty & Culture nous Ă©claire sur les rituels du maquillage des Japonaises de l’Ă©poque Edo. Fard blanc, rouge Ă lĂšvres, dents noircies ou encore sourcils rasĂ©s signifient souvent bien plus qu’une simple mise en valeur esthĂ©tique de ses atours. Elle nous explique en quoi le maquillage Ă©tait souvent le reflet d’une position sociale ou d’un statut marital.
KIMONOÂ IÂ COIFFURES & ORNEMENTS
°°°
La coiffure a Ă©voluĂ© parallĂšlement au vĂȘtement et sa diversification a entraĂźnĂ© lâessor des ornements de cheveux, les seuls bijoux qui dĂ©coraient et mettaient en valeur la chevelure de jais des Ă©lĂ©gantes : peignes kushi, piques kĂŽgai, épingles kanzashi. En outre, elle variait selon lâĂąge et le statut social des femmes, sans oublier les femmes artistes geisha, les femmes galantes asobi-bito et les courtisanes yĂ»jo.
Pendant la pĂ©riode Heian (794-1185), la chevelure Ă©tait une obsession mĂȘme dans les conversations des dames. Les aristocrates laissaient pendre leurs cheveux lisses, brillants, sĂ©parĂ©s en deux par une raie, immensĂ©ment longs, sauf les mĂšches latĂ©rales coupĂ©es Ă une longueur de 30 cm, coiffure dĂ©nommĂ©e taregami.
koi no mikuni no
asaborake
shiruki wa kami ka
baika no abura ?
du printemps et de l’amour
pour moi l’aurore…
Preuve n’en est-ce dans mes cheveux
le baume aux fleurs de prunier ?
Dans son Journal, Murasaki Shikibu, lorsquâelle aborde les cĂ©rĂ©monies du Jour de lâAn (1008), fait le portrait de onze dames Ă©minentes de la Cour (la taille, le maintien du corps, le kimono et ses couleurs, la forme du visage et le maquillage, les cheveux et ses ornements, l’esprit….).
Les cheveux de cette beautĂ© avait donc 10 cm de plus que sa taille ! Mais la longueur la plus impressionnante (1,80 m) relatĂ©e par Murasaki dans Le Dit du Genji I Genji Monogatari est celle de la Princesse Ochiba. A l’Ă©poque, un homme pouvait tomber amoureux dâune femme grĂące Ă sa chevelure rien quâen lâapercevant de dos, aussi parce que les femmes dissimulaient leurs visages derriĂšre les manches de kimono, les Ă©ventails, les paravents, les rideaux…
midare no shirazu
uhi fuseba
maza kakiyarishi
hito zo koishiki
indifférente au désordre
de mes noirs cheveux
celui qui les dĂ©mĂȘlait
Ah combien je l’ai aimĂ©
Yosano Akiko
Lors des cérémonies, les femmes attachaient leurs cheveux avec des rubans.
Murasaki ni Comme violacée,
ogusa ga ue e
kage ochimu
no no harukaze nii
kami kezuru asa
sur les petites herbes
tombe mon ombre ;
au vent de printemps des champs,
matin lissant mes cheveux…
Yosano Akiko
Si une femme décidait de se couper les cheveux avant une reconversion religieuse rakushoku pour se retirer du monde, les assistants pleuraient durant la cérémonie car ils savaient que les cheveux ne regagneraient jamais leur longueur.
Et teint
De noir mon vĂȘtement
Mais ce qui demeure inchangé
C’est mon cĆur.
Femmes galantes, femmes artistes dans le Japon ancien XIe-XIIIe siĂšcle
par Jacqueline Pigeot
Les cheveux dâune femme de basse condition. il est bon quâils soient gracieusement coupĂ©s court. extrait Notes de Chevet Makura no soshi, Sei ShĂŽnagon
A lâĂ©poque Azuchi–Momoyama (1573-1603), la Cour imposait aux femmes le port de chignons Ă la mode chinoise des Tang, Ă savoir double ou simple sur le haut de la tĂȘte. Les chignons des jeunes femmes Ă©taient plus complexes que ceux des femmes mariĂ©es, tout comme les manches des kimono et le nĆud de lâobi (plus de dĂ©tails dans mon article Kinomo I Ăternelle fascination)
Câest durant Edo (1603-1868) que la coiffure japonaise Nihon-gami est nĂ©e ainsi que ses techniques. Elle comprenait quatre parties dont la forme a Ă©voluĂ© en fonction des modes :
Le style caractĂ©ristique du coiffage des tempes on le retrouve dans lâimmortelle estampe intitulĂ©e Trois beautĂ©s de notre temps Kansei san bijin de Kitagawa Utamaro.
*cordons, cordelettes de papier motoyui, ou de fils de chanvre asaito ou fils tressé de kumihimo
DĂšs la pĂ©riode Jomon (vers 8000 av J-C – vers 300 av J-C) apparaissent les Ă©pingles Ă cheveux en os et les peignes Ă©troits avec des dents longues tate-kushi en os, corne ou bambou durci Ă la laque, certains ornĂ©s dâanimaux fantastiques chargĂ©s de pouvoirs magiques.
Le tate-kushi qui Ă la base maintenait la coiffure, sâest vu modifier la longueur et ses dents plus courtes pour remplir le rĂŽle de peigne yoko-gushi (le peigne Ă double endenture tĂŽgushi, peigne Ă queue kesuji-tate, peigne Ă dents larges tokigishi..)
A lâĂ©poque Heian (794-1185), les cheveux dĂ©nouĂ©s ont annihilĂ© la fonction ornementale des Ă©pingles et des peignes.
tare ni kataramu
chi no yuragi
haru no omoi no
sakari no inochi
dont ruissellent sous le peigne
les longs cheveux noirs…
Tant de beauté il y a
dans le printemps de l’orgueil !
Yosano Akiko
Les accessoires kushi peigne, kĂŽgai pique, kanzashi Ă©pingle, kamikazari ornement… sont constituĂ©s de divers matĂ©riaux (Ă©caille de tortue, bois, bambou, nacre, ivoire, agate, verre, or, argent, corne de sabot de cheval ou de bĆuf, os de cou de grue pour les extravagants) et utilisent plusieurs techniques (la peinture laquĂ©e dâor ou dâargent maki-e, lâincrustation de nacre ou de verre, de cristal, de corail).
Les motifs dĂ©coratifs raffinĂ©s du peigne nous font pĂ©nĂ©trer dans un monde miniature, celui de la flore, de la faune, de la littĂ©rature,…Plusieurs artistes ont reprĂ©sentĂ© des ornements de maniĂšre magistrale dans leurs Ćuvres : Kiyomitsu, Harunobu, Masanobu, Utamaro, Tokyni, Kunisada, KuniyoshiâŠSous lâinfluence de lâoccident, dĂšs lâĂšre Showa (1926-1989) le port du kimono disparaĂźt de la vie quotidienne et par consĂ©quent la coiffure japonaise et ses ornements aussi. Seules les geisha, les jeunes filles pour le Nouvel An et les mariĂ©es utilisent encore ces sublimes bijoux.
bin no hitisuji
kireshi ne wo
ogoto to kikishi
haru no yo no yume
un de mes cheveux rompit.
Ce son me parut
ĂȘtre celui d’un koto ;
rĂȘve de nuit de printemps
Yosano Akiko
xwaga kuro-kami ya
kawaruran
kagami no kage ni
fureru shira-yuki
pareils mes cheveux auraient-ils
changé de couleur ?
Voici qu’au reflet du miroir
est tombée la neige blanche
Ki no Tsurayuki _ Anthologie Kokin ShĂŒ
Livre 10 poĂšme 460
COIFFURES DES GEISHA
Les geisha ainsi que les femmes galantes yûjo et les danseuses de kabuki nouent depuis toujours leurs cheveux.
Pour dormir sans Ă©craser sa coiffure, l’Ă©lĂ©gante devait dormir sur un oreiller haut de bois rembourrĂ© parfois de paille, dĂ©nommĂ© takamakura. Un supplice !
SECRETS DE BEAUTE DURANT EDO